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Environnement - Hydrocarbures de schiste : les députés adoptent définitivement la proposition de loi Jacob

L'Assemblée nationale a adopté définitivement le 21 juin la proposition de loi Jacob "visant à interdire l'exploration et l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par fracturation hydraulique et à abroger les permis exclusifs de recherche comportant des projets ayant recours à cette technique" dans sa rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire (CMP) réunie le 15 juin dernier. A l'issue d'échanges très vifs entre majorité et opposition, 96 députés ont voté pour et 46 contre : le groupe UMP a voté en faveur du texte, le Nouveau Centre s'est abstenu, les socialistes, les communistes et les Verts ont voté contre.
Au cours du débat précédant le vote, Michel Havard, rapporteur de la CMP, a défendu la nouvelle rédaction de la proposition de loi qui poursuit à ses yeux "un triple objectif" : "D'abord, elle vise à garantir la protection de l'environnement et la sécurité sanitaire par l'interdiction d'une technologie qui apparaît encore perfectible et peu conforme aux objectifs de développement durable que nous nous sommes fixés. Ensuite, en prévoyant une abrogation des permis contestés, elle entend répondre à une inquiétude de nos concitoyens que nous avons tous ressentie sur le terrain, au contact des élus, des associations et des populations. Enfin, elle n'insulte pas l'avenir en prévoyant une information du Parlement et les conditions d'un débat au service d'une politique énergétique ambitieuse et conforme à nos engagements." "Le regret, a-t-il ajouté, c'est celui de ne pas avoir réussi à obtenir un consensus transpartisan sur un sujet aussi crucial, dont nous avons tous ressenti l'importance sur le terrain."

Satisfaction ministérielle

La ministre de l'Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet, a elle aussi vanté la "solution de compromis" offerte par le texte pour quatre raisons. "D'abord, elle reprend la position défendue par les deux rapporteurs de l'Assemblée, qui prévoit que l'exploitation des mines d'hydrocarbures liquides ou gazeux par des forages suivis de fracturation hydraulique de la roche est interdite sur le territoire national. Deuxième point, elle organise l'abrogation des permis de recherche des hydrocarbures non conventionnels tout en limitant les risques juridiques et financiers liés à une telle abrogation (…). Troisièmement, elle maintient l'obligation pour le Gouvernement de remettre chaque année un rapport au Parlement, de sorte que celui-ci sera à la pointe de la réflexion sur ce sujet (…). Quatrièmement, elle instaure une commission nationale d'orientation, de suivi et d'évaluation. Cette commission (…) émettra un avis sur les conditions d'éventuelles expérimentations. Cet avis sera entièrement élaboré sous contrôle public."

"Arnaque intellectuelle" pour l'opposition

Au nom du groupe socialiste, radical et citoyen, Germinal Peiro, député PS de Dordogne, a jugé que la proposition de loi était "contestable depuis le début". "Ce texte a été motivé par le dépôt, en mars dernier, d'une proposition de loi de notre groupe, qui devait être examinée en séance publique lors de la journée qui lui était réservée, le 12 mai, a-t-il rappelé. C'est alors que le gouvernement a décidé d'inscrire un autre texte à l'ordre du jour, et de l'y inscrire le 10 mai, soit deux jours avant. Il a ainsi, ni plus ni moins, offert à sa majorité l'opportunité de rayer de l'ordre du jour défini près d'un mois plus tôt l'examen du texte du groupe socialiste." Selon le député, celui-ci avait le mérite d'être clair : "Il visait à interdire toute exploration et toute exploitation des gaz de schiste, ainsi qu'à abroger les permis accordés. Par contre, avec le texte dont nous débattons aujourd'hui, vous vous êtes contentés de répondre hâtivement à la mobilisation citoyenne contre le gaz de schiste, tout en ménageant les intérêts des industriels", a-t-il lancé à l'adresse de la majorité. Pour Germinal Peiro, la proposition de loi Jacob est "un texte téléguidé par les lobbyistes à la recherche de pétrodollars". Ainsi, il juge le dispositif visant à abroger les permis de recherche litigieux "très peu convaincant". "Pour tout dire, il confine même à l'arnaque intellectuelle", a-t-il insisté. En effet, "il oblige tout au plus les industriels titulaires de permis de recherches à transmettre à l'autorité compétente un rapport faisant état des techniques utilisées dans le cadre de l'exploration du sous-sol. S'ils admettent avoir prévu de recourir à la technique de fracturation hydraulique, leur permis sera abrogé", a-t-il expliqué. Pour Martine Billard (Front de Gauche, Paris), le texte présente aussi un "paradoxe" législatif puisque "l'article 1 interdit et l'article 4 autorise" l'exploration et l'exploitation des hydrocarbures de schiste.
Le Sénat examinera à son tour le texte le 30 juin prochain.

 

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