Insertion par le sport dans les quartiers : les propositions du rapport de Karl Olive
Karl Olive, maire de Poissy, a remis aux ministres Roxana Maracineanu (sports) et Nadia Hai (ville) son rapport intitulé "Faire nation par le sport", concluant ainsi la mission qui lui avait été confiée pour "réfléchir à une meilleure articulation des actions publiques en matière d’insertion par le sport" dans les quartiers politique de la ville. Il y formule 24 préconisations, largement basées sur des retours d'expériences locales.
Karl Olive, maire de Poissy, vient de remettre au gouvernement son rapport intitulé "Faire nation par le sport", concluant ainsi la mission qui lui avait été confiée en octobre dernier pour "réfléchir à une meilleure articulation des actions publiques en matière d’insertion par le sport dans les quartiers". En une centaine de jours, cette mission a donné lieu à 120 auditions, la consultation de 41 fédérations sportives, des visites de terrain, un colloque à l'Assemblée… Parmi les auditions, celles d'élus locaux à travers, par exemple, l'association France urbaine, qui avait suite à cela dévoilé quelques-unes des pistes contenues dans ce rapport (voir notre article du 21 janvier). Quelques mesures, enfin, ont été anticipées fin janvier par le gouvernement lui-même puisque dans le cadre du dernier Comité interministériel des villes, il avait été décidé d'en retenir d'emblée trois : "la création de tiers-lieux sportifs en pied d’immeuble avec l’appui des bailleurs, le développement des 'TIG Sport' dans les clubs sportifs et l’expérimentation d’une contractualisation entre les collectivités, l’Éducation nationale et les clubs sportifs" (voir notre article du 31 janvier).
Au final, ce sont 24 préconisations que formule la mission, qu'il s'agisse de mesures nouvelles ou de la généralisation de ce qui se fait déjà çà et là. Les deux ministres qui ont reçu le rapport, Roxana Maracineanu (sports) et Nadia Hai (ville), estiment que quatre d'entre elles pourraient être "rapidement mises en œuvre sur le terrain". Premièrement, accompagner les collectivités volontaires pour ouvrir les équipements sportifs le soir et le weekend dans les quartiers politique de la ville (QPV). Ce que certaines collectivités font déjà. Et ce qui viendrait compléter l'une des dispositions de la proposition de loi sur le sport qui doit être définitivement adoptée ce jeudi 24 février par le Parlement (en prévoyant de faciliter l'accès des associations sportives locales aux équipements scolaires). De même, les deux ministres se redisent favorables au "développement des tiers-lieux sportifs", dans l'esprit du plan "5.000 petits équipements sportifs" (voir nos articles du 15 février et du 3 décembre). Pour ce qui est de la dimension "pied d'immeuble", elles précisent qu'une réflexion sera bientôt lancée avec l'Union sociale pour l'habitat (USH).
Le gouvernement mise par ailleurs sur le cadre des Cités éducatives pour mieux faire du sport un "levier de réussite" et prévoit à ce titre une "boite à outils intégrant la pratique sportive dans le projet éducatif proposé aux élèves" de ces cités. Enfin, s'agissant des professionnels de l’insertion par le sport, on saura qu'un "fonds dédié" doit permettre de "faire émerger des acteurs qualifiés", dans le prolongement d'actions existantes telles que Sésame, dispositif d'accompagnement personnalisé de 3.000 jeunes supplémentaires vers les métiers du sport (budgété dans la dernière loi de finances en lien avec le plan de relance – voir notre article).
Les propositions de Karl Olive ne s'arrêtent pas là. "Les expérimentations en direction des QPV foisonnent dans tous les territoires", souligne l'élu, et c'est à partir de ces initiatives de terrain qu'ont pris forme les 24 préconisations. A partir, aussi, d'un comparatif entre les pratiques sportives en QPV et celles de l'ensemble du territoire national. Ceci afin d'"identifier les freins qui nuisent à une plus grande démocratisation" de la pratique sportive en QPV. Le spectre choisi est large : sport-santé, sport-éducation, sport-citoyenneté, compétition, emploi, famille, loisirs, e-sport… Et n'oublie pas tout ce qui a pu être constaté pendant la crise sanitaire… ni l'approche de Paris 2024.
70% des préconisations "pourraient voir le jour en quelques semaines – et sans cramer la caisse !", assure Karl Olive. Parmi elles, on retiendra notamment l’idée d'un "guichet unique des aides pour un 'zéro reste à charge' des licences des clubs" pour certains publics, via l'Agence nationale du sport au niveau national et via les associations au niveau local.
Sur la base de retour d'expériences locales (est par exemple citée la ville du Lavandou dans le Var), le rapport suggère de généraliser le modèle de "l'Ecole d'initiation aux sports", structure communale offrant aux enfants des activités le mercredi ou le samedi afin de les aider à choisir une discipline sportive qu'ils exerceront ensuite en club.
En plus des tiers-lieux sportifs qui ont retenu l'attention du gouvernement, la mission prône le développement des Maisons sport-santé en QPV, là encore en pied d'immeuble en relation avec les bailleurs, avec insertion dans le Contrat local de santé. Et, sport-santé toujours, il est jugé souhaitable que chaque nouvelle rénovation ou construction de logements sociaux intègre un parcours ou des équipements sportifs.
Sur le volet handicap, il est question de nommer un référent "sport-handicap" dans chaque département, ou encore de former les AESH à la pratique du sport.
Plusieurs propositions sont évidemment liées à ce qui était le cœur de la mission : comment "faire de l'activité sportive dans les QPV le point de départ d'un accès à l'emploi ou d'une insertion professionnelle. Il est ici notamment question de recruter et former des "médiateurs sportifs de proximité" et de pérenniser le dispositif des "coachs d'insertion par le sport".
Autre volet abondamment abordé : le lien entre sport et "construction républicaine des jeunes". Le rapport se réfère alors aux enjeux traités par la loi "séparatismes" et à la dimension sécurité : "systématiser la signature d'une charte de la laïcité et d'un contrat d'engagement républicain" préalablement à toute subvention ou location de salle, identifier un "référent sport-quartier" dans les commissariats, créer un "conseil de dialogue local autour du sport" sur le modèle du contrat local de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD) ou, donc, prévoir des "TIG sport" dans les clubs.
Enfin, Karl Olive plaide pour qu'un maximum de municipalités mettent en place un budget participatif dédié au sport afin de "laisser la parole" aux habitants dans la définition des projets locaux liés au sport.