Tranquillité publique - La police municipale peut-elle interpeller un individu en état d'ivresse ?
Interrogé par un député, le ministre de l'Intérieur rappelle qu'en principe les agents de police municipale ne sont chargés, sauf texte spécial, que de missions préventives. En conséquence, il ne leur appartient pas de réprimer les infractions pénales et ne sont pas habilités à constater par procès verbal la contravention de seconde classe prévue par l'article R.3353-1 du Code de la santé publique réprimant le fait de "se trouver en état d'ivresse dans les rues, chemins, places, cafés, cabarets ou autres lieux publics". En revanche, il leur appartient de faire application de l'article L.3341-1 du même Code qui prévoit que, de manière générale, "une personne trouvée en état d'ivresse dans les rues, chemins, places, cafés, cabarets ou autres lieux publics est, par mesure de police, conduite à ses frais, au poste le plus voisin ou dans une chambre de sûreté, pour y être retenue jusqu'à ce qu'elle ait recouvré la raison".
L'application des règles du droit administratif donne lieu à cet égard à des distinctions particulièrement fines, pour ne pas dire byzantines : les agents de police municipale pourront en effet "amener au poste" un individu ivre "pour des motifs relevant de la police municipale" : le Conseil d'Etat a validé une telle action pour un individu "gisant dans sa voiture qui stationnait sur la voie publique" (CE, 25 octobre 1968, Dame Veuve Bille). Ainsi, lorsqu'elle est mise en oeuvre pour des motifs relevant de la police municipale (commodité du passage, tranquillité publique, maintien du bon ordre, etc.) et non pour la seule répression de l'ivresse proprement dite, la conduite au poste de police d'une personne en état d'ébriété s'effectue sous l'autorité du maire et sous la responsabilité administrative de la commune où l'individu a été trouvé.
En dehors des atteintes à l'ordre public municipal, les policiers municipaux ne pourront intervenir qu'en cas "d'extrême urgence" notamment dans le cadre de l'assistance à personne en danger. Ils seront ainsi amenés à solliciter l'intervention d'un médecin ou à conduire de force la personne auprès de ce dernier. On doit toutefois se trouver en présence d'un état de la personne indiquant qu'il existe un grave danger pour sa vie.
Toutefois, dans tous les cas, c'est bien au poste de police d'Etat, et non de police municipale que les policiers municipaux devront ramener l'individu afin qu'il recouvre la raison et qu'un procès verbal d'infraction puisse être dressé.
Le ministre indique à cet égard qu'il convient que la convention de coordination entre la police municipale et la police ou la gendarmerie nationale fasse état de cette circonstance.
Julien Bouteiller / avocat au barreau de Marseille