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Forêts et changement climatique : un rapport propose la création d'un fonds doté de 300 millions d'euros par an sur 30 ans

Un rapport remis ce 17 septembre au gouvernement par la députée du Nord Anne-Laure Cattelot (LREM) propose toute une série d'actions pour adapter les forêts au changement climatique et soutenir la filière bois. Parmi ses propositions phares :  la création d'un "fonds pour l'avenir de la forêt" abondé par le public et le privé et doté de 300 millions d'euros par an sur 30 ans et celle d'une "grande Agence nationale des forêts" pour piloter ce fonds et mettre en œuvre la politique forestière.

Remis ce 17 septembre au ministre de l'Agriculture, Julien Denormandie, et à la secrétaire d'État chargée de la biodiversité, Bérangère Abba, le rapport très touffu de la députée LREM du Nord Anne-Laure Cattelot sur l'adaptation des forêts au changement climatique estime qu'il faudra prévoir dans cette perspective des "investissements massifs". Alors que la France compte près de 17 millions d'hectares de forêts, qui couvrent environ un tiers du territoire métropolitain, "le défi qui se profile devant nous sur les trente prochaines années pour reconstituer, adapter ou boiser est celui d'une surface égale à 200.000 fois le Stade de France, prévient la députée qui a rédigé son rapport avec un expert du ministère de l'Agriculture et un expert du ministère de la Transition écologique. Au-delà des régénérations naturelles, il nous faudra planter 70 millions d'arbres par an pendant 30 ans, soit un arbre par habitant."

"Fonds pour l'avenir de la forêt" : contributeurs publics et privés

Parmi les préconisations phares du rapport, la création d'un "fonds pour l'avenir de la forêt", abondé par le public et le privé, doté de 300 millions d'euros par an sur 30 ans. Son financement annuel reposerait sur l'affectation d'une partie des recettes de la fiscalité carbone (100 millions d'euros), des compensations environnementales d'entreprises (100 millions d'euros également), de crédits mobilisés par les agences de l'eau (30 millions d'euros) sur des projets ciblés (préservation de la ressource en eau par les forêts en tête de bassin, maintien du bon état des masses d'eau, protection des zones de captages…), de crédits des régions (20 millions d'euros) ciblés sur des projets territoriaux exemplaires et de dotations du grand plan d'investissement (10 millions d'euros). Ce fonds aurait pour mission de "reconstituer massivement les forêts sinistrées, anticiper, enrichir et adapter à l'aune de nos connaissances les peuplements vulnérables au changement climatique et créer de nouvelles forêts", indique le document.

Reconstitution des peuplements

La reconstitution de peuplements (ensembles d'espèces végétales qui vivent dans un même milieu biogéographique, NDLR) sinistrés par la sécheresse et les maladies provoquées par cette dernière, comme la chalarose, un champignon qui touche les frênes du Pas-de-Calais, représente à elle seule 360.000 hectares, selon le rapport. Il faudrait compter par ailleurs 650.000 hectares de plantations "dans les peuplements les plus vulnérables", mais pas encore condamnés, précise-t-il. Enfin, pour boiser les friches ou les terres concernées par la déprise agricole, le rapport préconise de planter 750.000 hectares sur 30 ans. Au total, le besoin global est de "8,8 milliards d'euros sur 30 ans, soit en moyenne 300 millions d'euros par an", estime le rapport, ce qui est "très éloigné des moyens actuellement dédiés au boisement ou au reboisement mobilisés par l'État, les régions et les fonds européens qui sont d'environ 20 millions", ajoute-t-il.
"Il s'agit d'hypothèses conservatrices", a souligné dans un entretien à l'AFP Anne-Laure Cattelot. "Si on se retrouve avec un accroissement des besoins de ressources en bois dans la construction et d'un autre côté un dépérissement qui accélère la perte de la ressource bois et de ce super puits de carbone, on se retrouve le bec dans l'eau, c'est pour ça qu'il faut investir dans la forêt", a-t-elle déclaré. Elle a salué l'enveloppe de 150 millions d'euros pour le reboisement, annoncée récemment par le ministre de l'Agriculture dans le cadre du plan de relance de l'économie : "C'est déjà un très beau montant, il va falloir lancer un dispositif et que les forestiers s'en emparent", a-t-elle appuyé.
Le rapport préconise aussi d'"augmenter rapidement de 200.000 hectares les forêts sous gestion durable" et d'"engager la protection forte de 180.000 hectares de forêt tropicale en Guyane". Il appelle en outre à "tripler les quantités de bois de France dans la construction française d'ici 2050" en réduisant parallèlement "la déforestation importée par notre économie pour étendre aux forêts mondiales les pratiques de gestion durable appliquées à notre patrimoine forestier". Il recommande également de "soutenir l'innovation et favoriser l'investissement des scieries et des industries de la transformation pour qu'elles se modernisent, gagnent en compétitivité et soient adaptés à la forêt française telle qu'elle est et telle qu'elle sera demain".

Une "grande Agence nationale des forêts"

Autre proposition importante du rapport : la création d'une "grande Agence nationale des forêts regroupant tous les services d'appui techniques à la gestion durable des forêts, reprenant notamment les missions de l'Office national des forêts, en charge avec les communes forestières, des forêts publiques, et celle du Centre national de la propriété forestière, qui accompagne et conseille les forêts privées." "Cette Agence nationale des forêts sera l'interlocuteur unique pour la mise en œuvre de la politique forestière, détaille Anne-Laure Cattelot dans son avant-propos du rapport. Elle portera le fonds pour l'avenir des forêts. Elle interviendra en appui aux régions à qui je souhaite confier un rôle renforcé dans la déclinaison de la politique forestière nationale et son adaptation aux spécificités des territoires."