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L'Assemblée adopte le projet de loi Elan

Les députés ont adopté le projet de loi Elan (portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique), ce mardi 12 juin en fin d'après-midi, avec 342 voix pour, 169 voix contre et 44 abstentions. Explications de vote et retour sur les épisodes précédents.

L'Assemblée nationale a adopté ce mardi 12 juin à 17 heures, en première lecture, dans le cadre de la procédure accélérée, le projet de loi Elan (portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique), par 342 voix pour, 169 voix contre et 44 abstentions. Les députés LREM et Modem ont voté pour. Les trois groupes de gauche, socialistes, communistes et Insoumis, ont voté contre, tout comme le groupe LR. Les élus UDI-Agir ont opté pour une "abstention bienveillante", Laure de La Raudière rappelant la promesse des ministres d'améliorer le texte lors de la navette parlementaire.
Sur les 2.957 amendements qui avaient été déposés, 339 ont été adoptés au cours de cette séance publique débutée le 30 mai et qui aura duré "neuf jours et neuf nuits", comme l'a rappelé le député LREM Michaël Nogal. Selon lui, Elan est la loi qui était nécessaire pour prendre en compte le logement de demain, "plus connecté, plus écologique, plus modulable" et qui n'oublie pas les plus démunis. "C'est la loi du logement pour tous", a-t-il résumé.
Le secrétaire d'Etat Julien Denormandie a parlé d'un "texte pragmatique qui simplifie, accélère, et ne contient pas de nouvelle norme qui entrave". Se félicitant de la qualité des débats, le ministre Jacques Mézard a lui aussi revendiqué un "projet de loi simplificateur" qui "va permettre de faciliter la construction, l’aménagement et le déploiement du numérique" grâce notamment à la modernisation du "modèle d’intervention des bailleurs sociaux", à la construction de logements privés rendue "plus facile" et à une série de réponses "à des facteurs de déséquilibres dans nos territoires".

"Cette loi est bien un élan et porte bien une ambition, celle de construire plus vite"

"Cette loi est bien un élan et porte bien une ambition, celle de construire plus vite", a estimé le Modem Patrick Mignola (groupe MDA), avec notamment "des normes qui deviennent enfin pragmatiques". Il a toutefois pointé des points de "vigilance", notamment quant à la question des regroupements de bailleurs sociaux sur laquelle il souhaiterait des adaptations territoriales. Jacques Mézard s'était engagé à étudier le sujet dans le cadre de la navette parlementaire.
"Vous avez suscité beaucoup d'espoir dans la navette", a déclaré Thibaut Bazin, pour Les Républicains, qui a voté "contre ce projet de loi sans élan". Un texte selon lui "non abouti", rempli d'"incohérences", au point de le faire douter de "sa capacité à générer un choc de l'offre". De plus, "rien dans votre stratégie ne nous assure que les nouvelles constructions seront synonymes de qualité de vie", a-t-il lancé au gouvernement, se disant très déçu qu'il n'y ait "aucune adaptation de la loi SRU". Pour autant, "sans vous deux, j'ai le sentiment que ça aurait été pire", a-t-il dit à Jacques Mézard et Julien Denormandie, en référence à la somme des amendements offensifs déposés par des députés LREM, notamment les atteintes à la loi Littoral de "marcheurs bretons".

"Vous vendez le patrimoine des Français à la découpe !"

