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Grand Débat acte 7 : Emmanuel Macron de nouveau face aux maux des maires ruraux

À Gargilesse-Dampierre, dans l'Indre, chez Vanik Berberian, le président de l'Association des maires ruraux, Emmanuel Macron s'est une nouvelle fois prêté au jeu des questions-réponses sur une large palette de sujets, de l'accès aux soins jusqu'aux architectes des bâtiments de France en passant par le numérique ou le ferroviaire. Sans oublier une passe d'armes avec un autre élu de l'Indre, André Laignel, notamment sur la question des dotations.

Manque de médecins, de réseaux, de trains, d'emplois aidés... à Gargilesse-Dampierre, dans l'Indre, Emmanuel Macron a de nouveau écouté le 14 février les maires lui exposer les handicaps du monde rural avant de retrouver des chefs d'entreprise à Déols, au nord de Châteauroux.
Cette septième étape présidentielle du Grand Débat n'avait pas été choisie au hasard puisque le maire de ce bourg de 300 habitants n'est autre que Vanik Berberian, le président de l'Association des maires ruraux de France (AMRF).
Aucun "gilet jaune" n'était visible dans le village, dont les accès étaient strictement contrôlés par la gendarmerie. Des tags avaient été effacés avant l'arrivée du président de la République. Loin des échanges marathon de ces dernières semaines, c'est en petit comité qu'Emmanuel Macron a ensuite écouté une trentaine de maires de l'Indre énumérer leurs doléances.

"La dotation forfaitaire, ce n'est pas toute la DGF"

Parmi eux, André Laignel, maire socialiste d'Issoudun, premier vice-président délégué de l'Association des maires de France (AMF) et président du Comité des finances locales, qui l'a accusé d'avoir trop longtemps dédaigné les maires. "C'est très bien que vous nous rencontriez mais nous voulons passer aux actes", l'a défié l'élu. "Après 18 mois de stigmatisation des maires, que n'avons-nous entendu ! Nous étions trop nombreux, incompétents, clientélistes. Ces mots ont été employés par des membres du gouvernement et parfois par vous", a-t-il accusé, ce qu'Emmanuel Macron a catégoriquement nié.

"La dotation globale aux communes a été stable en 2019 mais 19.500 communes verront baisser leur dotation", a affirmé André Laignel, reprenant en cela les chiffres qui avaient été fournis deux jours plus tôt en Comité des finances locales (lire notre article). "Quand on dit la moitié de la vérité, on ne dit pas toute la vérité", "vous inquiétez certains et vous êtes malhonnête pour les autres", lui a rétorqué le chef de l'État, en insistant sur le fait que la baisse évoquée ne concernera que la dotation forfaitaire. Or "la dotation forfaitaire, ce n'est pas toute la dotation" globale de fonctionnement, a rappelé Emmanuel Macron, poursuivant : "Le législateur, année après année, décide même que c'est de moins en moins toute la dotation, afin de pouvoir faire de la péréquation. Sinon, les ruraux seraient les premières victimes", alors qu'ils bénéficient notamment aujourd'hui de la dotation de solidarité rurale (DSR). Et le chef de l'État - comme il l'avait fait en marge du Congrès des maires en novembre dernier - de se redire ouvert à une réforme de la DGF : "S'il y a plus malin, qu'on le fasse", a-t-il lancé, rappelant toutefois que la réforme proposée en 2015 par Christine Pirès-Beaune avait finalement été écartée et mettant les élus locaux au défi de "se mettre d'accord entre eux".

"Nous avons vu que le nouveau monde n'était pas si neuf que ça, d'où la déception", lui avait pour sa part d'emblée déclaré Vanik Berbérian. "Le nouveau monde ?", a fait mine de s'interroger Emmanuel Macron.
Ancien monde ou nouveau monde, les sujets évoqués les uns après les autres pendant 1h30 par les maires de l'Indre - avant que le chef de l'État ne réponde en une seule fois à toute la série de questions et interpellations - ont été nombreux. Intercommunalité, dépendance, mobilités, numérique, architectes des bâtiments de France, devenir des sites de l'Afpa, énergies renouvelables, présence des services de l'État, agriculture…

Cartes grises, Coeur de ville... sans oublier le 19h41

Le président de la République a pris ses distances vis-à-vis de "l'intercommunalité forcée" du précédent quinquennat mais a dit croire "beaucoup à la commune nouvelle". Il a évoqué le "clivage de destin" qui s'instaure entre "les territoires en déprise démographique" et les autres et a insisté sur la nécessité de "remettre de l'espace dans les politiques publiques".
Face aux enjeux du vieillissement de la population et donc aussi de la dépendance, il a évoqué la perspective d'un "nouveau risque dépendance", un "chantier" qui impliquera de "repenser profondément" le système actuel.

Interrogé sur la problématique de "l'inclusion numérique", Emmanuel Macron a reconnu que certains des chantiers de dématérialisation avaient généré des difficultés. S'appuyant sur le récent rapport du Défenseur des droits, il a cité l'exemple des démarches liées à la carte grise, qui devront sans doute être "corrigées". Au-delà de "l'accompagnement aux usages" numériques, il considère qu'il ne doit pas nécessairement y avoir de "réponse unique sur tout le territoire" et que la dématérialisation doit pouvoir se penser à des "rythmes" variables et de façon "plus pragmatiques".
S'agissant de la couverture numérique du territoire, il a été rappelé que les efforts actuels portaient tout autant sur la couverture en fibre que sur "le déploiement d'antennes pour le mobile et l'internet", Emmanuel Macron relevant au passage que la 5G pourra dans certains cas "se substituer à la fibre" et que certains territoires seraient déjà dans cette logique-là.

Il a confirmé que le gouvernement était actuellement "en train de concevoir" "l'équivalent du plan Cœur de ville pour les communes de moins de 10.000 habitants" et a vanté les mérites de la future Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT).
Si le chef de l'État a douché les espoirs d'une réouverture de la maternité du Blanc (sud-ouest de l'Indre), dont la fermeture, actée en 2018, suscite une forte mobilisation locale depuis sept ans… il a en revanche donné satisfaction aux maires en annonçant que le train de "19h41 aura bien un arrêt à Argenton-sur-Creuse".

 

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