Formation des apprentis en collectivité : la participation du CNFPT sera plafonnée à 25 millions d'euros
La contribution du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) à la formation des apprentis employés par les collectivités territoriales ne dépassera pas 25 millions d’euros par an. Au-delà de ce montant, France compétences prendra le relais. Olivier Dussopt en a fait l’annonce, ce mercredi, devant le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. L’instance s’est toutefois montrée déçue.
La loi du 6 août 2019, dite de transformation de la fonction publique, a prévu qu’à partir de début 2020, le financement de la formation des apprentis employés par les collectivités territoriales sera partagé à égalité entre les employeurs territoriaux (50%) et le Centre national de la fonction publique territoriale (50%). Etant donné qu’en 2018, les collectivités territoriales ont accueilli plus de 8.500 nouveaux jeunes en contrat d'apprentissage – dont 80% dans les communes et leurs groupements –, les acteurs locaux ont sorti leurs calculatrices. Pour sa part, le CNFPT a évalué l’impact sur son budget à un montant compris entre 38 et 50 millions d’euros par an. Un projet de décret que le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) avait examiné le 27 novembre, prenait acte de cette clé de partage des coûts.
Finalement, celle-ci ne s’appliquera pas exactement ainsi, puisque l’institution en charge de la formation des 1,9 million d’agents territoriaux verra l’ardoise mise à sa charge se réduire. Les principaux intéressés l’ont appris il y a quelques jours. En vue de sa séance plénière du 26 février, le CSFPT avait été saisi d’une nouvelle version du projet de décret sur la répartition du coût de la formation des apprentis accueillis par le secteur public local. Dans ce texte que Localtis avait pu consulter, il était indiqué que lorsqu'une année donnée, la contribution du CNFPT est supérieure à un certain montant, France compétences - à savoir l'autorité de financement et de régulation de la formation professionnelle et de l’apprentissage créée par la loi Avenir professionnel - verse des "fonds" à l'établissement.
Plafond de dépenses
En ne donnant pas plus de précisions, le projet de texte n’avait pas vraiment rassuré le président du CNFPT. Dans un communiqué publié le 14 février, François Deluga en avait déduit que l’établissement paierait "tous les frais de formation" des apprentis employés par les collectivités territoriales et que l'instance de gouvernance nationale de l’apprentissage apporterait un complément "uniquement si le plafond est dépassé". "Si les choses devaient rester en l’état", le CNFPT devra prendre sur la cotisation de 0,9% versée par les collectivités pour financer l’apprentissage", et ce au détriment de la formation professionnelle des agents territoriaux, menaçait l’élu.
Toutefois, le gouvernement n’a pas maintenu longtemps le flou. Le secrétaire d’Etat en charge de la fonction publique a en effet précisé lui-même ce mercredi 26 février devant les membres du CSFPT les modalités de la participation de France compétences au financement de la formation des apprentis dans les collectivités territoriales. Selon plusieurs sources concordantes, la prise en charge par le CNFPT sera plafonnée à 25 millions d’euros par an. Le montant, qui représente environ "6% des recettes" de l’organisme, sera fixé par un arrêté conjoint des ministres chargés du travail, de la fonction publique, du budget et des collectivités territoriales. Conséquence : toutes les dépenses de formation des apprentis que le CNFPT engagera au-delà de ce seuil lui seront remboursées par France compétences.
Déception chez les membres du CSFPT
Impossible de prévoir une participation plus élevée de France compétences, estime une source proche du dossier. Car sinon, l’équilibre voulu par le législateur ne serait pas respecté. Mais il existerait des solutions de financement complémentaires. Comme l’intervention des régions : depuis la loi Avenir professionnel, ces collectivités ne sont, certes, plus au cœur de la formation des apprentis, mais elles pourraient utiliser une partie de l’enveloppe (586 millions d’euros en 2020) que l’Etat leur attribue pour leur permettre d’aider les centres de formation des apprentis. Ce scénario serait très bien vu par Bercy.
En dépit de l’allègement de la participation mise à la charge du CNFPT prévue dans le projet de décret, le CSFPT n’a pas apporté son soutien au texte. Côté employeurs, 8 élus se sont abstenus et 3 ont voté contre. Pour leur part, les représentants syndicaux ont rejeté le projet de texte à la quasi-unanimité (17 voix contre et 1 abstention). "Le gouvernement propose de bricoler une solution, alors qu’il faudrait des solutions pérennes", dénonce Véronique Sauvage, secrétaire nationale d’Interco-CFDT, qui a voté contre le projet de décret. La présidente de la formation spécialisée du CSFPT en charge notamment des questions de formation pointe aussi le risque que le plancher à partir duquel France compétences intervient financièrement soit redéfini d’une année à l’autre. "Nous n’avons pas confiance", affirme-t-elle. La CFDT défend l’idée de la création d’un fonds mutualisé qui serait alimenté notamment par une taxe d’apprentissage payée par les employeurs territoriaux. Ce "France compétences territorial" financerait la formation des apprentis des collectivités territoriales et la formation des agents territoriaux en situation de reconversion.