Urbanisme - La seule mention d'une "zone verte" au sein des documents graphiques du PLU ne suffit pas à la rendre inconstructible
Par un arrêt rendu le 26 mai 2010, le Conseil d'Etat a apporté des précisions sur la portée des règles fixées par les documents graphiques et non reprises par le règlement du plan local d'urbanisme (PLU).
La Haute Juridiction a été saisie d'un pourvoi formé contre le rejet, tant en première instance que par la cour administrative d'appel, du recours formé contre le refus opposé à une demande de permis de construire pour l'édification de deux maisons d'habitation. La commune avait en effet refusé de délivrer au requérant les permis sollicités, au motif que les documents graphiques présentant les orientations d'aménagement du PLU classaient la parcelle du requérant, située en zone à urbaniser 1AU, en zone "dite verte" affectée à la réalisation d'espaces verts.
La cour administrative d'appel avait considéré que les articles du règlement relatifs à la zone 1AU du PLU devaient être regardés comme complétant l'orientation d'aménagement situant la parcelle du requérant en "zone verte" et ne permettaient donc pas la construction de maisons d'habitation dans cette zone. En effet, l'article L.123-5 du Code de l'urbanisme précise que "le règlement et ses documents graphiques sont opposables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, plantations, affouillements ou exhaussements des sols, pour la création de lotissements et l'ouverture des installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan".
La question était donc de savoir si la seule délimitation d'une zone dite verte dans les documents graphiques d'un PLU, au titre des orientations d'aménagement, dans une zone à urbaniser, suffit à conférer à cette zone verte un caractère inconstructible.
Le Conseil d'Etat a répondu par la négative et a censuré l'arrêt de la cour administrative d'appel. Il a d'abord rappelé les différentes possibilités qui s'offrent aux communes pour faire échapper un espace vert à l'urbanisation dans le cadre du PLU :
- la définition d'une zone naturelle à protéger en application de l'article L.123-1 du Code de l'urbanisme ;
- la fixation d'un emplacement réservé aux espaces verts en application de l'alinéa 8 de l'article L.123-1 du même code ;
- le classement en espace boisé en application de l'article L.130-1 du même code.
Puis il a précisé que la délimitation dans les documents graphiques d'un PLU, au titre des orientations d'aménagement, d'une zone verte au sein d'une zone à urbaniser, qui n'entre dans aucune des hypothèses énumérées, "ne suffit pas, par elle-même, à conférer à cette zone un caractère inconstructible".
En l'espèce, il a été jugé que la zone verte n'a fait l'objet ni de la fixation d'un emplacement réservé aux espaces verts en application des dispositions précitées du 8° de l'article L.123-1 du Code de l'urbanisme, ni d'un classement en espace boisé au sens de l'article L.130-1 précité du même code. De plus, la Haute Juridiction a relevé que le règlement du PLU ne précisait pas que les zones dites "vertes" seraient affectées exclusivement à la réalisation d'espaces verts. Dès lors, en jugeant que le PLU ne permettait pas la construction de maisons d'habitation dans la zone verte, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit.
L'arrêt ainsi rendu par le Conseil d'Etat est conforme à une jurisprudence constante, qui consacre la primauté du règlement sur les documents graphiques, comme par exemple un arrêt rendu le 6 mai 1981, dans lequel le Conseil d'Etat avait fait prévaloir l'application des dispositions du règlement "quelles que soient les indications portées sur les représentations graphiques" (CE, 6 mai 1981, Bergeron, n°09964).
Maître Fanny Morisseau, Avocat à la Cour / Cabinet de Castelnau
Référence : Conseil d'Etat, 26 mai 2010, M. Dos Santos, n°320780