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Politique de cohésion - Fonds régionaux : la France veut réduire la voilure

Dans son rapport adressé à la Commission, la France veut mettre la priorité sur une réduction des crédits de la politique de cohésion après 2014. Elle se montre réservée sur la création de "régions intermédiaires" qui pourrait rapporter 3 milliards d'euros aux régions françaises concernées.

Il faut attendre la dernière des 18 pages du rapport sur l'avenir de la politique de cohésion que la France vient de remettre à Bruxelles pour connaître ses intentions. Paris y explique que, pour la période qui s'ouvrira en 2014, l'éventuelle création d'une nouvelle catégorie de régions intermédiaires ne doit pas remettre en cause  "l'objectif prioritaire d'une baisse de la part du budget européen dédié à la politique de cohésion". Dans le débat qui se joue en ce moment, entre le budget de la politique agricole commune et celui de la politique de cohésion, Paris affiche ainsi clairement sa préférence pour une PAC forte. La France considère que la sortie mécanique d'un certain nombre de régions de l'objectif de convergence destiné aux plus pauvres d'entre elles, ne justifie plus le maintien du budget actuel (ces crédits de rattrapage concentre aujourd'hui 80% de fonds de la politique régionale). L'économie envisagée est en effet de 43 milliards d'euros. Quant à la création de ces régions intermédiaires, le rapport de la France se montre pour le moins réservé. "La perspective d'instaurer une nouvelle catégorie de régions intermédiaires, destinée à remplacer ces mécanismes de transition, ne peut être traitée indépendamment de la question de l'enveloppe financière allouée à la politique de cohésion et de l'évolution globale du budget européen", peut-on y lire. Et au cas où cette option serait envisagée, Paris réclame qu'elle le soit "avec des intensités d'aide nettement inférieures à ce qui est exigé dans la convergence" et sans "préjuger des réformes qui pourraient intervenir ultérieurement".

"Enterrement de la politique de cohésion"

Cette prise de position a provoqué une vive surprise. Tout d'abord parce qu'à l'occasion du Forum sur la cohésion, venu ponctuer, le 1er février, la vaste consultation engagée par Bruxelles sur le cinquième rapport sur la politique de cohésion (document qui sert de base aux négociations en cours), le délégué interministériel à l'aménagement du territoire, avait démenti toute volonté de la France de sacrifier la politique de cohésion. Et puis parce qu'elle va à l'encontre des préconisations adressées en janvier par quatre eurodéputés PPE à Bruno Le Maire. Dans leur courrier, les quatre députés français estimaient que la proposition de la Commission de créer une catégorie intermédiaire entre convergence et compétitivité pour les régions dont le PIB serait situé entre 75 et 90% de la moyenne européenne constituait une "chance à saisir". "Actuellement dans l'objectif de compétitivité [destiné aux régions les plus riches, NDLR] vous avez des régions à 76% du PIB moyen et d'autres à 220%, il serait bon de créer une catégorie intermédiaire", insiste la députée PPE Sophie Auconie.
Et si la France a fait le choix de privilégier la PAC, dans un contexte budgétaire serré, rien n'est acquis dans ce domaine. Certes elle va dans le sens de l'Allemagne, fermement opposée à l'idée de régions intermédiaires, sachant que les deux principaux contributeurs du budget européen ont arrêté une position commune sur la PAC. Mais "il faudrait que la France soit suivie au plan européen, or rien n'est moins sûr, car les pays de l'Est sont très attachés à la politique de cohésion, on leur donne un signe qui n'est pas très courtois", prévient l'eurodéputée socialiste Estelle Grelier, par ailleurs vice-président de l'ADCF (Assemblée des communautés de France) en charge des questions européennes. Pour le groupe des socialistes français au Parlement, c'est "l'enterrement de la politique de cohésion".

Une manne de 3 milliards d'euros

Le commissaire à la politique régionale Johannes Hahn, s'était récemment étonné du peu de soutien accordé par la France au principe de régions intermédiaires. Car, paradoxalement, la France serait la première à en bénéficier, avec pas moins de huit régions françaises concernées. Une manne de 3 milliards d'euros est en jeu. Sept d'entre elles (Basse-Normandie, Corse, Languedoc-Roussillon, Limousin, Lorraine, Nord-Pas-de-Calais, Picardie) ont d'ailleurs plaidé leur cause auprès de Bruxelles, faisant valoir "un taux de chômage plus élevé que la moyenne nationale et un tissu économique peu dynamique". "Il existe donc un réel risque de décrochage de nos régions si elles ne reçoivent pas une réponse adaptée et un soutien adéquat pendant la prochaine période de programmation", avaient-elles prévenu, dans une contribution adressée à la Commission, le 1er février. Mais pour la France, accepter cette manne financière, ce serait s'affaiblir d'autant vis-à-vis des détracteurs de la PAC. L'arrivée d'un secrétaire d'Etat à l'Aménagement du territorie qui semble se profiler permettrait de sortir de l'ambiguïté française. Mais pour de nombreux députés, la solution à long terme passe par des ressources propres. "Il faut cesser d'opposer la PAC et la politique de cohésion, qui oeuvre ô combien en termes de compétivité, insiste Sophie Auconie. Je préconise des ressources propres à l'Europe, ce qui permettrait de soutenir ces politiques, sans augmenter la contribution des Etats membres." 

 

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