Fonction publique : Laurent Marcangeli "ne ferme pas la porte" à une "négociation salariale"

Alors que les contraintes budgétaires vont croissant, l'hypothèse d'une négociation sur les salaires des agents publics n'est pas d'emblée exclue par le ministre de la Fonction publique. Son directeur de cabinet l'a assuré lors d'une réunion avec les syndicats, qui portait sur le menu des prochaines discussions avec eux. Qualité de vie au travail, égalité professionnelle, logement des agents… les priorités de Laurent Marcangeli ont été dévoilées à cette occasion.

"La porte à une négociation salariale [concernant le secteur public] n’a pas été fermée", a déclaré l'entourage du ministre de la Fonction publique, le 18 mars à l'issue d'une réunion de plus de deux heures et demi avec huit organisations syndicales. Absent, le ministre Laurent Marcangeli était représenté par son directeur de cabinet, Arnaud Lacaze.

L'ouverture d'une négociation sur les salaires des agents "dépendra de plusieurs facteurs" : "son ciblage et sa portée, la préparation d’ensemble du budget 2026 et son cadrage, etc.", ont précisé à la presse les proches de Laurent Marcangeli, en évoquant cette réunion qui portait sur l'Agenda social, c'est-à-dire le programme des prochaines discussions entre le gouvernement, les syndicats et les employeurs publics.  "Aucun sujet abordé par les syndicats n’a été exclu", ont-t-ils par ailleurs indiqué.

"Tout n'est pas fermé", a confirmé Mylène Jacquot, secrétaire générale de la CFDT Fonction publique, à la sortie de la rencontre. Le troisième syndicat de la fonction publique a réclamé l'organisation d'un "rendez-vous salarial" en 2025 pour discuter de "mesures" favorables au pouvoir d'achat des agents, à mettre en œuvre cette année et en 2026. "Cela a toujours existé, il n'y a qu'en 2024 qu'il n'y en a pas eu", a souligné la responsable syndicale, interrogée par Localtis. Le syndicat réformiste voudrait "à terme" que "des négociations annuelles obligatoires" aient lieu dans la fonction publique, comme cela existe dans le secteur privé.

État des lieux des rémunérations 

À l'instar de la CFDT, les autres syndicats ont mis l'accent sur la nécessité de mesures en faveur du pouvoir d'achat des agents publics. "La priorité c'est la question des rémunérations" avec l'ouverture d'une négociation sur les salaires, a souligné Sylviane Brousse, responsable de la CGT Fonction publique, après la réunion. Des "mesures d'urgence" sont nécessaires, a plaidé la secrétaire générale de Solidaires Fonction publique, Gaëlle Martinez. Dans une lettre ouverte au ministre, rendue publique avant le début de la réunion, l'intersyndicale déclarait refuser "que 2025 soit une nouvelle année blanche pour la fonction publique".

Les représentants des personnels se font toutefois peu d'illusions. Le directeur de cabinet du ministre a rappelé "que 2025 était très contraint et que 2026 risquait de l'être tout autant", pointe Mylène Jacquot. Et avant la rencontre, Laurent Marcangeli a confirmé dans un entretien au Nouvel Obs - celui-ci est daté du 13 mars - que, comme en 2024, n'y aura pas de "mesures générales de revalorisation" cette année. Concernant la garantie individuelle de pouvoir d’achat (Gipa) des fonctionnaires, il a aussi assuré qu'elle ne sera pas versée en 2025. Mais "le ministre souhaite faire avancer des sujets, il y aura des arbitrages à aller chercher", aurait affirmé son directeur de cabinet.

Dans un document que son cabinet a transmis aux organisations syndicales avant la réunion et que Localtis s'est procuré, le ministre proposait d'organiser les prochains échanges autour de huit thématiques. En tête de la liste : la question de la "rémunération" et de la "politique salariale", donc. L'idée est, dans un premier temps, de dresser un "état des lieux" et d'"élaborer un constat partagé". Un groupe de travail est annoncé "vers la mi-avril". Cela déboucherait sur des travaux menés "de mai à décembre 2025", en vue de "l'élaboration d'orientations sur plusieurs thématiques".

