Environnement - Grenelle 1 : la commission des affaires économiques de l'Assemblée adopte une cinquantaine d'amendements
Les 19 et 20 mai, la commission des affaires économiques (CAE) de l'Assemblée nationale a examiné en seconde lecture le projet de loi de programme relatif à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement, dit Grenelle 1. Les travaux ont été denses : 663 amendements ont été passés en revue et une cinquantaine adoptés.
L'opposition s'est abstenue de voter le texte mais peut se targuer d'avoir fait passer des amendements importants, dont un visant à ne plus faire mention dans le texte d'une autorisation de circulation des poids lourds de 44 tonnes, ce qui aurait selon elle lésé les collectivités en tant que responsables des travaux de voirie. Un autre amendement sur le fret routier a été porté à l'article 10 par les députés Philippe Meunier, Christian Jacob et Yves Albarello, interdisant le transit sur le sol français des camions étrangers n'effectuant ni chargement ni livraison dans l'Hexagone. Les députés Verts ont également réintroduit l'obligation pour les transporteurs routiers d'afficher les émissions de GES de leurs flottes. Côté fret ferroviaire, un amendement à l'article 5 est venu renforcer l'objectif de développement du secteur, tandis qu'un à l'article 10 a fixé l'obligation de faire précéder d'un audit le projet d'extension du réseau d'"autoroutes ferroviaires". Côté transport fluvial, le projet de mise à l'étude du tracé de canal Rhin-Rhône a été débouté et celui de "liaison à grand gabarit de la Seine amont" devra faire l'objet d'un débat public d'ici à 2011. Sur amendement du groupe socialiste, radical, citoyen et divers gauche (SRC), le principe de respect des milieux aquatiques dans le cadre du développement du transport fluvial a pris place dans le projet de loi.
Si l'on exclut les amendements de pure clarification, ceux qui ont été adoptés visent également à harmoniser les dispositions du Grenelle 1 avec d'autres textes. Ce travail de coordination législative a notamment porté sur le lien entre loi Grenelle I et loi de lutte contre l'exclusion. Ou encore avec le "plan d'urgence pour l'emploi des jeunes", présenté fin avril par le gouvernement. Dans ce sens, un amendement du député Jean Dionis du Séjour permet d'insister dans le projet de loi sur les débouchés et besoins de la filière de construction et de rénovation énergétique.
Par ailleurs, en plus des changements apportés au Code de l'urbanisme, l'article 8 du Grenelle 1 modifie désormais le Code du patrimoine (art. L 642-3). But de la manoeuvre : alléger le mécanisme de recours des maires et préfets face à l'avis de l'architecte des Bâtiments de France dans les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP), en y facilitant ainsi les travaux d'efficacité énergétique et "en responsabilisant plus fortement le maire de la commune dans laquelle a été instituée une ZPPAUP". Un autre amendement rétablit par ailleurs les dispositions visant à remuscler les procédures de débat public, que les sénateurs avaient jetées aux oubliettes.
En termes d'urbanisme, notons aussi qu'un amendement vient introduire plus de souplesse dans la procédure d'annulation d'un PLU par voie contentieuse. Sur un amendement à l'article 45 défendu par Patrick Ollier, il a aussi été acté que la durée des procédures administratives préalables à la mise en oeuvre de la rocade francilienne par métro automatique sera limitée dans le temps et encadrée à cet effet par décret. Autre amendement ciblé et original : celui de Didier Gonzales, député du Val-de-Marne, qui vient contraindre un opérateur siégeant sur un "site à fort impact environnemental" (de type Seveso ou aéroportuaire) à ne pas se désintéresser du territoire urbain qui l'entoure et à travailler au contraire de concert avec les collectivités concernées, et ce en vue de contrer dans ces zones les phénomènes de désertification et de paupérisation.
Les chapitres du projet de loi portant sur l'éolien, les énergies renouvelables (ENR) et les déchets ont aussi été amendés. Un amendement à l'article 17 réintègre ainsi les petites éoliennes dans le giron des schémas régionaux d'ENR, dont elles étaient jusque-là exclues. Un amendement du groupe SRC est aussi venu donner un coup de pouce à la recherche en termes de récupération de chaleur en sous-sol minier, telle qu'elle s'expérimente actuellement en territoire lorrain. Le développement des centrales à charbon se voit par ailleurs contenu par l'adoption d'un amendement porté par les députés Bertrand Pancher (Meuse) et Guy Geoffroy (Seine-et-Marne).
Côté déchets, un amendement à l'article 41 va permettre de modifier le Code général des impôts et, pour les communes et intercommunalités, d'exonérer de taxes foncières les propriétés bâties et entreprises raccordées par besoin énergétique à une unité de traitement de déchets. Le délai d'intégration d'une part variable dans la redevance d'enlèvement des ordures ménagères (REOM) en habitat collectif a été aligné sur celui de l'habitat particulier, soit à l'horizon de 5 ans (et non plus de dix). Enfin, les députés Verts sont parvenus à faire insérer dans le projet de loi un point sur la valorisation des déchets organiques, en vue d'appuyer le développement du compostage.
Le rapport de la CAE sera mis en ligne dans les quinze prochains jours et l'examen en séance publique du projet de loi en deuxième lecture à l'Assemblée démarrera le 9 juin.
Morgan Boëdec / Victoires éditions