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Finances locales : la crise fragilisera rapidement les communes touristiques et d'outre-mer

Selon la commission des finances du Sénat, la crise pourrait très vite se traduire par une baisse des recettes de certaines collectivités, en particulier les communes touristiques et d'outre-mer. L'État a créé un "réseau de suivi" afin de repérer les collectivités en difficulté.

Les communes touristiques et les collectivités d'outre-mer pourraient voir rapidement les effets de la crise sur leurs recettes fiscales, alors que peu de solutions ont été identifiées pour y faire face. C'est le constat que dressent le président et le rapporteur général de la commission des finances du Sénat, respectivement Vincent Eblé (Soc) et Albéric de Montgolfier (LR) dans une note mise en ligne le 3 avril. Une note qui complète un tableau d'ensemble des effets de la crise sur les finances publiques - notamment celles du secteur local - dans lequel, fin mars (lire notre article), ils mettaient l'accent sur la baisse inéluctable, en 2020 et 2021 du produit des impôts économiques des collectivités (TVA, cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises et droits de mutation à titre onéreux).

Dans l'hypothèse d'un retour à la normale dès le début du mois de mai – qui semble être un scénario très optimiste – les communes, leurs groupements – et les départements plus marginalement – qui perçoivent la taxe de séjour pourraient accuser une perte de 80 millions d'euros sur le produit de cette taxe. Un montant à comparer aux 540 millions d'euros que celle-ci a généré en 2019.
La réduction des recettes de la taxe de séjour n'épargnera pas les communes touristiques d'outre-mer. Des collectivités qui devraient être aussi affectées par une réduction "certaine" de leurs recettes d'octroi de mer. En 2018, cet impôt qui grève les biens importés dans ces territoires représentait en moyenne 30% des recettes des communes d'outre-mer, selon un récent rapport parlementaire sur les finances locales en outre-mer.

Réseau de suivi et d'alerte

Initié par la direction générale des finances publiques (DGFIP) et les services du ministère de l'Intérieur, un "réseau de suivi, d’alerte et d’intervention concernant l’évolution immédiate des recettes et des dépenses des collectivités territoriales" a d'ores et déjà identifié ces risques. Mais ce réseau n'a pour l'heure pas beaucoup de solutions pour venir en aide aux collectivités qui connaîtraient de grosses difficultés. La DGFIP peut verser de manière anticipée des recettes fiscales. Mais ce n'est pas la panacée, puisque les collectivités concernées ne disposeront plus de recettes les mois suivants. Les services fiscaux préfèrent donc "inciter les collectivités territoriales à tirer sur les lignes de trésoreries dont elles disposent auprès des établissements bancaires." Mais, "aucune facilité particulière" n’est prévue à ce jour, dans ce domaine, pour le secteur public local, font remarquer les sénateurs. Ce que pointent aussi les élus des grandes villes et agglomérations (France urbaine). Ceux-ci ont demandé qu'une ordonnance accorde aux collectivités la possibilité de déroger, sans nouvelle délibération, aux plafonds de lignes de trésorerie qui ont été établis avant la crise.

Les travaux d'analyse conduits par le réseau de suivi et d'alerte sur l'évolution des dépenses locales mènent à une conclusion qui est a priori surprenante. Le volume des dépenses mandatées connaîtrait "une baisse significative." Deux explications se conjuguent : s'il n'est pas exclu que des collectivités aient du retard dans le paiement de leurs fournisseurs, certaines pourraient retarder l'engagement d'une partie de leurs dépenses pour préserver leur trésorerie.

Allègements de fiscalité pour les entreprises

De son côté, la commission des finances du Sénat observe que les collectivités territoriales "ont engagé de nombreuses dépenses pour soutenir tous les acteurs du territoire, en allant au-delà de leurs compétences propres." Les régions "ont d’ores et déjà mobilisé en propre près d’un milliard d’euros", en particulier pour venir en aide aux entreprises. 250 millions d'euros seront destinés au fonds national de solidarité, ouvert depuis le 1er avril aux très petites entreprises et aux indépendants. Une dépense qui pourra, exceptionnellement, être comptabilisée en investissement, comme le réclamait Régions de France (voir, dans cette édition, notre article dédié). Les régions ont été aussi "des acteurs majeurs dans la commande de masques", indiquent les sénateurs. Au 3 avril, les 18 régions avaient passé commande de "65 millions de masques pour près de 41 millions d’euros."

Certaines collectivités ont aussi choisi de diminuer ou annuler certains de leurs impôts sur les entreprises. C'est par exemple le cas de la métropole et de la ville de Toulouse, qui ont prévu notamment un allègement de 22 millions d'euros de la cotisation foncière des entreprises (CFE), au profit de 22.000 entreprises.

 

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