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Installations classées : la feuille de route de la police environnementale pour 2021 est tracée

Le détail des actions programmées pour 2021 dans le cadre du contrôle exercé auprès des établissements industriels et agricoles qu’exerce l’inspection des installations classées (ICPE) a été dévoilé dans une instruction fin décembre.

Le ministère de la Transition écologique a rendu publique, le 23 décembre dernier, via une instruction, ses priorités d’action pour l’année 2021 pour l’inspection des installations classées. Une feuille de route dictée en grande partie par l’accident de l'usine Lubrizol à Rouen et plus récemment par la tragique explosion dans le port de Beyrouth due au stockage inapproprié d’ammonitrates. 
Au titre des missions pérennes, l’année 2021 sera celle de la migration vers le nouveau système d’information des installations classées, après l’ouverture fin 2020 de la téléprocédure pour toutes les demandes d’autorisation environnementale. "Le temps administratif ainsi gagné pourra être redéployé pour traiter des dossiers à forts enjeux environnementaux et pour augmenter le nombre de contrôles sur le terrain", fait valoir l’instruction, tout en soulignant l’effort important de hausse de présence sur le terrain "de +50% entre 2018 et 2022" (ce qui correspond à un passage de 18.000 à 25.000 contrôles). Concrètement, les départements seront augmentés "de 30 inspecteurs dès l’année 2021, puis à nouveau de 20 inspecteurs en 2022".

Retours d’expérience d’accidents industriels

Dans le domaine agricole ou industriel, certaines thématiques feront l'objet "d'un engagement plus spécifique" pour  2021, en raison de retours d'expérience d'incidents ou de pollutions chroniques observées, de nouvelles exigences réglementaires ou simplement de suggestions des services déconcentrés. On y retrouve donc la poursuite du plan d’action post-Lubrizol, à travers l’inspection de toutes les installations classées implantées à moins de 100 mètres des sites Seveso "pour identifier d’éventuelles installations sensibles implantées à proximité des limites de sites présentant des risques d’effets dominos". "Pour l’année 2021, la volumétrie de l’action sera de la moitié de ce qui reste à faire après les travaux déjà réalisés en 2020 (repérage et réalisation des actions pilote)", précise l’instruction.
Des inspections relatives aux stockages d’ammonitrates seront également réalisées dans les installations dans l’emprise ou à proximité des ports maritimes et fluviaux, et dans des coopératives agricoles. Un écho direct à la spectaculaire explosion survenue dans le port de Beyrouth en août dernier.
Un autre focus concerne la biodiversité dans les parcs éoliens, et particulièrement ceux soumis à autorisation pour lesquels ont été prescrites des mesures de réduction et de compensation (dite ERC), et, "dans la mesure du possible", ceux qui ont fait l’objet d’un suivi environnemental par l’exploitant (sur la mortalité des oiseaux ou des chauves-souris) selon le protocole établi.

Actions à la carte

D’autres actions sont "au choix", afin d’adapter le mode d’action "au profil de chaque région". Pour prévenir les chutes de pales, des inspections ciblées seront par exemple organisées "sur un total d’au moins deux parcs par département dans la région". Un nombre de visites "au moins égal à trois fois le nombre de départements de la région" est également attendu par région pour contenir les risques de pollutions diverses liées aux méthaniseurs (déversement accidentel concomitant aux évènements pluvieux à forte intensité, risques explosifs inhérents au stockage du biogaz, etc.). Pour les terres excavées, l'objectif fixé est "une volumétrie globale de deux inspections par département de la région".
Sur le volet air, l’accent est mis sur les émissions de particules dans les grosses industries et les combustions de biomasse. Sachant que depuis le 1er janvier 2021, l’indice Atmo de qualité de l’air intégre les particules "PM 2,5", et devrait mécaniquement se traduire par des jours où la qualité de l’air sera présentée comme très dégradée du fait des particules (lire notre article du 5 janvier 2021). Comme les années précédentes, il est également demandé à chaque région de mettre en place, sur tout ou partie du territoire, une action locale dont le choix devra être finalisé avant "janvier 2021", et dont un bilan sera adressé à la direction générale de la prévention des risques l’année suivante. 

