La présidente de la Commission appelle à "redécouvrir l’esprit de Maastricht"

Le discours de l’état de l'Union prononcé ce jour par la présidente de la Commission européenne a dû satisfaire l’Élysée, qui voit plusieurs de ses propositions reprises. Ursula von der Leyen a notamment plaidé pour "une nouvelle gouvernance économique" de l’Union, où "stabilité et croissance vont de pair", pour un découplage des prix de l’électricité et du gaz ou encore pour le projet de "communauté politique européenne" porté par Emmanuel Macron.

C’est vêtue de jaune et bleu, comme d’autres membres de la Commission, et en présence d’Olena Zelenska, première dame d’Ukraine, que la présidente de la Commission européenne a présenté ce 14 septembre son 3e discours sur l’état de l’Union. Un discours retransmis en direct pour la première fois en France depuis son institution en 2010, par France info TV. La guerre en Ukraine y a sans surprise occupé une large place, tant il est vrai que le conflit mobilise depuis le printemps une institution soucieuse et fière "d’honorer ses valeurs". Et qui y a peut-être également vu une occasion de ressouder des rangs passablement mis à mal par la gestion du covid (v. notre article du 4 mars). L’Union européenne ne progresse que dans les crises, dit-on. Ursurla von der Leyen s’est employée à le démontrer, relevant que l’Union avait mis "des années" à réagir face à la crise financière, "des mois" face au covid mais avaient réagi "immédiatement" face à l’invasion russe.

Défendre la démocratie dans l’Union…

La présidente n’a tout aussi logiquement pas annoncé des lendemains qui chantent : "On va être mis à l’épreuve par ceux qui veulent exploiter toute once de division entre nous", a-t-elle notamment averti, alors que les visions – et les pratiques – des États membres ne sont pas toujours alignées (v. notre article du 12 septembre). Pourtant, Ursula von der Leyen ne s’est elle-même pas toujours fait apaisante. Annonçant la prochaine présentation d’un "pacte pour la défense de la démocratie", menacée selon elle par des "chevaux de Troie" russes ou chinois… mais aussi par la "corruption sur notre sol" – le cadre législatif de la lutte contre la corruption sera renforcé –, la présidente a insisté sur la nécessaire indépendance de la justice et sa volonté de protéger le budget via le "mécanisme de conditionnalité" (qui soumet le versement des subventions au respect des principes de l’état de droit), qui met actuellement à mal la Hongrie.

De même, en déclarant que si "l’Europe s’est montrée sous son meilleur jour" avec l’accueil des réfugiés ukrainiens, elle ne présente pas toujours le même visage aux autres migrants. Aussi Ursula von der Leyen entend mettre en place un "système à l'épreuve des crises qui puisse être rapidement déployé, un mécanisme permanent et juridiquement contraignant qui garantisse la solidarité" et dans lequel "tous les États membres prennent leur part".

Citant feu le président du Parlement européen David Sassoli (v. notre article du 11 janvier), la présidente a également estimé que "la démocratie n’est pas démodée mais doit se mettre à jour". Devraient y contribuer la mise en œuvre de certaines préconisations de la Conférence sur l’avenir de l’Europe (v. notre article du 9 mai), l’inscription d’un principe de solidarité intergénérationnelle dans les traités visant à "ne pas porter préjudice à l’avenir de nos enfants" ou encore la tenue d’une "convention européenne" pour "améliorer la manière dont nous faisons les choses".

… et au-delà

Ursula von der Leyen estime plus largement que "le moment est venu de renforcer les démocraties sur notre continent". Outre un soutien aux candidatures à l’adhésion des Balkans occidentaux, de l’Ukraine, de la Moldavie et de la Géorgie, qui font "partie de la famille", la présidente a fait part de son soutien à la création d’une communauté politique européenne, projet porté par le président Macron (v. notre article du 1er juillet).

Défis économiques…

La question des migrations ne manquera pas d’être débattue, puisque la présidente a par ailleurs appelé "à l’embauche de main d’œuvre étrangère" pour faire face – avec la formation continue – à la pénurie de travailleurs, qui constitue selon elle l’un des trois grands défis auxquels l’Union doit faire face sur le plan économique. S’y ajoutent, d’une part, la levée des obstacles qui freinent les PME – un paquet de soutien leur sera dédié, qui comprendra une proposition de règles fiscales uniques pour les entreprises dans l’Union et la révision de la directive sur les arriérés de paiement – et, d’autre part, la lutte contre les dépendances, notamment à l’égard des terres rares. L’objectif est ici de développer "de nouveaux partenariats, avec des partenaires au diapason de nos idées en matière de droit du travail et d’environnement". Un "acte européen sur les matières premières critiques" est prévu, qui devrait notamment se traduire par une participation accrue de l’UE aux projets d’importance européenne. La création d’un nouveau fonds de souveraineté européen est également annoncée.

… budgétaires et énergétiques

Autre défi, "la redécouverte de l’esprit de Maastricht", où "stabilité et croissance vont forcément de pair". Si Ursula von der Leyen souligne que la dette publique est élevée, elle estime que "les États membres devraient avoir plus de flexibilité sur leur trajectoire de désendettement" et "plus de souplesse pour investir", et "davantage de comptes à rendre". Des propositions devraient être formulées le mois prochain.

Naturellement, la crise énergétique n’a pas été oubliée. Rappelant les mesures en cours d’examen (v. notre article du 12 septembre), la présidente a également confirmé travailler au découplage des prix du gaz et de l’électricité, estimant que le "marché ne fonctionne plus" et "ne correspond plus aux besoins des consommateurs". Une proposition là encore défendue par la France. Rappelant par ailleurs que "le monde avait déjà fait face dans les années 1970 à une crise pétrolière mais avait continué sur le même chemin" – "et nous continuons à en payer le prix !" –, Ursula von der Leyen a souligné que "l’hydrogène peut changer la donne". Et d’annoncer "la création d’une banque européenne de l’hydrogène pour garantir les achats, en utilisant notamment les ressources du fonds pour l’innovation".

 

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