Transports urbains - Le droit au transport insuffisamment appliqué
Près d'un tiers des bénéficiaires potentiels de la tarification sociale dans les transports urbains prévue par la loi SRU (Solidarité et Renouvellement urbains) ne peuvent aujourd'hui avoir accès au transport avec la réduction prévue, selon un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) et du Conseil général des ponts et chaussées (CGPC), récemment mis en ligne.
Affirmé par la loi d'orientation sur les transports intérieurs de 1982, puis par la loi de lutte contre les exclusions de 1998, le droit au transport a été précisé par l'article 123 de la loi SRU du 13 décembre 2000. Cet article prévoit que les personnes - et leurs ayants-droit - dont les ressources sont inférieures au plafond prévu pour l'attribution de la couverture médicale universelle complémentaire (CMUC) ont droit à une réduction de 50% dans les transports urbains de voyageurs, que ces personnes résident ou non dans le périmètre du réseau de transport. Près de 5 millions de personnes sont potentiellement concernées, dont plus de 90% sont bénéficiaires de la CMUC.
"Cinq ans après le vote de la loi SRU, il apparaît clairement que la loi est insuffisamment et inégalement appliquée par les autorités organisatrices de transport urbain (AOTU), constate le rapport de l'Igas et du CGPC. L'article 123 vient en effet interférer avec les politiques commerciale et sociale de ces autorités, dans un domaine pleinement décentralisé où elles sont autonomes." Selon une enquête réalisée par le Gart en 2005, 7% des autorités organisatrices n'accordent aucune réduction sociale tandis que 20% d'entre elles appliquent la loi SRU, soit en pratiquant la gratuité totale, soit en accordant une réduction d'au moins 50%. Entre ces deux extrêmes, les situations sont très contrastées, certaines AOTU pratiquant des réductions supérieures à 50%, principalement en direction des personnes âgées, handicapées ou, plus récemment, des chômeurs et des Rmistes, tandis que d'autres ont des réductions moindres ou des conditions d'accès restrictives.
Pour que l'article 123 de la loi SRU soit mieux appliqué, la mission Igas-CGPC avance plusieurs recommandations. Elle demande notamment que les autorités organisatrices puissent disposer rapidement d'un accès électronique au fichier de la CMUC afin de vérifier la qualité des demandeurs. Elle recommande aussi d'élargir la tarification sociale aux "travailleurs pauvres" qui ont besoin d'utiliser les transports au quotidien et qui remplissent les conditions de ressources de la CMUC. L'accès des périurbains aux tarifs sociaux est également jugée plus que jamais souhaitable pour restreindre l'usage de la voiture au profit des transports en commun.
Anne Lenormand