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Interview - Jean Dionis portera la parole des maires sur les enjeux des TIC

Fraîchement nommé président de la Commission TIC de l'Association des maires de France (AMF), Jean Dionis du Séjour, connaît bien les principales attentes des élus locaux face aux enjeux du numérique, que ce soit en termes de fonctionnement de chaque mairie ou d'accès des citoyens aux potentialités de l'internet.

Jean Dionis du Séjour, député-maire d'Agen, a été désigné, le 10 décembre dernier président de la Commission TIC de l'Association des maires de France (AMF), suite aux élections pour le renouvellement du bureau organisées lors du Congrès de fin novembre. Ingénieur en système d'information à la Caisse des Dépôts, il a participé, dès 1998, à la création du premier quotidien en ligne pour les collectivités locales, à l'origine de Localtis.info. Secrétaire national en charge des nouvelles technologies du Nouveau Centre, membre de la commission supérieure du service public des postes et communications électroniques, rapporteur de la loi pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN), Jean Dionis du Séjour évoque ses principaux objectifs au moment de prendre ses nouvelles fonctions.

Localtis - Quelles sont les priorités que vous souhaitez défendre sous votre présidence de la commission TIC de l'AMF ?

Jean Dionis du Séjour  : Nous pouvons distinguer deux approches : d'une part, la mairie entreprise, en tant qu'employeur, et, d'autre part, la ville en tant que communauté humaine. Pour ce qui est de la mairie employeur, la priorité, dans cette époque dominée par les difficultés financières qui touchent également les collectivités, devrait concerner tous les chantiers qui amélioreront la productivité. De toute évidence, le premier d'entre eux est de mieux répondre aux demandes des citoyens : traitement interne du courrier, réponse aux appels téléphoniques, interface entre les demandes et l'organisation des services... Pour ce qui concerne la ville en tant que communauté humaine, il est nécessaire de poursuivre le travail engagé sur les deux fronts de la fracture numérique. A la fois sur son versant générationnel : comment embarquer tout le monde et notamment les 65-70 ans dans la société de l'information ? Nos seniors sont très demandeurs d'accompagnement. Et à la fois combattre ce qui reste de la fracture sociale. Celle-ci a bien reculé grâce au déploiement des espaces publics numériques (EPN) initiés par les collectivités mais aussi grâce aux efforts d'équipement consentis notamment par les familles modestes pour leurs enfants. Il faut désormais aborder différemment le déploiement des EPN, favoriser la recherche de connexions internet à moindre coût et l'acquisition d'ordinateurs portables pas chers. Les collectivités locales auront à soutenir ces démarches en amont. Enfin, la dernière priorité touche au développement du Web 2.0 : je crois notamment au développement de la vidéo sur le Net et des Web TV.

Agen est l'une des 14 villes labellisées 5 arobases par Villes Internet en 2008. Quels axes stratégiques mettez-vous en œuvre actuellement dans votre commune ?

Agen a gagné ses 5 arobases parce qu'elle s'est engagée plus tôt que les autres villes sur le sujet de l'internet citoyen. Dès les années 1997 et 2001, nous avons informatisé les écoles,  déployé des EPN dans les bibliothèques ou les quartiers sensibles, et mis en ligne un site internet fort, de type portail de ville. Nous avons aussi un plan seniors "branchés" en lien avec les clubs de personnes âgées. Nous allons poursuivre sur ces axes et travailler davantage sur la "mairie employeur". Au niveau de l'interface entre la mairie et la demande des citoyens, il nous faut réagir avec des délais plus courts et au meilleur coût. Nous voulons aussi aller vers une meilleure couverture internet de la population en favorisant des solutions telles que le Wi-Fi. Nous allons déployer un site internet 2.0, très interactif et participatif, avec des blogs, la possibilité de laisser des commentaires... Nous voulons, enfin, développer massivement la vidéo qui devrait aboutir au lancement prochain d'une Web TV à Agen.

Au niveau national, plusieurs collectivités, sous la houlette de l'ARF et de l'Avicca, interpellent l'Etat sur un "New deal" numérique pour le déploiement de la fibre optique en France. Comment vous situez-vous par rapport à cette démarche ?

Cette interpellation est très forte. Nous ne franchirons une nouvelle étape de la société de l'information que si les débits atteignent 50 à 100 Mbits/s. Et pour le moment, la logique de concurrence commerciale n'apporte ces débits que dans les grandes villes. Il faut donc une politique publique sur ce domaine et les collectivités doivent se sentir soutenues. Il faut un financement public et, surtout, une mobilisation de tous les acteurs : Etat, opérateurs et collectivités. Actuellement, le gouvernement serait donc mieux inspiré de soutenir l'investissement dans le cadre du plan France numérique 2012 plutôt que d'imposer une nouvelle taxe de 0,9% sur le chiffre d'affaires des opérateurs de communications électroniques pour remplacer l'argent de la publicité dans l'audiovisuel public. Au nom de l'AMF, je n'aurai de cesse de dire qu'il faut mobiliser les acteurs pour la couverture haut et très haut débit du territoire. Dans l'agglomération d'Agen, nous pensons d'ailleurs développer l'accès social à internet au sein de nos HLM durant la présente mandature.

Lors de son intervention au Congrès des maires, Eric Woerth a évoqué les nouveaux services électroniques qui seront offerts courant 2009 aux collectivités par les services de la direction générale des Finances publiques : dématérialisation complète et gratuite de la chaîne budgétaire et comptable, simplification des démarches des usagers pour le paiement des produits locaux - crèches, cantines, etc. - par carte bancaire sur internet. Qu'en pensez-vous ?

Au sein de l'AMF, nous serons partie prenante de ces évolutions. Mais nous les examinerons attentivement et à chaque fois dans une logique de gain de productivité pour la mairie. Si c'est intéressant pour la collectivité, nous nous y engagerons. Si cela n'améliore pas la gestion des systèmes d'information de la ville, nous ne suivrons pas. Et nous ne nous satisferons pas simplement d'effets d'annonce.

Propos recueillis par Luc Derriano / EVS

 

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