Projet d'accord sur la qualité de vie au travail

Cette fenêtre de discussions serait sans doute propice à une réflexion sur une refonte des grilles indiciaires, afin de leur donner plus d'amplitude, ce qui serait de nature à motiver les agents. "Je n'y suis pas opposé", avait déclaré le ministre au début de l'année devant les membres du conseil supérieur de la fonction publique territoriale.

Dans le même document, le ministre déclarait vouloir parvenir, à l'issue de travaux prévus jusqu'à la fin de l'année, à un "accord" sur la qualité de vie et les conditions de travail dans la fonction publique. Et ce, en s'appuyant sur un accord de méthode qui serait finalisé en mai.

Des négociations sur l'égalité professionnelle (qui se dérouleraient entre avril et septembre) et sur "le renforcement de la culture de l'inclusion et la responsabilisation des employeurs" en matière de handicap (lesquelles se tiendraient "tout au long de l'année 2025") sont par ailleurs évoquées.

D'autres thématiques figurent également parmi les priorités du ministre, sans que des négociations ne soient prévues : le logement des agents publics (qui donnerait lieu à des échanges "à partir de septembre"), la prévoyance en faveur des agents de l'État, ou encore la santé au travail (avec des travaux portant notamment sur la santé mentale et la santé des femmes).

Journée d'actions le 3 avril

La question du dialogue social serait enfin abordée sous le prisme de la préparation des élections professionnelles de fin 2026 et des "droits et moyens syndicaux".

Au-delà des "échanges de fond" entre le gouvernement et "les partenaires sociaux", l'Agenda social "vise à anticiper les transformations significatives des métiers et des compétences qui seront nécessaires pour répondre aux défis futurs", indique le ministère de la Fonction publique. En poursuivant : "Il doit contribuer à la mise en place de dispositifs de formation adaptés" et "faciliter les processus de reconversion professionnelle".

Le cabinet du ministre transmettra aux syndicats d'ici au 28 mars "une version amendée de l’agenda social, tenant compte des échanges très nourris" qui ont eu lieu lors de la réunion. Il assure que "les premiers groupes de travail thématiques pourront se tenir dès le mois d’avril".

Peu convaincues, la CGT, l'Unsa, la FSU et Solidaires ont appelé ce 19 mars les agents publics à "une journée d’actions, d’information et de mobilisation des personnels", qui aura lieu le 3 avril. "Nous n’accepterons pas une année noire pour la fonction publique et les agents publics en 2025", soulignent-ils dans leur communiqué.

› Retraites dans le public : des discussions sans les deux principaux syndicats

Les questions concernant les régimes de retraite des agents publics font l'objet de discussions qui se passent "en dehors" de la "délégation paritaire permanente" qui réunit depuis fin février les responsables syndicaux et patronaux sur la réforme des retraites. Dans un courrier du 26 février aux organisations syndicales et patronales, le Premier ministre a acté ce principe, du fait de la spécificité des règles s'appliquant aux pensions des agents publics. 

La première rencontre du "conclave" consacrée aux retraites du secteur public devait se tenir ce 19 mars dans l'après-midi. "Cette réunion est dépourvue d’ordre du jour précis. Le courrier du Premier ministre n’est accompagné d’aucun document. Il s’agit juste de recueillir des 'points d’attention'", indique Solidaires. Le syndicat a décidé de ne pas se rendre au rendez-vous, expliquant que le gouvernement a supprimé "toute marge de manœuvre" à la négociation. 

La CGT, premier syndicat dans la fonction publique, et Force ouvrière (deuxième syndicat) ont également indiqué qu'ils ne participeraient pas à la réunion de ce 19 mars sur les retraites des agents publics. "La discussion nous semble fermée après la déclaration du Premier ministre" dimanche écartant un retour de l'âge de départ à 62 ans, "je ne vois pas de quoi on pourrait discuter", a déclaré à l'AFP Sylviane Brousse, l'une des responsables de la CGT Fonction publique. De son côté, Force ouvrière n'entend pas "cautionner" ce qu'elle estime être "une véritable mascarade de négociation".

Deux autres réunions sur les retraites de la fonction publique sont prévues, le 16 avril et le 21 mai.

 

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