Le plan Eau, six mois après : des avancées sur la réutilisation des eaux usées et sur le volet financier
En déplacement dans le Pas-de-Calais ce 5 octobre, Christophe Béchu a dressé un premier bilan du plan Eau, six mois après son lancement par Emmanuel Macron. Sur 53 mesures prévues, 34 ont été enclenchées et 12 réalisées, a affirmé le ministre de la Transition écologique. Il a notamment mis en avant les projets de réutilisation d'eaux usées traitées, la réduction des fuites et la sécurisation de l'approvisionnement en eau potable ainsi que l'augmentation des moyens des agences de l'eau. Mais d'autres mesures comme la réduction des prélèvements à l'échelle des bassins se font attendre.
C'était la 53e mesure du plan Eau présenté par Emmanuel Macron le 30 mars dernier : rendre compte aux parties prenantes, "a minima deux fois par an" de la mise en oeuvre des mesures du plan. Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique, s'est livré à l'exercice ce 5 octobre, à l'occasion de la journée sur la gestion durable de la ressource en eau organisée par l'association des maires et des présidents d'intercommunalités du Pas-de-Calais. Sur 53 mesures prévues, 34 ont été enclenchées et 12 réalisées, s'est félicité Christophe Béchu. Il a notamment insisté sur la sécurisation de l'approvisionnement en eau potable, grâce aux travaux d'interconnexion entre réseaux d'eau. Parmi les 2.000 communes en tension sur l'eau potable lors de la sécheresse de 2022, 400 opérations ont été menées depuis un an, indique le bilan diffusé par le ministère. Elles ont été accompagnées financièrement par les agences de l’eau à hauteur de 50%, soit 62 millions d'euros d’aides pour un montant total de 120 millions d'euros.
Réutilisation des eaux usées traitées : 419 projets identifiés
Christophe Béchu a aussi mis l'accent sur les avancées en matière de réutilisation des eaux usées traitées (REUT) pour des usages non domestiques tels que le nettoyage des voiries ou l'arrosage des espaces verts. Sur les 1.000 projets de valorisation des eaux non conventionnelles visés sur l’ensemble du territoire d’ici 2027, 419 ont été identifiés par le ministère – 136 sont d'ores et déjà mis en service, 88 sont en cours d'instruction et environ 200 sont encore à l'étude. Les premières évolutions réglementaires (décret du 29 août 2023) ont permis de faciliter l'utilisation de ces eaux, souligne le ministère. Des arrêtés ministériels viendront notamment préciser certains seuils et conditions d'utilisation pour les usages agricoles et l'arrosage des espaces verts.
Alors que seulement 43% des masses d'eau sont évaluées en bon état écologique et que les sécheresses à répétition risquent d'entraîner une augmentation mécanique du taux de concentration en intrants du fait de la diminution des volumes d'eau, le bilan insiste aussi sur la restauration de la "fonction filtre" de la nature. Ainsi, la mesure Renaturation des villes et des villages du fonds vert a donné lieu, à fin septembre, à 85 millions d'euros d'engagements de l'État pour accompagner plus de 400 projets de collectivités dans leur adaptation aux effets du changement climatique. À Romans-sur-Isère, par exemple, la découverte de la Savasse, un affluent de l’Isère, doit permettre d'apporter de la fraîcheur en été.
Plus de moyens pour les agences de l'eau
Christophe Béchu a aussi insisté sur l'augmentation des moyens des agences de l'eau. Le projet de loi de finances pour 2024 prévoit un financement supplémentaire de 475 millions d'euros par an et procède à une importante réforme de la fiscalité de l'eau visant à renforcer le principe pollueur-préleveur-payeur et les moyens d'intervention des agences (1 euro de leur part entraîne un effet de levier de 4 ou 5, a estimé le ministre). Mis en place le 3 juillet, le portail Aquagir, conçu comme un agrégateur de solutions pour accélérer l'action des collectivités, "témoigne d'un réel engouement", indique par ailleurs le bilan. Au 25 septembre, 53 collectivités territoriales étaient inscrites, 125 offres et solutions disponibles et 6.763 visites sur des offres et solutions ont été enregistrées.
Sur le volet sobriété, l'accent est mis dans le bilan sur la valorisation des initiatives exemplaires des collectivités. La troisième édition des Trophées nationaux des économies d’eau, organisée par le Club des économies d’eau, animé par la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR), en partenariat avec l’Association des maires de France (AMF) et des présidents d’intercommunalité, a reçu 24 candidatures issues d’acteurs privés et publics entre avril et juillet 2023, avec une attention particulière portée aux économies d’eau dans les infrastructures collectives (établissements scolaires, sportifs, de santé, etc.). Pour sensibiliser les collectivités territoriales au sujet, la secrétaire d’État à la Biodiversité, Sarah El Hairy, a également lancé, avec l’association Amorce, le "défi sobriété -10 % d’eau" visant à encourager les collectivités à réduire de 10% les prélèvements en eau relatifs à leurs patrimoines et services publics dès 2025.
Mesures moins avancées
D'autres mesures en revanche ont peu avancé – c'est le cas de la tarification incitative de l'eau, le Cese n'ayant été saisi sur le sujet que le 12 septembre pour élaborer des recommandations – ou n'ont pas encore été lancées. L’obligation d’installer des compteurs avec télétransmission des volumes prélevés ne sera expérimentée qu'en 2024, avec une généralisation annoncée pour 2027. Quant à la définition d’objectifs chiffrés de réduction des prélèvements dans les schémas d'aménagement et de gestion des eaux (Sage) et les projets de territoire pour la gestion de l'eau (PTGE), elle n’est prévue qu’à l’horizon de la fin du quinquennat. "Ce sont des mesures qui nécessitent plus de concertation", justifie le ministère.
Conformément au texte, un nouveau point d’étape devrait être organisé au mois de mars prochain.