Formation : cap vers le verdissement des financements européens et français
Le financement des formations utiles à la transition écologique sera au cœur du programme du Fonds social européen +. Etat, régions et branches professionnelles poursuivent aussi ce but. Tous étaient réunis à l'occasion du Village des initiatives FSE +, organisé jeudi 16 mars.
“Je ne vois guère de métier qui n’ait de questions à se poser sur la transition écologique”, lance le commissaire général au développement durable, Thomas Lesueur, à l’occasion de la sixième édition de l’événement “Village des initiatives FSE +”, qui s’est ouvert jeudi 16 mars à Paris. Au-delà des secteurs de l’agriculture, du bâtiment, des transports et de l’énergie, c’est l’ensemble de l’économie qui est concerné par les transformations afin d’atteindre la neutralité carbone à l’horizon 2050. Une nouvelle donne qui invite à relativiser la notion même de métiers “verts” comme “verdissants”, selon le responsable du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires.
La transition écologique implique “un énorme changement de culture”, “une vraie métamorphose”, témoigne Françoise Le Guern, responsable de la formation chez Renault Trucks. Le groupe spécialisé dans les camions s'est engagé à abandonner les solutions diesel pour aller vers des véhicules utilisant des biocarburants, de l’hydrogène mais aussi des batteries. "Dans les dix ans qui viennent, on va opérer des changements plus conséquents”, indique-t-elle. Il faudra non seulement transformer les usines, les procédés de fabrication mais aussi toute la chaîne d'approvisionnement. En bref, former ou reconvertir des milliers de salariés, au-delà des seuls experts.
30% du FSE + à consacrer aux compétences vertes
Massifier les formations professionnelles tout en les verdissant constituent deux défis sur lesquels on part d’assez loin, comme en convient Jiri Plecity, chef d'unité en charge de la France à la Direction générale Emploi de la Commission européenne. D’ici à 2030, l’Union européenne vise un objectif de 60% d’adultes en formation chaque année. Et pour l'heure, “la part du Fonds social européen + investie dans les compétences vertes continue à s’accroître, mais elle ne représente pas encore 30%”, ajoute-t-il.
Au niveau français, “l’Etat est en train de verdir tous ses instruments de politique publique”, explique Marianne Cotis, administratrice de la Délégation générale pour l’emploi et la formation professionnelle. Inscrit dans le plan “France 2030”, l’appel à manifestation d’intérêt "Compétences et métiers d’avenir" (CMA), doté de 2,5 milliards d’euros, en témoigne déjà. A cela s'ajoutent les engagements de développement de l’emploi et des compétences (EDEC) : ces accords conclus entre l’État et les branches professionnelles visant à apporter diverses aides techniques et financières afin d’anticiper et d’accompagner l’évolution des emplois des salariés vont davantage prioriser la transition écologique. Doté de 300 millions d’euros en 2023, le fonds étatique FNE-formation, qui permet de financer la formation des salariés des entreprises en reprise, en mutation, en difficulté ou en activité partielle, fera bientôt l’objet d’une instruction afin de le centrer sur les transitions écologique, numérique et alimentaire, indique-t-elle.
Appuyer les entreprises dans leurs stratégies
Un appui bienvenu dans le monde économique. Compte-tenu de moyens "très en baisse", “l’aide de l’Etat est très précieuse pour accompagner les entreprises”, indique Stéphanie Lagalle-Baranes, directrice générale de l’Opco 2i, l’opérateur de compétences qui appuie 32 branches professionnelles de l’industrie. Qui mobilise à la fois l'accord EDEC, le FNE-Formation ainsi que l’appel à manifestation d’intérêt CMA, afin d’aider les entreprises à définir leurs stratégies mais aussi pour expérimenter de nouvelles formations. “7 entreprises sur 10 sentent qu’il y a des choses à faire mais ne savent pas trop comment prendre le sujet”, insiste la responsable.
Aider directement les entreprises sur ces sujets constitue aussi un souhait de la région Grand Est. “Pour l’instant on forme les demandeurs d’emploi mais pas au sein des entreprises”, regrette sa première vice-présidente emploi, formation, orientation et apprentissage, Valérie Debord. Elle indique réfléchir "à une possibilité d’accompagner, y compris au sein des entreprises”, dans l'optique notamment d'éviter toutes ruptures liées à des emplois qui deviendraient obsolètes. Les aides issues du Fonds européen pour une transition juste, qui concerneront à hauteur de 15% des territoires de sa région exposés à de grandes mutations, viendront s'inscrire dans la stratégie "Business Act" de la région. Adopté en 2020, ce plan prévoit divers soutiens pour les secteurs ou domaines jugés critiques (cybersécurité, bois, eau…), sous la forme de centres de ressources, de clubs d’entreprises, de renouvellement des équipements, ou de sensibilisation des citoyens au climat.