La production fruitière, modèle de relocalisation en Meurthe-et-Moselle (54)

Lauréate des appels à projets « Résilience » du plan France Relance, Vegafruits propose un modèle de relocalisation industrielle. Fondée en 1991 et installée à Saint-Nicolas-de-Port, cette union de coopératives regroupe près de 200 producteurs lorrains de fruits locaux, mirabelles notamment.

Plus qu’un simple groupement de producteurs lorrains, Vegafruits est une pépite de l’industrie agroalimentaire française qui vient de remporter un appel à projets du plan France Relance. Basée à Saint-Nicolas-de-Port, une commune de 7.500 habitants en Meurthe-et-Moselle (54), cette union de coopératives promeut les vergers du Grand Est, les valorise et transforme leurs productions. Lancée en 1991, la structure revendique aujourd’hui près de 40% du marché mondial de la mirabelle. Emblématique de la région, cette variété de prune représente l’un des atouts majeurs de la filière fruitière locale.

« La mirabelle est exploitée ici depuis des siècles, se félicite Bruno Colin, directeur de Vegafruits. Nous ne faisons que poursuivre le travail commencé par nos aïeux. Nous sommes maintenant leader mondial. Mais il faut aller plus loin : il nous faut reconstruire ce qui a été déconstruit dans les années 1990. À l'époque, il y avait une trentaine de conserveries. Aujourd’hui, il n’y en a plus qu’une et une confiturerie. » Face à la concurrence croissante à l’international, Vegafruits mise donc sur un plan de développement, amorcé depuis plusieurs années déjà.

Une implantation au long cours

À l’origine, durant les années 1980 à 1990, trois coopératives de Lorraine décident d'œuvrer ensemble. En 1993, elles finissent par créer Vegafruits, une union de coopératives. Celle-ci regroupe alors, et jusqu’à ce jour, environ 800 hectares de vergers, soit près de 60% des producteurs lorrains de mirabelles. Au fil du temps, la structure développe la surgélation. « Dans l’agroalimentaire, il n’y avait pas de mirabelles surgelées avant, alors que ça se pratiquait dans les familles de la région », commente Bruno Colin. Nouvelle étape en 2014 : les coopérateurs développent la purée de fruits : une compote sans additif. Vegafruits se lance ainsi dans la transformation. Voilà pourquoi, trois ans plus tard, la structure crée la marque Minute Fruitée : des paniers de fruits frais et des compotes en gourdes.

Un triptyque gagnant : climat, terres et savoir-faire

Le lancement de Minute Fruitée, en 2017, s’opère grâce à une levée de fonds menée auprès des coopérateurs de Vegafruits, ainsi qu’auprès des salariés de l’ensemble des exploitations, qui ont pris des parts comme associés non-coopérateurs. Cette filière exclusivement lorraine fait mouche auprès des collectivités, comme la mairie de Metz, qui s’en saisit pour approvisionner ses écoles maternelles. Aussi, de grandes entreprises optent pour le service de livraison de paniers de fruits frais offerts à leurs salariés.

« C’est un triptyque gagnant, estime Bruno Colin. On s’appuie sur un climat favorable à la culture de fruits tels que les mirabelles et quetsches de Lorraine, les cerises Montmorency et les myrtilles des Vosges. Nous avons des terres disponibles pour les exploiter et, bien entendu, nous détenons un savoir-faire séculaire. » Dans le cadre de Minute Fruitée, l’union coopérative vise aussi à retrouver le lien avec les consommateurs. C’est d’ailleurs ce dernier point qui a séduit la mairie de Metz.

Éducation au goût

Depuis janvier, la commune approvisionne ses 35 écoles maternelles dans le cadre du dispositif « Un fruit frais pour la récré » (financé à hauteur de 50% par l’Union européenne). « Cela concerne 3.500 élèves, souligne Anne Stemart, adjointe au maire, déléguée à l’éducation. Cette démarche a un triple intérêt : l’éducation au goût, une connaissance du terroir et une implication des producteurs locaux. En l’occurrence, cela se traduit par des actions concrètes sur le terrain : une intervention des producteurs dans les écoles, des visites des exploitations par les enfants et, bien entendu, la découverte des produits au quotidien. »

Regagner du terrain sur la scène internationale

Si les commandes ne manquent pas, la concurrence reste rude. « Il ne faut pas perdre ce qu’on a déjà, prévient Bruno Colin. Notre activité est un fleuron, au même titre qu’Airbus. Les autres pays ne nous attendent pas ! » C’est pour cette raison que les coopérateurs envisageaient un projet de développement. « Il était déjà dans les tuyaux, poursuit le directeur de Vegafruits. Pour répondre à l’appel à projets Résilience [voir encadré], nous l’avons juste avancé et revu à la hausse. »

Les producteurs lorrains espèrent regagner le terrain perdu face à des concurrents venus des États-Unis ou de Turquie. Avec une aide de 2,1 millions d’euros, obtenue par le plan France Relance, la filière locale devrait passer un cap et s’atteler à la relocalisation de productions d'espèces oubliées, comme le cynorrhodon, plus connu sous le nom de « gratte-cul », et la cerise noire.

Des investissements décisifs

Au total, Vegafruits prévoit d’investir 10 millions d’euros : un quart pour « décarboner » l’entreprise (changement de molécule pour la réfrigération, sans effet de serre), un quart pour la construction d’un bâtiment écologique (augmentation des capacités de conditionnement et de stockage), un quart pour l’achat de matériel de tri optique (pour trier automatiquement les fruits) et, enfin, un quart pour l’adaptation des machines aux fruits à « relocaliser ».

L’automatisation du tri n'entraînera pas de perte d’emploi. « Au contraire, comme nous allons augmenter notre capacité de production, nous allons embaucher. Nous devrions être autour de 30 salariés à partir de 2022, contre 25 aujourd’hui », commente Bruno Colin. Autre enjeu de taille en perspective : le développement des vergers à Haute Valeur Environnementale. Courant 2021, près de 80 % des vergers seront classées en niveau 3, le degré le plus exigeant de la certification environnementale des exploitations agricoles.

Vegafruits en quelques chiffres

  • 25 salariés (contre 2 en 1990)
  • 800 hectares de vergers
  • 200 familles exploitantes
  • 65 exploitations
  • 65 associés non-coopérateurs (salariés des exploitations) et 60 entreprises ou chefs d’entreprises associés coopérateurs

Le plan de développement de Vegafruits :

  • 10 millions d’euros d’investissement
  • 2,1 millions d’euros d’aides via le plan France Relance (projet Résilience)

Autres soutiens : Feader, région Grand Est

Les projets de « Résilience » industrielle

En février, 34 nouveaux projets ont été lauréats de l’appel à projets « Résilience » industrie du plan France Relance. Cela porte à 65 le nombre de projets retenus pour ce volet du plan France Relance, pour une enveloppe de 268 millions d’euros. L’appel à projets pour les relocalisations dispose d’une enveloppe totale de 600 millions d’euros, destinée aux secteurs critiques : santé, agroalimentaire, électronique, intrants essentiels de l’industrie (chimie, matériaux, matières premières, etc.), et applications industrielles de la 5G.

Vegafruits - Coopérative agricole

60-62 rue Charles Courtois
54210 Saint-Nicolas-de-Port
contact@vegafruits.fr

Bruno Colin

directeur

Commune de Metz

Nombre d'habitants :

120211
Hôtel de Ville, 1 place d'Armes
57 000 Metz

Anne Stemart

Adjointe au maire, déléguée à l’éducation et aux affaires scolaires

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