Renforcer la culture du risque

Une mission sur la culture du risque, dont les conclusions sont attendues  pour 2021, devrait contribuer à l’effort de transparence promis par le gouvernement (lire notre encadré ci-dessous). Sans attendre le résultat de cette mission, le ministère a décidé de mieux rendre compte de l'action de l'inspection des installations classées en rendant systématiquement publics les résultats de ses contrôles d'ici 2022 : points de contrôle, liste des non-conformités et suites administratives apportées. Dès 2021, un dispositif de "vigilance renforcée" sera par ailleurs déployé pour certains sites, objet d’incidents, d’accidents réguliers ou de non-conformités récurrentes. La présentation en avait été faite en septembre par Barbara Pompili pour le premier anniversaire de l'incendie de Lubrizol (lire notre article du 24 septembre 2020). Un plan d’actions spécifique sera demandé aux exploitants et fera l’objet de contrôles supplémentaires.  

 
Référence : instruction du gouvernement du 15 décembre 2020 relative aux actions nationales de l’inspection des installations classées pour l’année 2021.


 

Lancement d’une mission de "modernisation de la culture du risque en France"

Une mission de "modernisation de la culture du risque en France", tournée vers le grand public, a été lancée ce 21 décembre par la ministre de la Transition écologique. "Plusieurs catastrophes naturelles en métropole (inondations dans l’Aude en octobre 2018 , Alpes-Maritimes en octobre 2020 ) ou dans nos territoires ultra-marins (tempête Irma en août 2017) illustrent la réalité et la violence des aléas climatiques dans un contexte où le dérèglement climatique va vraisemblablement accroître leur répétition et leur intensité, a souligné le ministère dans un communiqué. Par ailleurs, lors de l’incendie des sites de Lubrizol et de Normandie Logistique le 26 septembre 2019 à Rouen, de nombreux habitants ont fait part de leur sentiment de ne pas avoir été assez informés sur les risques associés aux activités industrielles. Les travaux menés à la suite de cet accident (en particulier la commission d’enquête du Sénat et la mission d’information de l’Assemblée nationale) ont conclu à la nécessité d’élargir les démarches de participation pour aller vers plus d’implication des populations et de moderniser les dispositifs d’information et d’acculturation du public aux risques industriels."
"Des obligations réglementaires et des initiatives portées collectivement par les industriels, les associations, les collectivités et l’État concourent aujourd’hui à construire une culture du risque au sein de chaque territoire, ajoute le ministère. Néanmoins, certains de ces outils ont été mis en place il y a plus de quarante ans. Si de nombreux dispositifs visent à informer régulièrement les citoyens et les entreprises, malgré tout, chaque événement marquant, qu’il soit d’origine naturelle ou technologique, rappelle que leur portée réelle est encore trop limitée. Trop de décès sont encore constatés à chaque catastrophe naturelle, décès qui auraient parfois pu être évités en adoptant les bons gestes."
Présidée par Fred Courant , ancien rédacteur en chef et présentateur de l'émission scientifique "C'est pas sorcier" et fondateur de la plateforme numérique "L’Esprit sorcier", la mission de "modernisation de la culture du risque", composée d’un comité d’experts spécialisés en communication, sciences comportementales, digital et gestion de crise,  se voit donc assigner un triple objectif. Elle devra ainsi "sensibiliser le grand public avec pédagogie, pour que le citoyen comprenne le risque, d’où il vient, et quelles en sont les conséquences", "permettre à chacun de développer les bonnes pratiques pour limiter son exposition et lui permettre d’acquérir les bons réflexes en cas de crise" et faire en sorte que chacun participe à la culture du risque "avec des approches participatives, par exemple basées sur des outils numériques".
Anne Lenormand / Localtis
 

 

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