Harcèlement scolaire : de nouvelles obligations en matière de formation
Le Parlement a adopté jeudi 24 février 2022, après un ultime vote des députés, une proposition de loi portée par la majorité présidentielle visant à créer un nouveau délit de harcèlement scolaire. En première lecture, les sénateurs avaient supprimé ce nouveau délit et prévu à la place une circonstance aggravante du délit général de harcèlement, déjà existant. Le harcèlement scolaire était jusqu'alors sanctionnable sous d'autres chefs dont le harcèlement moral. Près d'un élève sur dix serait concerné chaque année par un harcèlement scolaire qui pousse parfois la victime jusqu'au suicide, comme en témoignent plusieurs drames récents tel le suicide de la jeune Dinah dans le Haut-Rhin en octobre 2021.
Le harcèlement scolaire sera punissable de trois ans d'emprisonnement et 45.000 euros d'amende lorsqu'il causera une incapacité totale de travail (ITT) inférieure ou égale à huit jours, voire s'il n'a pas entraîné d'ITT. L'âge de l'auteur sera pris en compte. La mesure sera durcie si l'ITT excède 8 jours, et pourra même atteindre dix ans d'emprisonnement et 150.000 euros d'amende lorsque les faits auront conduit la victime à se suicider ou à tenter de le faire. Autre nouveauté : l'auteur pourra être un élève ou un adulte exerçant dans l'établissement. Le texte renforce par ailleurs les obligations des plateformes numériques.
La proposition de loi aborde aussi les questions de formation initiale ou continue ainsi que la prévention de l'ensemble des personnels médicaux et paramédicaux, les travailleurs sociaux, les magistrats, les personnels de l’Education nationale, les personnels d’animation sportive, culturelle et de loisirs, ainsi que les personnels de la police nationale, des polices municipales et de la gendarmerie nationale.
Le Sénat avait souhaité assouplir les dérogations à la carte scolaire (initialement article 3) ou au recours à l'instruction en famille (articles 3 bis A, 3 bis B et 3 bis C) pour un enfant victime de harcèlement scolaire. En effet, dans son amendement du 19 janvier 2022, la sénatrice du Lot Angèle de Préville avait souhaité que "lorsqu’il est établi que l’intégrité physique ou morale de l’enfant est menacée, les personnes responsables de l’enfant" puissent "se voir accorder une dérogation concernant les obligations découlant de la carte scolaire afin d’inscrire l’enfant dans une école située sur une autre commune ou dans un établissement situé dans un autre secteur ou district". Elle faisait valoir "une terrible inégalité pour les familles qui ne peuvent se permettre d’inscrire leur enfant dans un établissement privé dont les coûts sont parfois importants". Mais cette disposition n'a pas été retenue dans le texte définitivement adopté le 24 février par l'Assemblée.
Par ailleurs, la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République prévoit la possibilité de commencer l'instruction en famille d'un enfant victime de harcèlement scolaire sans attendre l'autorisation de l'administration qui peut prendre deux mois. Cette situation transitoire, pour être maintenue, nécessite pour les parents de présenter un projet pédagogique et une capacité d'enseignement. C'est la raison pour laquelle le Sénat avait souhaité aligner les conditions de recours à l'instruction en famille des enfants harcelés sur celles des enfants en situation de handicap, isolés ou en itinérance. Cette disposition non plus n'a pas été retenue dans le texte définitif.