Le nouveau Plan national pour des achats durables en consultation
Avec ce troisième Plan national pour des achats durables 2021-2025, le ministère de la Transition écologique entend tirer les leçons du bilan mitigé de la version précédente. De nouveaux outils y sont proposés pour mieux prendre en compte les objectifs de développement durable dans la démarche d'achat et un système de suivi plus solide pour valoriser les progrès réalisés et au besoin ajuster les objectifs.
Le ministère de la Transition écologique a ouvert à la consultation, jusqu’au 6 juillet, le troisième Plan national pour des achats durables (PNAD) qui couvrira la période 2021-2025. Cette feuille de route en matière de commande publique durable, dans ses volets sociaux et environnementaux, vise avant tout à mieux outiller les acheteurs publics et à rehausser les ambitions du plan précédent. Des travaux sont menés en ce sens depuis la fin 2020, sous la présidence du Commissaire général au développement durable (CGDD), dans une démarche de concertation entre les services de l’État, les collectivités territoriales, le secteur hospitalier et leurs prestataires, des réseaux d’acheteurs, etc. Le nouveau plan s’articule autour de trois objectifs principaux : en éclairer les enjeux, aider les acheteurs à s’en emparer, et assurer son suivi et sa promotion. Chaque objectif du plan est ensuite décliné en actions - une vingtaine au total - avec des pilotes clairement identifiés (haut-commissariat à l’emploi et à l’engagement des entreprises, Ademe, CGDD, délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle, associations d’élus etc.) pour en assurer la mise en œuvre et le suivi et mobiliser un certain nombre de contributeurs à cet effet.
D’autres travaux en cours pour conforter le plan
Cette volonté d’accélérer la mobilisation d’une commande publique durable est portée au niveau normatif par le projet de loi Climat et Résilience inspiré des travaux de la Convention citoyenne pour le climat actuellement débattu au Sénat (lire notre article du 18 juin 2021). Son article 15 impose notamment la prise en compte des considérations environnementales dans les marchés publics, tant dans les conditions d'exécution du marché que dans les critères de son attribution. Il rejoint les objectifs poursuivis par la mission qui a été confiée par le Premier ministre à deux parlementaires, la sénatrice du Finistère, Nadège Havet (RDPI) et la députée de la Haute-Vienne, Sophie Beaudoin-Hubière (LREM), en février dernier. Les conclusions de ces travaux attendues, d’ici le 31 juillet, pourront être mobilisées pour la déclinaison du plan de relance, dont une part des crédits seront déployés via la commande publique (verdissement du parc automobile, rénovation énergétique des bâtiments publics…) pour un volume de 100 milliards d’euros. Elles faciliteront également la mise en oeuvre du nouveau PNAD. Sachant que plusieurs véhicules législatifs ont déjà balisé le terrain, à commencer par les lois Egalim et Agec, et plus récemment la loi Asap.
Objectifs revus à la hausse
En 2019, la part des marchés publics annuels intégrant une disposition environnementale représentait 15,8% du nombre de marchés notifiés, résultat inférieur à l’objectif de 30% fixé par le précédent PNAD. Et sur le volet inclusif, la part de ceux intégrant une considération sociale représentait seulement 12,5%, loin des 25% fixés par le PNAD. Un bilan en demi teinte qui incite pourtant le ministère à voir grand et ce en cohérence avec les mesures attendues dans le cadre du projet de loi Climat et Résilience. Avec le nouveau plan, la totalité des marchés notifiés au cours de l’année comprendront "au moins une considération environnementale" d’ici 2025. Et 30% d’entre eux "au moins une considération sociale". La plateforme RAPIDD (Réseau des administrations publiques intégrant le développement durable), mise en ligne par le ministère, jouera son rôle à plein, moyennant quelques évolutions pour intégrer de nouveaux outils numériques : clausier, approche en cycle de vie des produits, grille d’analyse des externalités positives (gains économiques et environnementaux), etc. Le Marché de l’inclusion, outil conçu dans le cadre du Pacte d’ambition pour l’insertion par l’activité économique, - qui référence environ 6.000 structures - servira à développer ce secteur et à le promouvoir auprès des acheteurs publics par des formats pédagogiques et des ressources pratiques. Un kit de sensibilisation et de formation aux achats inclusifs, composé de moocs, tutoriels, partages de pratiques élaborés en partenariat avec les acteurs de l’inclusion, viendra l'enrichir prochainement. En bref, le plan doit concourir à l’acculturation des acheteurs à la pratique des achats responsables, notamment en prenant appui sur les nombreux guides et fiches pratiques élaborés par les différents pilotes et contributeurs, dont les associations d'élus. Un kit de formation commun "achats publics durables" a par exemple été piloté par l’Ademe avec 3AR (Association Aquitaine des Achats Publics Responsables) et RESECO commande publique et développement durable.
Diffuser les bonnes pratiques
Certaines filières prioritaires (numérique, alimentation durable et restauration collective, transport ou construction) serviront de "démonstrateurs" de la mise en œuvre du PNAD. Il s’agit de mettre en avant les bonnes pratiques, plans d’actions locaux et labels existants comme le label Relations fournisseurs et achats responsables (RFAR) et l’écolabel européen. Les schémas de promotion des achats socialement et écologiquement responsables (Spaser) devraient prendre du galon. Ces schémas présentent "l’opportunité de rassembler l’ensemble des acteurs d’un territoire autour d’un plan stratégique pour les achats durables", insiste le ministère. Or, seulement 160 collectivités entrent aujourd’hui dans le champ de ce dispositif (de par le volume annuel minimum d’achat fixé à 100 millions d’euros) et 34 seulement, soit 20% d’entre elles, ont donné suite à leur obligation de créer ces schémas.
Une démarche évolutive
La précédente édition du plan a pâti d’un manque de suivi de ses actions, empêchant ainsi de mesurer l’évolution des pratiques d’achats durables et expliquant que le plan soit resté "partiellement réalisé". Une erreur que la troisième génération ne veut pas renouveler. À échéances régulières, la gouvernance du plan doit permettre de mesurer la mise en œuvre, l’effectivité, et la bonne appropriation du PNAD. Deux fois par an, un comité de haut niveau, piloté par le CGDD, associant des représentants des collectivités, des acteurs de l’État, le réseau des acheteurs hospitaliers ainsi que des associations d’acheteurs des trois fonctions publiques (inter-réseaux commande publique), se réunira pour faire le point. Ce travail de suivi permettra de valoriser les progrès réalisés et de rehausser au besoin les ambitions du Plan qui sera donc "évolutif". Pour l'accompagner, le recours à des indicateurs qualitatifs est développé, pour permettre aux acteurs de suivre l’évolution de leurs achats, notamment en matière d’économie circulaire, par exemple en recensant les produits acquis issus du réemploi, de la réutilisation ou du recyclage. Ces modèles pourront également servir d’exemples pour les structures souhaitant élaborer une stratégie ou politique d'achat ou se doter d’un document stratégique tel qu’un Spaser.