François Rebsamen interrogé sur son programme de travail

Le ministre de l'Aménagement du territoire et de la Décentralisation était auditionné ce 4 mars après-midi par la délégation sénatoriale aux collectivités. Si de nombreux sujets ont été évoqués, François Rebsamen ne prévoit visiblement pas de grande et nouvelle réforme touchant les collectivités, mais plutôt la poursuite de divers travaux existants, qu'il s'agisse par exemple du ZAN ou du statut de l'élu.

Les membres de la délégation sénatoriale aux collectivités ne manquaient pas de questions à lui poser, y compris des questions très précises, qu'il s'agisse de compétences des collectivités ou de finances locales. François Rebsamen leur a répondu sur à peu près tous les points. En revanche, tandis que la délégation avait intitulé cette audition "Collectivités : quelle feuille de route gouvernementale ?", le ministre de l'Aménagement du territoire et de la Décentralisation n'a guère fourni d'itinéraire clairement tracé, mais plutôt un tableau pointilliste et une addition de points de vue personnels. Et s'est parfois exprimé au moins autant en tant qu'élu local – il est toujours président de la métropole de Dijon – qu'en tant que membre du gouvernement. Il n'y aura en tout cas pas eu d'annonce particulière ce mardi 4 mars après-midi. 

Le président de la délégation, Bernard Delcros, l'avait invité à livrer ses "priorités d'action" et des éléments de "calendrier". François Rebsamen a dit vouloir partager simplement "un certain nombre de convictions". Parmi elles par exemple, le fait que "le partenariat Etat-collectivités est plus important que jamais", qu'il faut "préserver la capacité d'action des collectivités", qu'il est essentiel d'avoir une "vision d'aménagement du territoire" qui se retrouvera et se déclinera à travers les outils de contractualisation (contrats de plan, CRTE, pactes territoriaux…) ou encore qu'il faut "étendre la capacité de dérogation des préfets". Et le ministre de faire siens les fameux "3 D" : déconcentration, décentralisation, différenciation. 

  • Finances

Estimant que la contribution des collectivités à "l'effort de redressement des comptes publics" ne peut se faire que sur la base d'un "diagnostic objectif", le ministre nommé il y a un peu plus de deux mois souhaite organiser avec la ministre en charge des comptes publics, "dans les prochaines semaines", une "conférence financière des territoires". Une idée qu'il avait déjà évoquée le 20 février lors d'une interview sur Public Sénat : "Je pense que je vais proposer au Premier ministre de réunir une conférence de l'ensemble des collectivités locales, une conférence nationale sur l'état financier des collectivités", avait-il alors déclaré, mentionnant "l'ensemble des associations d'élus". Reste à savoir comment cette conférence s'articulera avec le "comité d'alerte budgétaire" dont ses deux collègues de Bercy avaient annoncé la veille la création (voir notre article), qui doit inclure les finances des collectivités et impliquer les associations d'élus.

Concernant plus spécifiquement la situation financière des départements, François Rebsamen s'est dit surpris de l'"ovation" qui avait selon lui été réservée à Michel Barnier en tant que Premier ministre lors des dernières Assises de Départements de France en novembre dernier (voir notre article), alors même que "l'addition était trois fois plus salée" que dans la version finale de la loi de finances. Il a notamment mis en avant la possibilité donnée aux départements de relever le plafond des DMTO de 0,5% - faculté qui pourrait, selon Bercy, rapporter 700 millions d'euros aux départements. Il a également souligné que "sur le milliard qui sera rendu en trois ans, à hauteur de 90%, aux collectivités" (dans le cadre du dispositif "Dilico" prévu par la loi de finances), les départements doivent mettre en réserve 220 millions d'euros (sachant que 250 millions concernent les communes, 250 les intercommunalités et 280 les régions). Il s'agit, assure-t-il, d'un "effort particulier".

S'agissant des dotations, et plus précisément des dotations d'investissement – Dsil, DETR, fonds vert… – le ministre a rappelé qu'il avait plaidé pour une augmentation de la DGF des communes, notamment la DSR et la DSU, mais que "la commission mixte paritaire a tranché dans un autre sens" et préféré privilégier la Dsil. Il a au passage attiré l'attention des élus sur le fait qu'il est "plus difficile pour Bercy de contrôler l'utilisation de la DGF que de mettre des réserves de précaution sur les dotations d'investissement".

Au sujet de la DETR, il a fait part de sa volonté de la "défendre jusqu'au bout". Evoquant la "réflexion qui est menée sur le rassemblement des dotations d'investissement", il assuré que dans cette "fusion", il y aura toujours "une place à part pour la DETR".