François Pupponi, pour la Nouvelle Gauche, a jugé plusieurs dispositions porteuses de risques en termes de mixité sociale. S'il reconnaît l'"esprit d'écoute" des ministres sur la question de l'hébergement notamment, il fustige l'absence de tout "garde-fou" visant à empêcher la vente en bloc de logements sociaux à des investisseurs privés. "Vous vendez le patrimoine des Français à la découpe !", a-t-il lancé, évoquant deux types d'acheteurs : les investisseurs privés qui verront dans les quartiers attractifs l'occasion de faire des "opérations financières juteuses" ; les marchands de sommeil dans les quartiers très défavorisés. Il s'agit pour lui d'un projet de loi qui accompagnera la "dérégulation" du marché du logement et favorisera l'habitat "low cost".
C'est "une loi de rupture" qui considère le logement comme "un bien marchand, un bien d'usage, un bien de consommation", a également considéré le communiste Stéphane Peu pour le groupe GDR. Selon lui, "ce texte a trop cédé aux lobbies", ce qui expliquerait les reculs sur les normes handicap dans le logement et le rôle réduit des architectes des bâtiments de France notamment. Quant à la vente de logements HLM, "la poutre maîtresse" de la réforme HLM, elle aurait ouvert la porte à la "remise en cause des fondamentaux" de la loi SRU, ce "totem de la République sociale". Il craint que le Sénat s'en saisisse pour aller beaucoup plus loin.

Résumé des épisodes précédents

La première lecture avait débuté en séance publique mercredi 30 mai à partir d'un texte du gouvernement déjà été largement amendé en commission (voir notre article Elan - La nuée d'amendements en commission n'a pas bouleversé le texte).
Les députés avaient véritablement entamé l'examen des articles, jeudi le 31 mai, par le volet urbanisme avec l'adoption de nombreux amendements : place des communes dans les projets partenariaux d’aménagement et dans l’élaboration des grandes opérations d’urbanisme, mesures de simplification concernant les études d’impact et les plans locaux d’urbanisme (PLU), modernisation des schémas de cohérence territoriale (Scot), rôle des architectes des bâtiments de France, obligation de construire des logements "évolutifs" et non plus "accessibles" aux personnes à mobilité réduite dans les immeubles collectifs…(voir notre article Projet de loi Elan : l'Assemblée débute son marathon par le volet urbanisme). Le lendemain, vendredi 1er juin, les députés avaient lâché du lest sur des dérogations à la loi Littoral qui avaient été ajoutées en commission, permettant, au cas par cas, le comblement des "dents creuses" (voir notre article Elan - Dérogations à la loi Littoral : après les remous, le gouvernement donne des gages).
Les députés avaient ensuite attaqué le week-end par l'examen de l’article 25 qui fixe les modalités de regroupement des organismes de logement social d'ici 3 ans. Malgré de nombreux amendements, les élus de l’opposition n'étaient pas parvenus à supprimer l’obligation prévue ni à réviser le seuil (voir notre article Réforme HLM - Elan : le titre 2 dédié à l'évolution du secteur du logement social a été adopté ce week-end).
Lundi 4 juin, les députés avaient examiné l'article 37 relatif à la commission chargée de désigner les candidats pour l’attribution des logements disponibles dans les QPV (voir notre article Attributions de logements sociaux - En plein Elan, Jacques Mézard envoie une circulaire d'application de la loi Egalité et Citoyenneté).
Le lendemain, c'était au tour de l'article 46, celui qui étend de cinq à dix ans la durée pendant laquelle les logements sociaux vendus restent comptabilisés dans les "quotas SRU". Les amendements visant à supprimer l'article avaient été rejetés, mais tout le monde avait en tête le fait qu'il reviendrait au Sénat (voir notre article Débats tendus en séance sur la loi SRU)
Vendredi 8 juin, les députés avaient adopté l'article 51 dit "Airbnb" consacré aux locations meublées touristiques (voir notre article Sans attendre la loi Elan, les plateformes de location touristique passent un accord sur les 120 jours et son encadré). Ils avaient également introduit un nouvel article, le "54 bis A nouveau", visant à réautoriser les préenseignes dérogatoires pour les restaurants aux abords des centres-villes et centres-bourgs (voir notre article Projet de loi Elan - Les députés réautorisent les préenseignes dérogatoires pour les restaurants en milieu rural).
L’examen du texte s'était achevé à marche forcée tard dans la nuit, vendredi 8 juin, sans bouleversements notables sur le volet "rénovation énergétique" (voir notre article Projet de loi Elan : la rénovation énergétique réduite à la portion congrue).

 

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