Immobilier en 2020 : les villes moyennes ont tiré leur épingle du jeu
Le deuxième "Baromètre de l'immobilier des villes moyennes" présenté ce 15 juin par L'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) et le Conseil supérieur du notariat (CSN) apporte des chiffres tangibles pour les villes moyennes - et leurs agglomérations - bénéficiaires du programme Action coeur de ville (ACV). Ces territoires ont mieux résisté que les métropoles au coup d'arrêt de l'activité immobilière d'il y a un an. Certains affichent même des hausses importantes. Mais celles-ci bénéficient plus souvent à la périphérie qu'à la ville-centre.
Parmi les sujets en vogue depuis des mois, celui du déclin de l'attractivité immobilière des métropoles – à commencer par la francilienne – au profit de territoires moins denses et/ou de villes "à taille humaine". Certes, au-delà des sympathiques témoignages de télétravailleurs fuyant la grande ville, pas mal de signaux sont venus accréditer le phénomène. Qu'en est-il précisément ? Le deuxième "Baromètre de l'immobilier des villes moyennes" présenté ce 15 juin par L'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) et le Conseil supérieur du notariat (CSN) apporte des chiffres tangibles pour les villes moyennes bénéficiaires du programme Action coeur de ville (ACV). Des chiffres portant sur l'année 2020 (nombre de transactions et prix de vente médian au m2 notamment) qui confirment la tendance. Mais qui viennent aussi la nuancer. Notamment en montrant que non, il ne faut pas parler, en tout cas pour 2020, d'un marché jusque-là "très dégradé" qui aurait été "soudainement dopé par une attractivité nouvelle", mais bien plutôt d'une évolution plus longue à l'œuvre depuis 2018. En rappelant, aussi, que la crise sanitaire, avant d'avoir été un possible accélérateur de déménagements, a d'abord été synonyme de coup d'arrêt de toute activité immobilière. Le baromètre insiste en effet sur cette "situation tout à fait inédite" : "Pour la première fois, la machine s'est brutalement mise en pause alors qu'elle affichait un dynamisme incontesté, avec des progressions à deux chiffres en fin d'année 2019 et début 2020, le seuil du million de transactions sur un an venant d'être franchi." Et sur la nécessité d'en tenir compte dans l'analyse.
S'il faut donc parler d'un marché immobilier "résilient" dans les villes du programme ACV et leurs EPCI, il n'empêche que ces villes ont mieux résisté que d'autres. Le volume des ventes dans ces agglomérations a continué de progresser, passant de 283.290 en 2019 à 296.160 ventes en 2020 (+ 12.870, après + 23.320 ventes entre 2018 et 2019). Pour les seules villes-centres du programme, la hausse a été de + 11.920 ventes entre 2018 et 2019, "alors que le nombre baissait sur la France entière", et de + 4.090 entre 2019 et 2020. "En comparaison avec certains territoires métropolitains qui ont connu une forte baisse de leur volume de ventes, ces chiffres montrent plus qu'une résistance des villes moyennes", résume le baromètre.
D'importants volumes de ventes ont par exemple été observés à Moulins, Besançon, Pau, Lisieux, Saintes ou Autun, selon Rollon Mouchel-Blaisot, le directeur du programme ACV. Jusqu'à Limoges en passant par le Cher, le Loir-et-Cher, l'Indre ou la Creuse, il y a eu un intérêt sur ces territoires qui sont bien reliés à Paris", constate-t-il. Et le tableau est particulièrement significatif dans les départements situés à proximité de la région Ile-de-France, tirés par un marché de l'immobilier "particulièrement dynamique", où les achats sont en augmentation. Entre le troisième trimestre 2019 et le troisième trimestre 2020, la part des acquéreurs franciliens a ainsi particulièrement progressé dans les départements de l'Yonne (27% d'acheteurs franciliens, + 9 points en un an), l'Eure (22%, + 6 points) et l'Orne (21%, + 6 points). "On peut penser que la restriction de circulation à 100 kilomètres du premier confinement a joué dans la réflexion des acquéreurs", analyse sur ce point Peggy Montesinos, membre du bureau du conseil supérieur du notariat. Sans parler d'"exode urbain", ces nouveaux acquéreurs ont été "aidés par le télétravail", ajoute-t-elle.
Les villes-centres ont représenté 50% des volumes de ventes en 2020. Sont-elles effectivement plus attractives que le reste de leur agglomération ou le dynamisme bénéficie-t-il surtout à leur périphérie ? Là-dessus, les choses diffèrent clairement d'un territoire à l'autre. Dans 36% des cas, la ville-centre est la plus dynamique en termes de volumes de ventes (dont 10% où "ce sont même les villes-centres qui portent le marché local face à une périphérie qui décroît"). "À l'inverse, pour 41% des villes du programme, la périphérie reste plus dynamique que la ville-centre qui maintient ou voit décroître son marché", reconnaît le baromètre. En d'autres termes, "le marché immobilier des villes moyennes est encore majoritairement porté par la périphérie". Autre constat en partie corrélé : "Ce sont les maisons qui portent le marché, preuve du souhait des ménages d'avoir des plus grandes surfaces avec jardin". Ce qui ne contribue pas vraiment à repeupler les centres anciens de ces villes… La ville ou l'agglomération moyenne répondrait finalement surtout au "souhait d'une partie de la population" de conjuguer "accès à la nature" et "commodités propres aux villes (connexion au reste du territoire, commerces, fibre optique, services publics, accès culturel, raccordement aux réseaux de transport ... )".
Dans 76 des 222 villes ACV, la hausse du volume des ventes s’accompagne d’une hausse des prix. Le prix médian du m² pour les appartements dans l'ensemble des villes est passé de 1.294 euros en 2018 à 1.385 euros en 2020.
Au final, la baromètre évoque une "tendance" qui devra certes "être confirmée sur les prochaines années" (et, pour commencer, sur cette année) mais y voit d'ores et déjà "un signal tangible sur le début d'un cercle vertueux pour ces territoires". Avec "des externalités positives sont attendues à terme, aussi bien en matière de dynamisme économique que commercial".