Indemnisation des catastrophes naturelles : le décret enfin publié
Le décret d’application de la loi réformant le régime des catastrophes naturelles a été publié fin décembre. Il fixe les modalités de motivation, de communication et de contestation des décisions de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, détaille les missions, compositions et fonctionnement des deux commissions instituées auprès du ministère chargé de la sécurité civile, précise les contours de la nouvelle garantie de prise en charge des frais de relogement d’urgence et revoit les règles applicables aux franchises, qui restent toutefois inchangées pour les collectivités.
Annoncé pour septembre 2022, le décret d’application de la loi du 28 décembre 2021 réformant l’indemnisation des catastrophes naturelles (voir notre article du 6 janvier 2022) a été publié le 31 décembre dernier au Journal officiel.
Motivation, conditions de communication et de contestation des décisions
Le texte dispose d’abord que les décisions de reconnaissance (ou de non-reconnaissance) de l’état de catastrophe naturelle répondent aux exigences de motivation prévues par le code des relations entre le public et l’administration et que les documents administratifs qui les ont fondées répondent aux règles encadrant le droit à communication des documents administratifs posées par le même code. Il précise que ces décisions peuvent faire l’objet de recours administratifs ou être constatées devant les juridictions administratives compétentes. Ces modalités de communication, voies et délais de recours doivent être indiquées par l’arrêté interministériel qui mentionne ces décisions.
Composition, missions et fonctionnement des deux commissions
Le décret précise ensuite les missions, composition et modalités de fonctionnement de la commission nationale consultative des catastrophes naturelles d’une part, nouvellement créée, et de la commission interministérielle de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, officialisée – toutes deux placées auprès du ministre chargé de la sécurité civile.
La première vise notamment à "surveiller" – de loin – la seconde, dont l’opacité du fonctionnement était régulièrement dénoncée. Elle a ainsi pour mission de rendre annuellement un avis sur la pertinence des critères retenus pour déterminer la reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle, sur les conditions effectives d’indemnisation des sinistrés et sur les modalités et conditions selon lesquelles les experts intervenant pour évaluer les dommages sont certifiés.
Elle est présidée par l’un des 6 élus "représentant les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, désignés sur proposition de l’Association des maires de France". La désignation de ces élus avait donné lieu à débat, notamment à l’Assemblée. Certains députés (Vincent Ledoux) plaidaient plutôt pour 4 élus locaux et 2 parlementaires (version initialement adoptée, et finalement revue en commission mixte paritaire). D’autres (Marie-Christine Dalloz) pour que "les maires des petites communes soient impérativement représentés", Christine Pires-Beaune suggérant alors que "l’Association des maires ruraux de France désigne les élus". Finalement, seule l’AMF aura la main.
La commission est par ailleurs dotée d’un vice-président, membre du Conseil d’État ou de la Cour des comptes.
Outre 8 représentants de l’État, elle est composée du directeur général de la Caisse centrale de réassurance, de 5 professionnels du secteur de l’assurance, d’1 professionnel du secteur de la réassurance, de 2 représentants d’associations, de 2 représentants des entreprises (dont 1 représentant les PME) et de 2 personnalités qualifiées. L’ensemble des membres seront nommés, pour trois ans, par arrêté conjoint des ministres chargés du budget, de l’économie, de la sécurité civile et de l’outre-mer.
La commission est réunie au moins une fois par et en tant que de besoin sur convocation de son président ou de son vice-président. Lorsqu’elle est consultée sur un projet de loi, de décret ou d'arrêté ministériel, son avis est réputé favorable faute de réponse dans les cinq semaines de sa saisine. Le décret dispose également que le compte-rendu établi par le secrétariat général de chaque réunion de la commission est publié par voie électronique après avoir été approuvé par l'ensemble des membres de la commission (tout membre pouvant demander qu'il soit fait mention de son désaccord avec l'avis rendu).
La seconde commission est chargée d’émettre un avis simple sur chaque demande communale de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle dont elle est saisie par les ministres compétents. Son avis porte sur le caractère naturel et l'intensité anormale du phénomène. Il est rendu – sur la base de rapports d'expertise techniques transmis par les services de l'État – au plus tard deux mois après la saisine du secrétariat de la commission (sauf si elle sollicite des compléments d'expertise). Un délai maximal qui ne paraît guère compatible avec celui de la loi disposant que l’arrêté ministériel "doit être publié au Journal officiel dans un délai de deux mois à compter du dépôt des demandes à la préfecture". La commission émet également un avis simple sur les modalités et les conditions de dépôt et d'instruction des demandes communales de reconnaissance de l'état de catastrophes naturelle.
Elle est composée du directeur du budget, du directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises (qui la préside), du directeur général du Trésor et, le cas échéant, du directeur général des outre-mer (ou leurs représentants). On relèvera que tous sont par ailleurs membres de la commission nationale consultative des catastrophes naturelles.
Conditions de prise en charge des frais de relogement d’urgence
Le décret précise encore les conditions de prise en charge des frais de relogement d’urgence, garantie qui doit être incluse à compter du 1er janvier 2024 dans tout contrat d’assurance couvrant une résidence principale. Donneront lieu à la mise en jeu de cette garantie, d’une durée de 6 mois à compter du premier jour du relogement (durée qui peut être allongée par convention entre les parties), les frais de relogement rendus "strictement nécessaires" par les travaux de réparation des dommages causés par une catastrophe naturelle. L’assuré bénéficiant de cette indemnisation – due sauf exception par l’assureur après transmission des justificatifs – ne peut prétendre cumulativement à une aide financière de l’État couvrant les mêmes dépenses. Il en va notamment ainsi de la prise en charge prévue par le fonds de prévention des risques naturels majeurs des dépenses liées au relogement des personnes exposées ou sinistrées dont la décision d’évacuation a été prise par l’autorité publique compétente pour répondre à la manifestation d’un risque prévisible de mouvements de terrain, ou d'affaissements de terrain dus à une cavité souterraine, d'avalanches, de crues torrentielles ou à montée rapide ou de submersion marine qui menace gravement des vies humaines.
Le décret dispose par ailleurs que les dépenses d'hébergement d'urgence ou de relogement temporaire prévues à l'article L. 2335-15 du code général des collectivités territoriales (dans le cadre du fonds d’aide pour le relogement d’urgence institué de 2006 à 2025) sont exclusives des dépenses prises en charge par ce régime de garantie et que la période maximale de six mois d'hébergement d'urgence ou de relogement temporaire prévue à cet article débute à compter de la date d'effet de l'ordonnance d'expulsion ou de l'ordre d'évacuation des personnes occupant les locaux.
Franchises
Le décret revoit enfin les règles applicables aux franchises, à compter du 1er janvier 2024. Celles applicables aux collectivités territoriales et à leurs groupements restent, elles, inchangées, précise la notice du ministère de l’Economie.
Référence : décret n° 2022-1737 du 30 décembre 2022 relatif à l'indemnisation des catastrophes naturelles, JO du 31 décembre 2022, texte n° 17. |