La conférence nationale sur l’eau se tiendra mi-décembre

Au Sénat, la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, a indiqué ce 12 novembre que la conférence nationale sur l’eau annoncée par le Premier ministre pourrait se tenir le 16 décembre prochain, avant d’être déclinée à l’échelle de chaque bassin lors du premier semestre 2025. À ce stade, il semble que ces travaux ne devraient pas se traduire par une nouvelle loi sur l’eau, pourtant souhaitée par plusieurs parlementaires, mais par de simples ajustements.

La conférence nationale sur l’eau annoncée par le Premier ministre lors de son déclaration de politique générale devrait se tenir mi-décembre, a indiqué Agnès Pannier-Runacher ce 12 novembre lors d’un débat sur la gestion de l’eau au Sénat organisé à la demande du groupe Les Républicains (LR). "Notre objectif est de la lancer pour les 60 ans de la loi sur l’eau, le 16 décembre", a-t-elle précisé, ajoutant qu'il ne s'agissait pas de "refaire (...) une grande conférence centralisée, des nouvelles assises de l’eau ou un nouveau Varenne de l’eau, mais de décliner au niveau de chaque bassin, dans le cadre d’une gouvernance ouverte en s’appuyant sur la gouvernance des agences de bassin, les grands enjeux de la gestion de l’eau". Et de citer pour exemple "la tarification, la gestion de la quantité, la gouvernance…", auxquelles "d’autres thématiques spécifiques pourront être ajoutées à l’initiative de ces territoires", comme la question "de la désalinisation en bordure de littoral". Ces débats territoriaux devraient, eux, se dérouler "à partir du mois de janvier pour s’égrener sur un semestre, avec des livrables au terme du semestre". Cela pourra être "des ajustements de la loi eau", a encore précisé la ministre.

Pas de nouvelle loi sur l'eau en vue, pourtant vivement souhaitée au Sénat

Ce qui signifie sans doute qu’il n’y aura pas de "nouvelle loi sur l’eau" souhaitée par la sénatrice Cécile Cukierman (CRCE-K, Loire), de "LMA 2, modernisée et ambitieuse, avec un effort de simplification" (en référence à la loi sur l’eau et les milieux aquatiques de 2016) qu’appelle de ses vœux le sénateur Rémy Pointereau (Cher, LR). Pour ce dernier, cette dernière est pourtant d’autant plus nécessaire que "la politique de l’eau est devenue illisible et complexe". Il dénonce "un véritable labyrinthe crétois pour identifier l’acteur qui prend réellement les décisions", "une organisation complexe et chronophage, devenue technocratique (…) avec une pléthore d’acteurs qui n’aide pas toujours à la compréhension du fonctionnement des agences de l’eau", qui "sème le doute sur la capacité des élus, des collectivités ou des chambres consulaires à gérer la politique de l’eau et remet en question leur légitimité". Et de dénoncer en particulier "les agences de l’eau, qui s’appliquent à imposer une réglementation technocratique et à financer davantage une multitude d’études parfois inutiles".

