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E-démocratie - Internet est-il un outil de concertation dans les collectivités ? se demande l'Amif

Internet est-il un moyen de renforcer la démocratie participative ? L'Association des maires d'Ile-de-France (Amif), en partenariat avec l'agence numérique Artesi Ile-de-France, a organisé un débat sur cette question dans le cadre de ses assises, le 4 avril au Parc Floral de Paris. Sylvie Mercier, adjointe au maire de Joinville-le-Pont, présidente de la commission TIC de l'Amif, et Yannick Landais, délégué général d'Artesi ont conduit les discussions autour du thème "le rôle de la concertation citoyenne à l'élaboration de projets de territoire". "Dans le cadre de la consultation pour l'autoroute A4/A86, nous avons constaté qu'il était intéressant qu'il y ait un tiers garant indépendant pour animer le débat", a témoigné Jean-Pierre Tiffon de la Commission nationale du débat public. Le site lancé pour cette concertation a reçu plus de 23.000 connexions en six semaines et plusieurs milliers de dossiers ont été téléchargés sur le web de la direction régionale de l'équipement (DRE). Mais internet est un outil qui ne remplace pas les réunions. "La concertation, c'est aussi de remettre de la confiance entre citoyens et institutions. Et la confiance c'est les yeux dans les yeux. Il faut donc mener de front la consultation sur internet et les réunions sur le terrain." Florence Durand, déléguée générale Villes Internet, a détaillé les avantages d'internet, complémentaire des réunions "en présentiel" : "l'exposition et le repérage de l'information textuelle mais aussi audio et visuelle ; la cartographie des acteurs en présence ; l'organisation du dissensus, car il faut gérer les différents points de vue ; la mémoire du débat et enfin le suivi de la réponse". Pour Philippe Bouyssou 1er maire adjoint de la ville d'Ivry, il s'agit également de volonté politique. "A Ivry, l'accessibilité du net dans les écoles et les espaces publics numériques ainsi que la mise en ligne de l'intranet pour habituer les services de la mairie à actualiser leurs contenus ont été un préalable au lancement de notre site internet et de ses forums", a-t-il expliqué. "A Issy, nous avons une longue expérience d'expériences : conseil de jeunes, de quartier, budget participatif, conseil municipal interactif, panels de citoyens...", a plaisanté Eric Legale, directeur de la Sem Issy média. "Mais les consultations restent compliquées : tous les citoyens participent-ils réellement ? A-t-on seulement affaire à des lobbies ? Le citoyens s'intéresse surtout à son immeuble, son trottoir, plus rarement à son quartier et encore moins à sa ville ! De plus la municipalité qui organise la consultation est toujours soupçonnée de vouloir en biaiser le résultat. Nous avons donc mis en place un panel de citoyens en ligne avec Opinionway, un tiers garantissant la neutralité."

Démocratiser le numérique et prendre le temps

"On nous oppose toujours que la concertation prend du temps et que ça coûte cher", a indiqué Eric Guerquin, président de l'UFC Que Choisir Ile-de-France, membre du conseil économique et social de la région. "Si la concertation prend du temps, son absence peut provoquer l'enterrement des projets, notamment par le biais de recours juridiques", reconnaît Jean-Pierre Tiffon. "En outre, le temps de la prise de décision après la concertation peut être long, poursuit-il. Il reste ensuite à organiser la synthèse  en retenant un argument valable pour une voix et non pas un homme égale une voix, comme dans la démocratie élective." "Concerter le citoyen, ce n'est pas forcément répondre en temps réel", reprend Eric Legale. "En réalité, nous ne pouvons pas faire comme si nous avions le choix : ne pas être présent sur internet, c'est ne pas exister", reconnaît la représentante de la mission de la démocratie participative du conseil général du Val-de-Marne. "Comment les citoyens peuvent-ils se repérer dans les différents niveaux de gouvernance en France : Etat, régions, départements, intercommunalités, villes ? Nous gardons encore en tête le mythe du décideur unique, du ministre ou de l'élu qui va trancher seul. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas, les différents niveaux de territoires interagissent. Tous les projets d'importance sont multidécideurs et multifinanceurs !", a conclu  Jean-Pierre Tiffon. Raison de plus pour ne pas négliger les outils techniques désormais à la disposition des élus et collectivités.


Luc Derriano / EVS