Côté fonds vert, interrogé sur ce point par un sénateur, il a confirmé que le "fonds territorial climat", doté de 100 millions d'euros cette année (contre 200 millions l'an dernier), était bien "intégré" dans le montant global du fonds vert (1,2 milliard) et concerne tous les EPCI ayant adopté un PCAET (plan climat-air-énergie territorial). Il a en outre souligné que ce fonds territorial était "fléché et ne sera donc pas fongible dans autre chose".

  • "Réformes de structure"

L'exercice budgétaire pour 2025 n'a pas permis de "réformes de structure". La préparation du budget 2026 doit aborder les choses différemment. D'où la demande de François Bayrou à ses ministres, a rapporté François Rebsamen : une "revue des missions" à effectuer "sous quinze jours", puis une évaluation du coût de ces missions, puis des propositions de "nouvelle organisation" et une estimation des "moyens nécessaires" à cette organisation. C'est sur cette base que doit être travaillé le prochain projet de loi de finances.

  • Elus

La proposition de loi sénatoriale sur le statut de l'élu (voir notre article) sera bien examinée par l'Assemblée nationale "au prochain trimestre", a indiqué le ministre après avoir évoqué l'enjeu des "faits de violence" contre les élus locaux.

  • "Les grands programmes"

François Rebsamen a salué l'action de l'ANCT, "qui s'est largement améliorée ces derniers temps", et ses programmes que sont Action cœur de ville, Petites villes de demain et Villages d'avenir. Le dispositif des maisons France Services va continuer à être soutenu cette année, avec un objectif de 3.000 France Services.

  • Climat

"Il faut disposer d'une vision plus large, à 25 ans, pour apporter des réponses aux défis écologiques, démographiques, industriels et numériques", a-t-il déclaré, citant en exemple sa métropole de Dijon qui a élaboré un plan d'actions écologiques jusqu'en 2050, chiffré à 45 milliards d'euros. La "problématique climatique" devant s'appuyer sur "une vision nationale cohérente", il compte "défendre auprès du Premier ministre l'idée d'une instance interministérielle en charge de définir cette politique".

  • Fonds européens

Il faut une "stratégie de mobilisation des fonds européens plus offensive", sachant que les "taux de retour" actuels "ne sont pas suffisants". Il s'agit de faire en sorte que "les fonds de cohésion soient intégralement consommés".

  • Simplification

"Le gouvernement s'engage, à travers le guichet France Simplification [voir notre article du 7 février], qui commence à porter ses fruits". Il faut aussi "simplifier le recours à l'ingénierie et aux différentes agences". Le ministère "formulera au printemps une dizaine de propositions opérationnelles visant à simplifier l'exercice des missions" des élus locaux.

  • Versement mobilité

François Rebsamen a regretté la prise de position du Medef contre le nouveau versement mobilité régional (voir notre article), assurant que des acteurs tels que la FNTP ou la FNB soutenaient, eux, le dispositif, et soulignant que le Medef ne s'était guère fait entendre lorsqu'il s'était agi de l'Ile-de-France. "Laissons le débat se dérouler", dit le ministre, pour qui ce versement doit "réellement servir à créer de nouvelles dessertes de transports" et non, par exemple, à financer la gratuité.

  • ZAN

Dans le cadre de la proposition de loi sénatoriale "visant à instaurer une trajectoire de réduction de l’artificialisation concertée avec les élus locaux" dite Trace, adoptée le 19 février en commission (voir notre article) et devant arriver en séance le 12 mars, François Rebsamen propose un "assouplissement" qu'il avait déjà évoqué fin janvier devant la commission des affaires économiques du Sénat (voir notre article) : "avoir une première échéance de dix ans, 2024-2034 [au lieu de 2021-2031], en conservant l'objectif 2050". Ce décalage de trois ans permettra de dégager 37.500 hectares susceptibles d'être artificialisés. Sur ces hectares, il propose d'affecter 10.000 hectares à l'industrie.

  • Fiscalité locale

François Rebsamen n'a pas changé d'avis : la suppression de la taxe d'habitation "a rompu le lien entre le citoyen et la collectivité dans laquelle il réside". "Il n'est pas possible que certaines collectivités puissent vivre avec seulement 20% de contributeurs" (villes comptant 80% de locataires). Il se dit à ce titre "favorable à ce qu'on reprenne une réflexion sur une contribution minimale rétablissant ce lien de résidence". Conscient des probables résistances qui se feront jour, il compte sur l'appui des sénateurs pour oeuvrer avec lui en ce sens.

  • Assurances

Un colloque sur l'assurabilité des communes sera prochainement organisé au ministère. "Il faut trouver des solutions pour que les communes puissent assurer leurs bâtiments et leurs biens".

 

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