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Sécurité - Le Conseil d'Etat suspend l'arrêté "anti-burkini" de Villeneuve-Loubet

Les restrictions que les maires sont amenés à apporter aux libertés ne peuvent être justifiées que par des "risques avérés d'atteinte à l'ordre public". C'est sur cette base que le Conseil d'Etat a invalidé, vendredi 26 août, l'arrêté "anti-burkini" pris par la commune de Villeneuve-Loubet (Alpes-Maritimes) le 5 août dernier. Une décision très attendue après le feuilleton de l'été qui a vu une trentaine de communes du littoral prendre des arrêtés similaires. Les juges examinaient un référé-liberté déposé par la Ligue des droits de l'homme (LDH) et le Comité contre l'islamophobie en France (CCIF) contre une ordonnance du tribunal administratif de Nice qui avait refusé, lundi, de suspendre cet arrêté municipal.
Sans citer explicitement le "burkini", un vêtement de bain islamique recouvrant corps et cheveux, l'arrêté en question visait à interdire sur les plages "toute tenue qui ne serait pas correcte, respectueuse des bonnes mœurs et du principe de laïcité" et qui ne respecterait pas "les règles d'hygiène et de sécurité des baignades". Le tribunal de Nice a jugé que cette mesure était "nécessaire, adaptée et proportionnées" pour éviter des troubles à l'ordre public après la succession d'attentats en France, dont celui de Nice le 14 juillet qui a caussé la mort de 86 personnes.
Ce n'est donc pas l'avis de la plus haute juridiction administrative pour laquelle "il ne résulte pas de l'instruction que des troubles à l'ordre public aient résulté, sur les plages de la commune de Villeneuve-Loubet, de la tenue adoptée en vue de la baignade par certaines personnes". Les attentats "ne sauraient suffire à justifier légalement la mesure d'interdiction contestée". L'arrêté du maire a, selon le Conseil d'Etat, "porté une atteinte grave et manifestement illégale aux libertés fondamentales que sont la liberté d'aller et venir, la liberté de conscience et la liberté personnelle".
Une trentaine d'autres arrêtés restent en vigueur, que ce soit dans les Alpes-Maritimes (Cannes, Nice…), mais aussi au Touquet et à Oye-Plage (Pas-de-Calais), à Sisco et Ghisonaccia (Haute-Corse), ou encore à Leucate (Aude). Mais l'ordonnance du Conseil d'Etat a valeur jurisprudentielle et fera date. "Il appartient désormais à chacun de rechercher dans la responsabilité l'apaisement, qui seul est de nature à éviter les troubles à l'ordre public et à conforter le vivre-ensemble", a réagi le ministre de l'Intérieur, à la suite de cette décision. D'ores et déjà, le maire socialiste de Sisco, Ange-Pierre Vivoni, a cependant prévenu qu'il maintiendrait son arrêté pris au lendemain d'une violente rixe entre des Marocains de Furiani et des villageois dans sa commune mi-août. "Mon arrêté n'était pas de la prévention, je l'ai pris pour la sécurité des biens et personnes de ma commune, je risquais d'avoir des morts !", s'est justifié l'édile auprès de l'AFP.
L'affaire du burkini a créé de vives divisions jusque dans les rangs mêmes du gouvernement. Certains élus, comme le président de la région Paca et de la métropole de Nice Côte d'Azur, Christian Estrosi (LR), ont réclamé une législation nationale sur le sujet, à l'instar de la loi de 2010 contre le voile intégral.

 

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