Finances publiques : une "conférence des finances publiques" se tiendra mi-avril

La France a terminé l'année 2024 avec un déficit légèrement moins élevé que prévu (5,8% du PIB). Le gouvernement n'entend cependant pas relâcher la pression sur les finances de l'ensemble de la sphère publique et notamment des collectivités. Les élus locaux seront vite fixés sur les intentions de l'exécutif : une conférence financière des territoires est annoncée pour "début avril". Peu avant une conférence des finances publiques qui sera présidée par le Premier ministre.

Petite embellie dans un ciel très sombre pour le gouvernement, s'agissant des finances publiques : le déficit public, qui était annoncé autour de 6% du produit intérieur brut (PIB) à la fin de 2024, s'est finalement élevé à 5,8%, selon les données encore provisoires publiées ce 27 mars par l'Insee. 

"Les dépenses ont été très bien tenues par le gouvernement de Michel Barnier" et "on a eu un peu plus de recettes que prévu dans les dernières semaines", a expliqué Éric Lombard, le ministre de l'Économie, ce même jour au micro de France inter. "Il y a eu un mouvement de responsabilité, notamment du fait des collectivités, qui ont modéré leurs dépenses face à la désinflation très rapide qui a fait baisser les recettes par rapport à ce qui était attendu", a indiqué pour sa part sa collègue chargée des comptes publics, Amélie de Montchalin, dans une interview à L'Opinion.

Le gouvernement ne veut cependant pas pavoiser. "Ce n'est pas une bonne nouvelle, c'est un déficit qui est trop élevé", a estimé le ministre de l'Économie. Éric Lombard s'est montré résolu à parvenir à un déficit public à 5,4% du PIB à la fin de l'année et à "continuer à réduire" ce dernier les années suivantes, pour passer en dessous de 3% en 2029.

"Trajectoire" pour les collectivités

"Nous allons le faire collectivement", a-t-il dit, en annonçant la réunion, le 15 avril, d'une conférence des finances publiques, qui sera présidée par le Premier ministre. "La situation budgétaire à fin mars" sera "partagée avec toutes les parties prenantes : les élus, les partenaires sociaux, les collectivités locales", en présence des "ministres en charge des éléments de dépenses". "Nous voulons que ce pilotage engage toute la nation, parce que c'est le budget de la nation dont nous parlons", a insisté le ministre.

Au début du mois, Bercy avait annoncé la tenue le 10 avril d'une réunion du "comité d'alerte", nouvelle structure associant l'ensemble des représentants des administrations publiques (voir notre article). Mais le plan semble avoir été ajusté, avec l'utilisation d'un vocable plus habituel, celui de "conférence des finances publiques".

Le sort des collectivités locales sera abordé au préalable - "début avril" - au sein d'une "conférence financière des territoires" organisée par le ministre de l’Aménagement du territoire, François Rebsamen, précise L'Opinion. Il s'agira de "fixer une trajectoire d’évolution des recettes et des dépenses des collectivités sur trois ans". Ce "devra être une instance de dialogue et de négociation et ne pas se réduire à une simple présentation des conclusions tirées à l’avance par l’État", a estimé l'Association des maires de France (AMF) sur le réseau social X, à l'issue d'un rendez-vous de son président, David Lisnard en début de semaine avec le ministre de l'Économie.

"Partenariat gagnant-gagnant"

Ce que le gouvernement pourrait mettre sur la table se dessine. Ce pourrait être un "partenariat vraiment gagnant-gagnant", comme le propose la ministre des Comptes publics dans L'Opinion. Amélie de Montchalin l'avait déjà laissé entendre la semaine dernière devant la commission des finances du Sénat (voir notre article). Le gouvernement, qui vise le respect de sa trajectoire budgétaire, attend de la "prévisibilité" sur l'évolution des dépenses des collectivités. Les élus locaux souhaitent de même de la "visibilité" sur leurs finances. Selon les dessins du gouvernement, chacun des partenaires pourrait ainsi s'engager à offrir à l'autre ce qu'il souhaite. Reste à savoir si des contrats seront formellement signés entre l'État et les collectivités.