Dans les pas de Christophe Béchu

"J’inscris mes pas dans ceux de mon prédécesseur, Christophe Béchu", a indiqué la ministre, faisant du plan Eau lancé par ce dernier sa boussole, sans "réduction de son ambition". Un plan dont elle entend "matérialiser les avancées mois par mois, semestre par semestre", sur "cinq chantiers" :
• la protection de l’eau potable, rappelant qu’"un tiers [des captages] ont été abandonnés ces 40 dernières années pour des raisons de qualité de l’eau", ou encore que "certaines agglomérations, de plusieurs centaines de milliers de personnes, tiennent sur un seul captage". Agnès Pannier-Runacher indique que trois éléments sont attendus : "un arrêté de définition des captages sensibles ; un guide à destination des préfets [qui disposent déjà d’une circulaire] (…) et des outils financiers d’accompagnement de changement des pratiques". Au passage, elle a rappelé que "notre objectif sur les PTGE (plans territoriaux de gestion de l’eau), qui s’articulent avec les PGSSE (voir notre article du 11 janvier 2023), c’est-à-dire le pendant sécurité sanitaire de l’eau, c’est de couvrir tout le territoire français". Non sans indiquer que "l’étude Explore 2" récemment publiée "matérialise le mur d’investissement à réaliser pour traiter les métabolites dans l’eau brute". "Derrière la non-protection des captages, c’est beaucoup de dépenses pour les collectivités", appuie le sénateur écologiste de Loire-Atlantique Ronan Dantec, invitant le gouvernement à soutenir la proposition de loi tout juste déposée en la matière par le député Jean-Claude Raux ; 
• la mise en œuvre du plan d’action pour l’eau et l’assainissement dans les territoires ultramarins, une "absolue priorité", la ministre précisant que l’eau sera "l’un des enjeux du prochain comité interministériel d’outre-mer" ;
• la gestion quantitative de la ressource en eau, avec des travaux qu’elle juge "clairement enrichis" par la mission d’information sénatoriale Pointereau-Gillé (voir notre article du 13 juillet 2023), et dont elle rappelle que la stratégie repose "sur la sobriété de l’usage, sur l’optimisation de la disponibilité de la ressource et sur l’amélioration de la gestion des périodes de sécheresse". La ministre met en avant certains progrès, comme le fait que "57% des 170 collectivités considérées aujourd’hui comme des points noirs en matière de fuite d’eau font l’objet d’un accompagnement de la part des agences de l’eau, avec des investissements à la clé. Cela ne veut pas dire que tous les sujets sont réglés pour ces collectivités, mais la trajectoire a été entamée". Elle précise également que, "dans le cadre des PTGE", des "retenues de substitution" – "la terminologie ça permet parfois de mettre du liant entre les acteurs" –, qui "marchent très bien, pourront être construites" : "Il ne faut pas avoir de tabou sur des infrastructures qui nous permettent d’augmenter notre niveau de résilience sur l’eau", a-t-elle ajouté, en déplorant "certains hiatus dans nos réglementations qui fait qu’on peut dans certains cas dire blanc et noir sur le même sujet". Une solution préconisée d’emblée par le sénateur Jean Sol (LR), pour qui "il n’est pas tenable de faire reposer l’essentiel de la stratégie eau des Pyrénées-Orientales sur des efforts d’économie", en évoquant "le risque d’abandonner des pans entiers du territoire qui sera rendu à la garrigue ou à la forêt dans un secteur à fort risque d’incendie" ;
• le bouclage "du financement du plan Eau, à hauteur de 1,95 milliard d’euros", mentionnant notamment "l’enjeu de travailler sur la redevance pour pollution diffuse". Agnès Pannier-Runacher a également évoqué une réforme visant à "faire en sorte que les redevances soient aussi fondées sur la performance des réseaux de l’eau". Ou encore son souhait "d’essayer d’accélérer autant que possible sur la question du plafond mordant des recettes" des agences de l’eau, en insistant sur le fait que les dispositions de l’actuel projet de loi de finances en la matière constituaient "un décalage, et non une remise en question", en soulignant en outre que "ce décalage n’est théoriquement pas un sujet compte tenu des projets qui sont enclenchés pour 2025".
Elle ne s’est en revanche pas prononcé sur la proposition de Mirelle Conte Jaubert (RDSE, Gironde) visant la création d’un "fonds bleu de solidarité pour soutenir la rénovation des réseaux d’eau" qui pourrait être conçu sur "le modèle de l’ancien fonds national pour le développement des adductions d’eau financé en partie par une taxe sur les paris du PMU et par une redevance sur l’eau potable". Ni sur la piste suggérée par le sénateur UC du Doubs, Jean-François Longeot, d’un renchérissement du prix d’une eau qu’il juge aujourd’hui "particulièrement bon marché" ; 
• la conférence sur l’eau précédemment évoquée.

Au Sénat, on ne reste par ailleurs pas inactif puisque Rémy Pointereau a annoncé qu’il lançait, "aux côtés de Jean-Yves Roux (RDSE, Alpes-de-Haute-Provence), une mission d’information spécifique sur la compétence Gemapi".

 

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