Emploi - La formation, talon d'Achille des emplois d'avenir
La formation reste le point faible des emplois d'avenir, d'après une étude de l'Institut Schwartz publiée le 5 février 2015. C'était pourtant le principal apport avancé lors du lancement de ce nouveau contrat aidé. L'étude qualitative, qui a été réalisée auprès de six territoires (ceux des missions locales du Pays salonais, de Nord Essonne, de l'agglomération de Montpellier, de l'arrondissement d'Aurillac, du Poitou et des Hautes-Pyrénées), entre novembre 2013 et juin 2014, met ainsi en avant les difficultés dans la mise en oeuvre de la formation. Premier point : la temporalité des formations, qui pose problème. De ce côté, les formations régionales ne semblent pas faire l'unanimité. "On fait très peu appel aux formations régions, qui sont trop contraignantes, détaille un conseiller mission locale interrogé dans le cadre de l'étude, faire partir un jeune neuf mois en formation, ce n'est pas possible pour tous les employeurs." L'étude met en avant les réticences des employeurs, et notamment les plus petits, à laisser partir les jeunes en formation… L'adéquation des formations aux besoins des jeunes est aussi en question. Les formations du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), mobilisées par les collectivités locales pour des formations courtes, ne sont ainsi pas toujours adaptées. "Au CNFPT, il y a pas trop de formations dans le bâtiment", explique ainsi un peintre en emploi d'avenir. Autres freins : les difficultés liées au financement, notamment pour les structures du secteur non marchand. "Si quelques employeurs peuvent financer une formation sur leurs fonds propres, d'autres en sont incapables", signale l'étude, qui précise aussi que "la difficulté pour beaucoup réside dans la mise en place de formations de façon isolée ; la formation en emploi d'avenir est conçue de telle sorte à produire du 'sur mesure' pour le jeune, ce qui nécessite un cheminement particulier avec lui et du temps". Pour améliorer cet aspect, l'Institut Schwartz propose de mettre en place des formations mutualisées. La mission locale de Martigues Côte Bleue a ainsi initié une action de formation spécifique dans le domaine de l'animation sportive en lien avec une autre mission locale, celle du Pays salonais.
Un intérêt fort pour les emplois d'avenir
Mais globalement, malgré ces difficultés, sur tous les territoires étudiés à mi 2014, la majorité des jeunes en emplois d'avenir avaient entamé ou allaient entamer une formation. Et la satisfaction des employeurs comme des bénéficiaires des emplois d'avenir est assez élevée. "La grande majorité des personnes interrogées soulignent l'intérêt des emplois d'avenir pour les jeunes en difficulté d'insertion professionnelle", indique le rapport, précisant que le dispositif est avant tout considéré comme un moyen de lutter contre le chômage des jeunes et en particulier celui des moins qualifiés. Dans ces territoires, le développement du dispositif a contribué à la légère diminution du chômage des jeunes (baisse de 1,3% dans l'Hérault en mars 2014 par exemple).
Les employeurs, et parmi eux de nombreuses collectivités territoriales, voient le dispositif comme une opportunité pour répondre à leur problématique de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) et anticiper sur des futurs départs à la retraite. Certains employeurs ont même utilisé les emplois d'avenir pour créer de nouveaux emplois, parfois "expérimentaux" ou "d'insertion". "Ce sont des petites associations, des petites communes rurales ou des artisans qui n'auraient pas recruté sans le dispositif et sans l'appui de la mission locale en matière de ressources humaines et d'accompagnement conjoint des jeunes", précise l'étude.
Les critères d'éligibilité au dispositif sont jugés pertinents par la majorité des acteurs, même s'ils suscitent parfois des frustrations et incompréhensions.
Les effets d'aubaine ont été relativement minoritaires et se retrouvent surtout dans le secteur marchand (dans la vente, restauration, ou dans le bâtiment).
Le dispositif ne touche pas les plus éloignés de l'emploi
Côté jeunes, les atouts du dispositif sont nombreux. "Pour un certain nombre de jeunes, qui connaissent des difficultés d'insertion professionnelle en raison de leur faible niveau de qualification ou de leur parcours professionnel, l'emploi d'avenir a constitué une opportunité d'entrée en emploi stable et d'acquisition d'une plus grande autonomie", signale le document. D'autres y voient l'occasion d'obtenir un contrat de longue durée et de se stabiliser dans le secteur d'activité choisi. Enfin, pour une troisième catégorie de jeunes, l'emploi d'avenir est l'occasion d'approfondir ou de concrétiser un projet de reconversion professionnelle (intérêt nouveau pour un secteur d'activité ou un métier). Reste que le dispositif touche les jeunes les moins qualifiés mais pas les plus éloignés de l'emploi : ils "apparaissent difficilement accessibles aux plus jeunes, ceux de la tranche des 16-20 ans qui, disposant de peu d'expériences professionnelles et de moins d'autonomie, se heurtent à la concurrence de leurs aînés", précise l'étude-action.
Au total, sur les 187.000 emplois d'avenir créés, 78,8% l'ont été dans le secteur marchand et plus d'un tiers dans le secteur associatif. La durée des contrats (un peu plus de la moitié sont des contrats de trois ans et plus), les temps de travail (91% sont conclus pour une durée hebdomadaire de 35 heures) et les salaires associés permettent aux jeunes d'accéder à l'autonomie et à l'indépendance (passer son permis, accéder à un logement…). Pour 57% des jeunes, il s'agit de leur premier emploi stable.
Les collectivités territoriales et les associations sont les employeurs les plus importants avec respectivement 27,5% et 33,3% des embauches. Parmi les secteurs d'activités concernés, le secteur public (administration publique, défense, sécurité sociale) arrive logiquement en tête avec 29,3% des emplois, suivi du secteur médicosocial avec 20,7% des emplois.