Fonds Barnier : la réglementation se met à jour
Deux décrets, parus ce 30 avril, tirent les conséquences des évolutions introduites en loi de finances concernant le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit "Fonds Barnier", et principalement de sa budgétisation. Pas de véritable bouleversement, mais un sérieux toilettage pour plus de lisibilité, en particulier s’agissant des taux, plafonds et durées des mesures de financement.
Deux décrets, publiés ce 30 avril au Journal officiel, en application de la loi de finances pour 2021, mettent notamment en œuvre l'intégration du fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit "Fonds Barnier", au budget général de l’État. Un premier décret en Conseil d’État abroge ou supprime en conséquence les dispositions relatives à sa gestion comme fonds de nature extrabudgétaire (articles. R.561-6 à R. 561-10 et R. 561-12 à R. 561-14 du code de l’environnement). Il simplifie au passage la procédure d'expropriation des biens exposés à un risque naturel majeur (art. R. 561-2 et suivants), en chargeant le préfet de la piloter intégralement. Enfin, il abroge les dispositions relatives au conseil d'orientation des risques naturels majeurs (articles R. 565-8 à R. 565-13), qui relèvent désormais du décret simple publié concomitamment (articles D. 565-8 à D. 565-13 nouveaux).
Ce second décret précise les taux, les plafonds et les durées des mesures du FPRNM (articles D. 561-12-1 à D. 561-12-11 nouveaux). On y relève notamment la reprise des différents taux de participation du fonds Barnier inscrits en loi de finances pour 2004 et pour 2006, qui avaient fait l’objet de retouches successives et multiples dans les PLF ultérieurs, sans les codifier, et en avaient fait perdre leur lisibilité. Pour certaines actions de prévention des risques naturels et hydrauliques, la participation du fonds est également "améliorée", insiste la notice du texte. Un premier cap avait d'ailleurs été franchi avec le décret pris fin 2019 (lire notre article du 9 décembre 2019) suite aux violentes inondations dans le sud-est de la France.
Acquisition à l’amiable
Le fonds peut notamment financer, dans les mêmes conditions que l’expropriation, l’acquisition amiable par une commune, un groupement de communes ou l'État d'un bien exposé - sous réserve que le prix de l'acquisition amiable s'avère moins coûteux que les moyens de sauvegarde et de protection des populations - ou d'un bien sinistré à plus de la moitié de sa valeur par une catastrophe naturelle. Pour rappel, la commune doit prendre une mesure réglementaire déclarant les terrains acquis inconstructibles dans un délai de trois ans. L’acquisition amiable comme l’expropriation des biens à risque est déplafonnée. Par contre, la valeur de biens sinistrés acquis à l’amiable est limitée à 240.000 euros par unité foncière (pas de changement ici). La contribution du fonds au financement des mesures nécessaires pour remettre en état les terrains, limiter l'accès à ces terrains ou empêcher toute occupation des biens expropriés ou acquis (à raison de 100% des dépenses éligibles) n'est pas comprise dans ce plafond de 240.000 euros. Les expropriations et acquisitions amiables effectuées par un établissement public foncier (EPF), et financées par le fonds, sont conditionnées à la signature d'une convention cadre avec l'État et de conventions opérationnelles avec les communes concernées ou leurs groupements. Le texte reprend également - à droit constant - la contribution au relogement de personnes exposées à un risque majeur. Sachant qu'en la matière, un refus d'une proposition d'acquisition amiable du bien entraîne la fin de la prise en charge.
Études et travaux rendus obligatoires par un plan de prévention des risques naturels (PPRN)
Le fonds contribue par ailleurs au financement des études et travaux de prévention contre les risques naturels dont les collectivités territoriales assurent la maîtrise d'ouvrage, et ce dans les communes couvertes par un plan de prévention des risques naturels prévisibles (PPRN) approuvé ou prescrit. Ce financement s'applique néanmoins aux études et actions réalisées sur le territoire de communes qui ne sont pas couvertes par un tel plan mais qui bénéficient à des communes couvertes par ce type de plan. Les taux de couverture de ces dépenses - repris à droit constant - varient selon la nature des demandes tout en étant plus importants lorsque le PPRN a été approuvé, et atteignent jusqu'à 50% du total.
Le fonds participe également au renforcement sismique des bâtiments accueillant du public aux Antilles, dans le cadre du plan Séisme Antilles (PSA). Aux termes du décret, dès lors que les opérations ont fait l'objet d'un engagement de l'État "avant le 31 décembre 2027", le fonds participe (jusqu'à 50%) au financement des études et travaux de prévention du risque sismique pour les bâtiments, équipements et installations nécessaires au fonctionnement des SDIS (services départementaux d'incendie et de secours) ainsi qu'aux travaux de confortement des habitations à loyer modéré (à un taux maximal de 35%). Pour les établissements d'enseignement scolaire, ce plafond demeure à 60%.
Cavités souterraines
Le plafond est de 80% pour les opérations de reconnaissance et travaux de comblement des cavités souterraines (déduction faite des éventuelles indemnités d'assurances perçues pour le même objet), dès lors que ce traitement est moins coûteux que l’expropriation, et ce sans dépasser 36.000 euros par bien ni être supérieure à 50% de la valeur vénale du bien, précise le décret. Cette mesure est mobilisable pour les biens couverts par un contrat d'assurance dommages aux biens et si un danger est avéré pour les constructions ou les vies humaines. Les travaux de prévention et de protection relatifs aux infrastructures de transport et aux réseaux ne peuvent en revanche être pris en charge par le fonds.
Travaux menés dans le cadre des Papi
Les dépenses d'études et de travaux rendus obligatoires par un PPRN approuvé peuvent elles aussi être couvertes par le fonds, qui participe en outre à ceux menés dans le cadre des programmes d'actions de prévention contre les inondations (Papi) sur les biens des particuliers et des PME.
La contribution est alors plafonnée (déduction faite des éventuelles indemnités d'assurances perçues pour le même objet) à 50% pour les études de diagnostic de la vulnérabilité des biens ; à 20% des dépenses éligibles réalisées sur des biens utilisés dans le cadre d'activités professionnelles, dans la limite de 10% de la valeur vénale du bien ; à 80% des dépenses éligibles réalisées sur des biens à usage d'habitation ou à usage mixte, dans la limite de 10% de la valeur vénale du bien (à nouveau sans pouvoir dépasser 36.000 euros par bien ni être supérieure à 50% de la valeur vénale du bien). La liste des types de travaux de réduction de la vulnérabilité aux inondations des biens relève d'un arrêté.
Plusieurs dépenses visant à assurer une meilleure connaissance du risque et à informer sur la prévention peuvent être prises en charge jusqu'à 100%. Le décret reprend aussi la participation du fonds Barnier aux mesures de réduction de la vulnérabilité face aux risques à la charge de l’État. Et en particulier, le financement (plafond de 100%) des études et travaux de mise en conformité des digues domaniales de protection contre les crues et les submersions marines, ainsi que des digues dont la gestion a été transférée de l'État à une collectivité territoriale après le 1er janvier 2018. Pour cette dernière catégorie - sous réserve d'un engagement de l'État "avant le 31 décembre 2027" -, la contribution est plafonnée à 80% de la dépense.
Références : décret n° 2021-516 du 29 avril 2021 portant abrogation de certaines dispositions relatives à la prévention des risques naturels majeurs (partie réglementaire du code de l’environnement) ; décret n° 2021-518 du 29 avril 2021 relatif au fonds de prévention des risques naturels majeurs (modification de la partie réglementaire du code de l’environnement), JO du 30 avril2021, textes n° 5 et 7. |