Environnement - Gestion de l'Ademe : la Cour des comptes souffle le chaud et le froid
La Cour des comptes a publié ce 23 mars un rapport particulier sur les comptes et la gestion de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Si, selon elle, l’Agence parvient à assumer de façon "globalement satisfaisante" les nombreuses missions qui lui sont confiées, elle s’inquiète de l’évolution de ses moyens financiers pour les années à venir et appelle à améliorer rapidement sa gestion interne, notamment en matière de contrôle de l’attribution des aides.
L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) assure de façon "globalement satisfaisante" ses missions, constate d'abord la Cour des comptes dans un rapport portant sur la période 2010-2015 publié ce 23 mars. Créée en 1991 sous la forme d’un établissement public à caractère industriel et commercial (Epic), elle emploie aujourd’hui plus de 1.100 agents et dispose d’un budget dépassant les 500 millions d’euros. Déchets, lutte contre la pollution, transports, ou énergies renouvelables… : l’Ademe s’est vu confier par l’Etat un nombre croissant de missions, qui vont du suivi technique et financier d'appels à projets innovants dans les énergies renouvelables à la sensibilisation du public à la protection de l'environnement.
Principal opérateur de la transition écologique et énergétique à la suite du Grenelle de l’environnement, l’Agence est aussi un des acteurs majeurs du programme des investissements d'avenir (PIA), pour lequel plus de 3,1 milliards d'euros lui ont été alloués entre 2010 et 2015, rappelle la Cour des comptes. La loi relative à la transition énergétique a aussi conforté son rôle dans la mise en œuvre des politiques publiques consacrées à la promotion du développement durable, poursuit-elle.
"Effet de ciseau"
Mais "sous la pression de la tutelle (le ministère de l'Environnement, ndlr), l'établissement n'a cessé de contracter de nouveaux engagements" de soutien public, créant un enjeu sur "la capacité future de l'agence à dégager les ressources suffisantes pour y faire face", pointe la Cour, qui note une "absence de garantie sur la capacité à couvrir" les autorisations d'engagements prises dans les années à venir. Ces autorisations d'engagements s'élèvent à plus de 650 millions d'euros par an, tandis que les crédits mobilisables et délégués à l'Agence, atteignent environ 500 millions d'euros. Cela n'est "pas sans risque", ajoutent les magistrats de la rue Cambon, et cet "effet de ciseau" peut conduire l'Agence, dont le budget est quasi exclusivement public (deux tiers environ du produit de la taxe générale sur les activités polluantes lui sont affectés), "à se trouver dans une situation financière tendue dès 2017". Cette situation est pourtant connue depuis "au moins trois ans" sans qu'"aucune décision susceptible de la corriger" n'ait été prise, regrette la Cour dont le précédent rapport sur l'Ademe date de 2010. Dans sa réponse au rapport, la ministre de l'Environnement Ségolène Royal assure que le niveau des crédits de l'agence "constituera un des principaux points d'attention" du ministère pour le prochain budget 2018-2020.
La Cour invite en outre à "poursuivre l’effort de sélection des projets", à "rationaliser la gestion des aides et intensifier les contrôles a priori et a posteriori des opérations aidées par l’agence, notamment celles financées par le ‘fonds chaleur’ et le ‘fonds déchets’". Il lui paraît également nécessaire de rechercher, pour les projets les plus importants "une complémentarité de financement entre l’Ademe, la Caisse des Dépôts et Consignations (CDC) et la Banque publique d’investissement (BPI)".
Gestion interne à améliorer
Le rapport pointe aussi la gestion interne de l'Agence qui "doit impérativement et rapidement être améliorée". En matière de politique de ressources humaines, elle doit être "plus rigoureuse" sur la maîtrise des coûts salariaux et le respect de la durée légale du travail. "Avant la fin du premier semestre 2017", la Cour appelle également l’Ademe à organiser la fonction "achats" "pour garantir le respect des règles de la commande publique et assurer un suivi régulier marchés". Elle souhaite aussi que son schéma pluriannuel de stratégie immobilière soit redéfini "en limitant les coûts des implantations du siège et dans les territoires, en cohérence avec le nouveau découpage des régions et avec l’organisation territoriale de l’Etat".
Les recommandations de la Cour rejoignent "des enjeux stratégiques bien identifiés par l'Ademe, pour lesquels des actions sont déjà en cours ou planifiées", a répondu le président de l’agence, Bruno Lechevin. L'Ademe a déjà engagé une réforme de ses aides en 2014, et va "poursuivre le durcissement" de l'attribution de certaines d'entre elles et "augmenter" les contrôles a posteriori, ajoute-t-il. Il assure aussi que des évolutions seront encore apportées à la gestion des ressources humaines et des procédures d'achats.