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Refondation de l'école - Fonds spécifique sur les rythmes scolaires : communes riches, communes pauvres, tout le monde est éligible !

La semaine des 4,5 jours, les maires ont été tout de suite pour (pour le bien de l'enfant, en l'occurrence)... sur le principe. Sur la mise en oeuvre, ils ont très vite manifesté des inquiétudes, puis des revendications, avant de recourir au chantage, sur fond de vieux clivage urbain-rural. Tout le monde voulait sa part des 250 millions d'euros destinés à accompagner les premières collectivités qui se lanceraient. Et tout le monde y aura droit, a rassuré Jean-Marc Ayrault six jours avant Noël.

Depuis la mi-décembre, les élus locaux et leurs représentants étaient montés d'un cran dans l'expression de leurs inquiétudes quant à la mise en œuvre de la réforme des rythmes scolaires et la distribution du fonds spécifique de 250 millions d'euros destiné à les accompagner dans la démarche. La déclaration de Bertrand Delanoë le 17 décembre sur les ondes de France Inter avait attisé un clivage urbain-rural, Paris-province, villes riches-villes pauvres… qui n'avait pas besoin de cela.
Annonçant qu'il était tout disposé à passer à la semaine des 4,5 jours dès la rentrée 2013, le maire de Paris s'était plaint de ne pas être sûr d'en avoir les moyens. "Je veux y mettre les moyens nécessaires (mais) je ne suis pas sûr de les avoir", avait-il expliqué, anticipant que la capitale "ne sera peut-être pas la mieux dotée" pour bénéficier du fonds spécifique. Quelques jours avant, les élus de la montagne avaient fait savoir qu'ils craignaient une "OPA de collectivités riches sur le fonds de 250 millions d'euros" et menaçaient également de ne pas appliquer la réforme. En des termes moins radicaux, toutes les associations d'élus avaient tour à tour exprimé leurs inquiétudes et brandi ce genre de menace.

Toutes éligibles

Il était donc grand temps que le gouvernement calme le jeu. Chose faite le 18 décembre, par Jean-Marc Ayrault, dans un courrier adressé à six associations d'élus locaux (*). Il y en aura donc pour tout le monde : les communes riches, les communes pauvres, les communes urbaines, les communes rurales, les communes de montagne, les communes de plaine… quelles que soient les capacités budgétaires. Les montants seront toutefois différents.
Si elles s'engagent à appliquer la réforme dès la rentrée prochaine, toutes les communes "sans distinction" seront éligibles à une aide forfaitaire de 50 euros par élève. Une majoration de 40 euros par élève sera réservée aux "communes urbaines ou rurales les plus en difficulté, en l'occurrence les communes bénéficiant de la DSU cible ou de la DSR cible". Ces dernières bénéficieront donc d'une aide de 90 euros par élève. Ce qui satisfait "globalement" les grandes villes qui, dans un communiqué, rappellent incidemment qu'elles avaient chiffré le coût de la réforme à 150 euros par enfant.
Les communes qui n'appliqueront la réforme qu'à la rentrée 2014 ne pourront le faire que sur dérogation. Aux dernières nouvelles (mais la lettre de Jean-Marc Ayrault ne le précise pas), les communes auraient jusqu'aux alentours du 1er mars pour déposer leur demande de dérogation. Quoi qu'il en soit, les communes qui choisiront 2014 ne pourront pas bénéficier de l'aide forfaitaire. Celles relevant de la DSU ou de la DSR "cibles", même "retardataires", bénéficieront en revanche d'une aide de 45 euros par élève, même si elles ont déjà bénéficié de l'aide l'année précédente.
Une annonce plutôt bien accueillie par les petites villes, qui anticipent toutefois que les dotations de l'Etat diminueront dès 2014, et que les conséquences de cette réforme pèseront sur les budgets des communes bien au-delà. L'APVF demande donc que "l'aide financière ciblée vers les communes les plus en difficulté soit maintenue après la première année d'application des nouveaux rythmes scolaires, et ce, pour une durée raisonnable".
Question financement, le Premier ministre n'a pas précisé dans sa lettre le montant du fonds. L'enveloppe de 250 millions d'euros, annoncée par François Hollande au congrès des maires, semble bien étroite au vu des nouvelles promesses. D'ailleurs, Vincent Peillon avait laissé entendre que le montant de ce fonds pourrait être plus important, dans un entretien le 17 décembre à Libération. A moins que la règle du "premier arrivé, premier servi" ne s'applique...

Le sésame du projet éducatif territorial

Un décret, signé des ministres de l'Education nationale, des Sports et de la Famille, prévoira " à titre transitoire, un assouplissement du taux d'encadrement en centre de loisirs, sous réserve toutefois d'un encadrement de ce dispositif dans un projet éducatif territorial validé par les autorités académiques".
La formalisation de ces projets éducatifs territoriaux, ainsi que la conception et la mise en place des dispositifs d'accompagnement éducatif, seront accompagnés par les Dasen et les IEN (inspecteurs de l'Education nationale). "Ces projets pourront notamment prévoir que les activités éducatives soient proposées aux enfants dans le prolongement de la pause méridienne de façon à simplifier l'organisation du service des agents auxquels vous en confierez la responsabilité", écrit Jean-Marc Ayrault. Vincent Peillon avait annoncé dans Libération qu'"avec des projets territoriaux éducatifs, les gens discuteront localement", soit pour rallonger la pause déjeuner, ou sortir à 15H00 ou 15H30 pour aller visiter un musée ou pratiquer un sport. Le ministre de l'Education nationale anticipait alors que la moitié des écoliers français passeront à la semaine des 4,5 jours dès 2013. L'AMGVF a comptabilisé parmi ses membres, au moins 13 villes déjà prêtes à s'engager : Angers, Aubervilliers, Bourges, Brest, Dijon, Grenoble, Montreuil, Nantes, Rennes, Rouen, Saint-Denis, Strasbourg, Toulouse.


Trois heures pour les communes

La création du fonds spécifique d'aide fera l'objet d'un article de la loi sur la refondation de l'école qui sera présentée fin janvier en Conseil des ministres, avant un débat parlementaire en mars. Les rythmes ne figurent pas dans la loi mais feront l'objet d'un décret.
Les textes en préparation, rappelle Jean-Marc Ayrault dans sa lettre, prévoient une journée au cours de laquelle les enseignements durent au plus cinq heures et demie, et une semaine d'au moins neuf demi-journées de classe. Les élèves bénéficieront d'activités à caractère éducatif entre la fin des enseignements et l'heure normale de sortie de l'école maintenue à 16h30. Un temps éducatif estimé à une heure quotidienne soit 4 heures par semaine. "Une partie sera assurée par les enseignants dans le cadre normal de leur service mais l'autre, estimée à trois heures par semaine dont une part avec le concours des enseignants, relèvera de la responsabilité des communes ou des intercommunalités en cas de regroupements pédagogiques intercommunaux".

Valérie Liquet

(*) Association des maires des grandes villes de France (AMGVF), Association des petites villes de France (APVF), Association des maires de France (AMF), Association des maires ruraux de France (AMRF), Fédération des villes moyennes (FVM), Association des communautés urbaines de France (Acuf).
 

 

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