Fonds social européen : la Cour des comptes alerte sur la gestion des crédits
Dans un récent référé, la Cour des comptes pointe que le taux d’erreur des dépenses présentées au remboursement sur crédits du fonds social européen a atteint 11,68% en 2018/2019. Elle relève aussi une application peu sécurisée de la réglementation sur les aides d’État.
7,5 milliards d’euros. Tel est le montant des aides issues du plan de relance européen qui seront versées à la France en faveur de l’insertion et de la formation professionnelles. Un montant substantiel qui transitera notamment via le Fonds social européen (FSE). La Cour des comptes, qui s’est penchée sur l’utilisation antérieure des crédits issus de ce fonds, met cependant en garde contre des faiblesses de gestion côté français qu’il "convient de surmonter rapidement" pour en "bénéficier pleinement".
Dans un référé publié fin septembre, la Cour des comptes relève en effet, dans le rapport des comptes 2020 portant sur l’exercice 2018-2019, un "taux d’erreur total extrapolé de 11,68%" sur l’exercice 2018-2019, très largement supérieur au taux de 2% toléré par la Commission européenne. "68 irrégularités sur l’échantillon d’opérations auditées ont ainsi été relevées, qu’il s’agisse d’erreurs dans l’application des régimes d'aides d'État, de justificatifs manquants ou incorrects, d’irrégularités liées à la passation de marchés publics, de l’existence de dépenses non rattachables à un projet donné, voire de dépenses inéligibles ou encore du non-respect du principe de bonne gestion financière", écrit la Cour des comptes. Des impairs qui ont occasionné des "corrections financières" (annulation totale ou partielle) à hauteur de 66,86 millions d’euros pour la France, ainsi qu’une interruption des remboursements sur les dépenses en 2020, levée depuis.
Si le taux d’erreur a fortement diminué ensuite, la Cour des comptes relève qu’il s’élève aujourd’hui à 4,37%, privant la France de la simplification des procédures s’appliquant aux États dont le taux est inférieur à 2%. Dans sa réponse au référé, le ministère du Travail insiste sur le caractère exceptionnel de l’exercice comptable 2018-2019. Il ajoute que les conclusions du rapport de la Commission interministérielle de coordination des contrôles - l’autorité officielle d’audit des fonds communautaires en France - ont été contestées par la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP), qui assure à la fois la gestion des fonds, mais aussi les audits d’opérations. Un double rôle auquel la Cour des comptes recommande de mettre fin en retournant cette mission d’audit à la CICC.
Aides d’État au titre de services d’intérêt économique général
Certains rejets de dépenses ont été liés à la question des aides d’État. "Il importe de démontrer sans tarder que les structures de l’insertion par l’activité économique (SIAE), notamment les ateliers et chantiers d’insertion, principaux bénéficiaires, peuvent remplir l’ensemble des critères constitutifs d’un service d’intérêt économique général (Sieg)", conclut la Cour des comptes. Les cofinancements du FSE exigent en effet une méthode de calcul de la compensation financière versée à ces structures au titre du Sieg, et l’absence de surcompensation au-delà d’un bénéfice raisonnable.
Or la DGEFP "se contente de s’assurer que le montant des ressources n’excède pas celui des dépenses exposées par les structures contrôlées", selon la Cour des comptes. "La subvention FSE ne peut excéder ce qui est nécessaire pour couvrir les coûts occasionnés", répond le ministère, ajoutant qu’"aucun bénéfice n’est généré et il ne peut donc être exigé de contrôler si celui-ci est raisonnable".
Sur le même sujet, la Cour des comptes relève aussi "un pilotage et un suivi consolidé insuffisant", qui s’est manifesté dans la période récente de la pandémie. Alors que l’Union européenne a desserré les contraintes pour verser des aides dans le contexte de la pandémie, la Cour des comptes observe que le ministère du Travail de l’Emploi et de l’Insertion "a rencontré des difficultés pour renseigner dans les délais demandés le montant des aides versées".