Finances publiques - La dotation globale de fonctionnement sera bien gelée sur 2018
Ce n'est pas une annonce, mais ça va mieux en le (re)disant. "Pour 2018, je vous le confirme officiellement, je n'ai pas souhaité procéder à une baisse brutale des dotations qui s'inscrive dans la droite ligne de 2017. Les crédits d'aménagement du territoire, de politique de la ville et l'ensemble des dotations aux collectivités seront maintenus. C'est un engagement pris, il sera respecté", a confirmé Emmanuel Macron ce mardi 5 septembre lors d'un discours prononcé devant les préfets.
"Cet engagement oblige, puisque j'ai demandé aux collectivités territoriales de faire des économies de fonctionnement", a rappelé le président de la République, poursuivant : "J'ai demandé aux collectivités de faire des efforts, j'ai donné des objectifs, il faut qu'ils soient tenus."
Il a en outre indiqué que les préfets auront "un rôle nouveau" dans l'application "du pacte financier entre l'Etat et les territoires" : "Pour 300 collectivités représentant 80% des dépenses locales, ce suivi se fera dans le cadre de contrats financiers que vous serez chargés de préparer."
Plus tôt dans la matinée, Christophe Castaner, le porte-parole du gouvernement, avait lui aussi réaffirmé sur les ondes de France Inter qu'il s'y aura "pas de baisse de la dotation globale de fonctionnement des collectivités locales dans le budget 2018". Se référant aux propos tenus par Emmanuel Macron encore candidat à la présidentielle, en mars dernier lors de son grand oral devant les maires, Christophe Castaner a rappelé la volonté présidentielle de "transférer de la dépense de fonctionnement vers de la dépense d'investissement", ce qui fera l'objet d'un "contrat" avec les collectivités". "Nous ne baisserons pas les dotations aux collectivités locales parce qu'on veut faire un choc massif d'investissement. La contractualisation n'a pas encore été faite, on veut prendre le temps de discuter avec l'ensemble des collectivités", a poursuivi le porte-parole avant de revenir au point de départ : "Plutôt qu'abaisser brutalement, on gèle la DGF."
Il s'agissait donc de réexpliquer que les 13 milliards d'euros d'effort qui seront demandés aux collectivités correspondent bien à 13 milliards d'économies que celles-ci devront trouver sur leurs dépenses de fonctionnement, et non pas, comme semblaient le croire ses interviewers, à 13 milliards de baisses de recettes.
On sait par ailleurs, comme l'indiquait Localtis le 31 août, que l'une des hypothèses sur lesquelles le gouvernement travaillerait actuellement consisterait à calculer ces 13 milliards d'économies non pas par rapport aux dépenses de 2017 mais par rapport aux prévisions de dépenses de fonctionnement estimées pour 2022, sur la base d'une croissance annuelle "naturelle" de ces dépenses de 1,1% ou 1,2%. Ce qui réduirait considérablement l'ampleur de l'effort.
Ni Christophe Castaner ni Emmanuel Macron ne se sont en revanche prononcés sur les intentions en matière de dotations au-delà de 2018. Le projet de loi de programmation pluriannuelle des finances publiques pourrait être à ce titre être instructif.
Sanctuarisation des crédits dédiés aux contrats de ville
Le fait qu'Emmanuel Macron, dans son allocution aux préfets, ait mentionné un maintien des crédits politique de la ville en 2018 n'est pas neutre, quelques semaine après que les acteurs locaux ont pris connaissance de l'annulation pour cette année de 130,4 millions d'euros d'autorisations d'engagement et de 46,5 millions d'euros de crédits de paiement initialement affectés à cette politique. La veille, jour de la rentrée scolaire, Jacques Mézard avait assuré à Sarcelles que "la réussite des quartiers prioritaires et de leurs habitants est une priorité absolue du gouvernement" et que cela se traduira par "la sanctuarisation des crédits dédiés aux contrats de ville et aux programmes de réussite éducative en 2018". Le ministre de la Cohésion des territoires avait également confirmé la promesse de "doublement des crédits accordés au nouveau programme de renouvellement urbain" (voir notre article du 6 juillet 2017 Face aux besoins criants, le gouvernement s'engage à porter à 10 milliards les subventions Anru 2 ), précisant que "l’Etat accompagnera à hauteur d’un milliard d’euros".
Une précision qui ne dit pas où le gouvernement va trouver les 4 autres milliards promis pour atteindre les 10 milliards. Action Logement qui finance aujourd'hui 93% des 5 milliards du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) a bien fait savoir qu'elle ne pourrait pas faire beaucoup plus. Une précision qui ne dit pas non plus si ce milliard d'euros de l'Etat est celui déjà promis par François Hollande il y a un an (voir notre article du 31 octobre 2016 Anru 2 : François Hollande annonce un milliard d'euros supplémentaires pris sur le budget de l'Etat).
APL : l'appel aux bailleurs de baisser les loyers de 5 euros
Au sujet de la baisse des APL décidée par le gouvernement pour fin 2017, le président de la République a lancé, devant les préfets, un appel pour le moins surprenant. "J’appelle publiquement tous les propriétaires à baisser les loyers de 5 euros par mois", aurait-il déclaré, se disant "surpris du silence collectif" et de l’absence d’appel "aux bailleurs sociaux, aux propriétaires, à baisser le prix du logement". "C’est cela, la responsabilité collective", a-t-il estimé.
Une perspective fraîchement accueillie par l'observatoire Clameur (acronyme pour "Connaître les loyer et analyser les marchés sur les espaces urbains et ruraux), organisation qui regroupe une trentaine d'adhérents acteurs de l'immobilier du logement privé (Foncia, Nexity, Groupe SNI, Century 21, SeLoger.com...) représentant 18,1% de l'ensemble du marché locatif privé. Hasard de calendrier, Clameur présentait, comme il le fait chaque année à la rentrée, la situation des loyers de marché à fin août. Et comme chaque année il s'inquiète de "la faible progression voire le recul des loyers de marché". "Dans 64,1% des villes de plus de 100.000 habitants, les loyers baissent depuis le début de l’année 2017", estime Clameur, soit dans 12 villes, telles que Rennes (-3,6%, la plus forte baisse), Le Havre (-3,5%), Marseille (-2,6%), Bordeaux (-0,8%), Paris (-0,6%), Nantes (-0,5%)... Et les loyers progressent moins vite que l’inflation dans 25,6 % autres grandes villes, soit dans six villes : Lille, Montpellier, Nice, Strasbourg, Toulouse, Dijon. Ils ont en revanche augmenté à Lyon (+2,1%) et à Nîmes (+2,0%).