Dans un bilan des finances locales en 2024 qu'il vient de rendre public, l'ancien rapporteur général du budget (Ensemble pour la République) Jean-René Cazeneuve propose la mise en place de tels contrats pour "les collectivités les plus importantes", avec des "objectifs pluriannuels de maîtrise des dépenses" et des règles encadrant "la dynamique des recettes locales". En somme des contrats de "Cahors" bis, du nom du dispositif qui avait encadré les finances des grandes collectivités, avant le début de la crise liée au Covid-19.

Le déficit des administrations publiques locales bondit à 16,7 milliards d'euros

Avec des dépenses restées dynamiques (+4,4%) et des recettes en berne, les administrations locales ont aggravé l'an dernier leur déficit public de plus de 7 milliards d'euros par rapport à 2023. 

À 169,6 milliards d'euros, soit 5,8% du PIB, le déficit public à la fin de l'année 2024 est en augmentation par rapport à 2023 (5,4%) et 2022 (4,7%). L'an dernier, les dépenses des administrations publiques ont augmenté de 62,8 milliards d'euros en 2024, soit +3,9%. Plus de 60% de leur croissance est liée aux prestations sociales, puisqu'elles ont progressé de 39,1 milliards d'euros (+ 5,5%). 

En hausse de 24,8 milliards d'euros (+6,9%), les retraites ont particulièrement cru. Quant aux intérêts de la dette, en hausse de 14,6%, ils ont alourdi la dépense publique de 7,4 milliards d'euros (5,2 milliards d'euros à la charge de l'État). L'organisme en charge des statistiques note encore que les dépenses des administrations publiques locales, bien qu’"en ralentissement" (+4,4% après +7% en 2023), sont restées "dynamiques", sous l'effet notamment d'un investissement local tonique (+7,6% dans l'ensemble et +11% pour les communes seules). La "stabilisation des prix de l'énergie" a en revanche contribué à modérer la hausse des dépenses locales, observe l'Insee.

En face des dépenses, les recettes ont accéléré à +3,1% - après +2,2% en 2023. Mais, en hausse de 6,7 milliards d'euros l'an dernier (contre +12,6 milliards d'euros un an plus tôt) les recettes des administrations publiques locales ont été "peu allantes". La TVA, qui occupe une place désormais déterminante dans les budgets des intercommunalités, départements et régions, a été "quasi stable" l'an dernier (+0,3 milliard d'euros, soit +0,1%). En outre, la baisse du produit des droits de mutation à titre onéreux (DMTO) perçus par les départements (principalement) et le bloc communal s'est poursuivie (-11,7%). Le versement mobilité et la taxe foncière se sont bien portés en revanche, avec des hausses respectives de 7,4% et 4,4%, en 2024. 

Au total, le "déficit" des administrations publiques locales a atteint 16,7 milliards d'euros l'an dernier, soit 7,2 milliards d'euros de plus qu'en 2023. "La dégradation du solde est principalement portée par les communes (-3,2 milliards d'euros) et les départements (-2,2 milliards), le solde des régions se dégradant "plus modérément" (-1,1 milliard d'euros), souligne l'Insee. Les organismes divers d’administrations locales (tels que la Société des grands projets et Île-de-France Mobilités), qui sont pris en compte dans le champ des administrations publiques locales ont vu leur déficit atteindre 0,9 milliard d'euros. Autrement dit, le déficit des administrations publiques locales a principalement été creusé par les collectivités.

À 3.305 milliards d'euros à la fin de 2024, la dette publique a atteint 113% du PIB (contre 109,8% fin 2023). "L’augmentation de la dette publique en 2024 résulte essentiellement de la hausse de la dette de l’État", précise l'Insee. Cette dette portée par l'État a progressé de 170,5 milliards d'euros en 2024. La dette des collectivités locales a connu une progression près de vingt fois inférieure (+8,9 milliards d'euros). "L’augmentation des emprunts est portée par les communes (+3,2 milliards d'euros), les départements (+2,3 milliards), et les régions (+3,4 milliards). La croissance de la dette des régions s’explique pour 1,1 milliard d'euros par "leurs nouvelles missions dans le cadre de l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire régional", précise l'Insee.

 

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