Le chantier d'insertion de Xaronval, colonne vertébrale du « village 1900 » (88)
Depuis près de 40 ans, ce village rural des Vosges d'une centaine d'habitants vit comme en 1900, le temps des week-ends d'été. Cette activité permet à un chantier d'insertion d'accompagner des dizaines de personnes sans emploi chaque année. Et l'histoire continue...
« Xaronval village 1900 ». La pancarte à l'entrée du bourg prévient le visiteur. La machine à remonter le temps se met en route chaque veille de week-end, de juillet à septembre. Des habitants repassent les habits de l'époque. Le rideau ouvert de la boulangerie laisse échapper les odeurs des premières fournées. Les visiteurs viennent là découvrir une vie d'avant, de vieux métiers, des collections de jouets d'antan, ouvrir les portes d'une vieille quincaillerie...
Au départ, la kermesse du village
C'était le pari de Mr et Mme Lacourt, il y a 40 ans, en transformant la traditionnelle kermesse de l'école en une grande foire des brocanteurs, un week-end de septembre. « On m'a dit oui pour faire plaisir à ma femme, l'institutrice du village », raconte malicieusement Mr Lacourt, antiquaire à l'époque. Il propose alors aux habitants de mettre à disposition leurs granges pour y exposer, « mais en se mettant aux couleurs de 1900 ». L'association s'est ensuite mise à organiser des brocantes à l'ancienne les dimanches d'été. Puis, des animations se sont développées. Jusqu'au bistrot du dimanche aujourd'hui.
Bénévole de l'association « Les amis de Valamont » qui porte cette vie locale depuis des années, Mr Lacourt aujourd'hui se préoccupe du dossier FEDER à envoyer, pour décrocher des subventions pour ouvrir une cantine. C'est l'un des nouveaux projets poursuivis par l'association. Cela permettra d'étoffer la palette des activités et métiers proposés par son chantier d'insertion.
Un chantier d'insertion en appui technique
Celui-ci a été lancé par l'association en 1991. « Nous l'avons envisagé comme une opportunité. Un membre de l'association avait entendu parler de ces nouvelles structures. Notre activité commençait à prendre de l'ampleur. Nous nous sommes dit, pourquoi ne pas en profiter pour aider des gens », retrace Mr Lacourt.
Le chantier est conçu pour participer à la remise en état des meubles exposés, assurer la maintenance, mais aussi l'animation du village. L'entretien du « village 1900 », au sens large, est encore aujourd'hui l'essentiel du travail des salariés du chantier : rénovation des vieux outils, des charrettes, embellissement, mise en place des expositions et des vitrines, entretien des locaux, mise en place des décors l'été. Le chantier travaille en collaboration avec les bénévoles pour l’accueil des visites scolaires (d'avril à juin) sur des ateliers pédagogiques, dans une optique de développement durable (l'usage de l'eau, du mouton à la laine, etc). À l'année, le chantier s'occupe également de la ferme pédagogique, et mène quelques travaux pour le village. Il a ouvert également une recyclerie.
Une insertion liée aux saisons du village
Le chantier d'insertion compte une dizaine de salariés en contrat à durée déterminée d'insertion (CDDI) : des contrats de quatre mois renouvelables sur deux ans. Deux permanents sont chargés de la gestion du chantier, de l'organisation et du suivi des salariés : un encadrant technique d'insertion, et une accompagnatrice socio-professionnelle, également en charge du secrétariat. Le roulement des activités sur l'année favorise un cycle progressif des salariés en insertion. « On recrute souvent en février mars, et les salariés sont formés pour l'accueil des scolaires. Souvent, des salariés partent en fin de saison, cela fait redescendre l'effectif en dessous de la dizaine, ce qui permet d'assurer l'activité d'entretien, avant les nouveaux recrutements en début d'année suivante », explique Agathe Nolent, l'accompagnatrice socio-professionnelle.
Un tremplin
Le chantier accueille des personnes allocataires du révenu de solidarité active (RSA), demandeurs d'emploi longue durée, travailleurs handicapés, ou âgés de plus de 55 ans. « Un tiers des personnes sortent du chantier pour un emploi, une formation, avec les freins à l'emploi levés : problèmes sociaux, de mobilité… » Ce que l'on appelle les sorties positives ou dynamiques. « Un autre tiers ne trouve malheureusement pas d'issue professionnelle, bien que ces personnes en aient les capacités », car le marché de l'emploi reste limité. Le dernier tiers des salariés passe sans que le chantier n’imprime durablement – a priori – leur parcours.
Le chantier a lui aussi évolué en trente ans. « Au départ, les salariés étaient peu nombreux, l'encadrant allait lui-même repérer des personnes en précarité pour leur proposer des contrats. C'est différent aujourd'hui, nous sommes plus nombreux, mais nous passons aussi beaucoup de temps dans la paperasse », glisse Agathe. L'agrément du chantier est passé de 8 places à 15 aujourd'hui.
Un lien serré avec la municipalité
La commune est le client extérieur du chantier d'insertion. Pour l'entretien des espaces verts, du cimetière, le déneigement des trottoirs ou l'entretien des bacs à sel l'hiver, etc. Ou encore récemment la réfection d'une paire de volets d'un logement communal. « Ce sont des petits chantiers, mais nous y tenons car nous savons que le chantier a aussi besoin de ces prestations », explique le maire, Cédric Ménétrier. C'est l'une des raisons au fait que la mairie n'a pas d'agent technique, et n'envisage pas d'en recruter. « Il y a pourtant eu plusieurs salariés du chantier que j'aurais pu embaucher en toute confiance, mais notre intérêt est aussi que le chantier perdure », explique le maire. « Car les gens qui passent par le chantier sont pour beaucoup des accidentés de la vie professionnelle, qui méritent qu'on leur redonne une chance. Pour la plupart d’entre eux, il ne suffit pas de grand-chose pour repartir. » Sans ce chantier, l'animation Village 1900 serait surtout bien « plus compliquée » car ses bénévoles vieillissent aussi. La vie du bourg perdrait en animations. Or, comme le résume le maire, « l'histoire entre l'association, la commune, le chantier, c'est une symbiose ». Elle participe certainement au dynamisme du village. Celui-ci recense aujourd'hui plus de 110 habitants. Ils étaient 60 en 1981.
Points de repères
Le chiffre d'affaires du chantier d'insertion est de 375.000 euros en 2021. Un peu moins de la moitié (43,5%), provient des animations estivales (147.800 euros), des accueils de groupes scolaires et extra scolaires (11.200 euros), et de travaux extérieurs (5.000 euros). Le reste provient de subventions ; sachant que les CDDI sont des emplois aidés, subventionnés à 80 % par l’État et 20 % par le conseil départemental.
Commune de Xaronval
Nombre d'habitants :
Association « Les amis du Valamont », Village 1900 et chantier d'insertion
Agathe Nolent
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