Financement de l'apprentissage : le ministère du Travail détaille toutes les nouvelles règles

Le ministère du Travail vient de publier un document attendu par les acteurs de l'apprentissage précisant toutes les modalités de financement des CFA à compter de janvier 2020, découlant de la loi du 5 septembre 2018. Fini la taxe d'apprentissage, place aux "coûts-contrats".

À partir du 1er janvier 2020, le système de financement de l'apprentissage va complètement changer, avec la fin de la taxe d'apprentissage et l'arrivée des "coûts-contrats". Pour tout comprendre de cette réforme découlant de la loi du 5 septembre 2018, le ministère du Travail a publié le 14 juin 2019 un document d'information intitulé "Les modes de financement des CFA", très attendu des CFA.
Jusqu'à présent, l'apprentissage est financé via la taxe d'apprentissage payée par les entreprises aux opérateurs collecteurs de la taxe d'apprentissage (Octa). Cette taxe est répartie en trois parts. Une partie est versée aux régions pour contribuer au financement des CFA (centres de formation des apprentis), selon les cartes de formation établies par les régions, une autre, le "quota", permet aux entreprises de financer les CFA et les sections d'apprentissage et une dernière, le "hors quota", est affectée aux écoles délivrant des formations initiales technologiques et professionnelles. À la taxe d'apprentissage s'ajoute la contribution supplémentaire à l'apprentissage (CSA) due par les entreprises d'au moins 250 salariés dont le nombre annuel moyen de salariés en contrat d'apprentissage/professionnalisation est inférieur à 5% de l'effectif annuel de l'entreprise.

Les CFA financés par les Opco

Avec le nouveau système, la fraction régionale de la taxe d'apprentissage est supprimée et la taxe est répartie en deux parts : une part égale à 87% pour le financement de l'apprentissage (ancien "quota") et une part égale à 13% pour financer des dépenses effectuées par l'employeur dédiées au financement des formations initiales professionnelles et technologiques hors apprentissage (ancien "hors quota"). 
Ces sommes destinées à l'alternance seront versées par les entreprises à l'Urssaf à partir de 2021, puis réparties entre les opérateurs de compétences (Opco), qui remplacent les actuels opérateurs paritaires collecteurs agréés (Opca), et France Compétences, l'agence qui remplace les instances nationales actuelles (Copanef, Cnefot, CNCP, FPSPP). D'un côté, les Opco financeront les CFA en fonction des contrats qu'ils prévoient, de l'autre, France Compétences versera des financements régionaux pour des dépenses de fonctionnement ou d'investissement, à travers des contrats d'objectifs et de moyens (COM) conclus entre les régions et les Opco.

Un financement au contrat

Le nouveau système prévoit aussi un paiement de la taxe en année N, alors que le système actuel fonctionne avec un décalage d'un an. Alors, pour faciliter la transition entre les deux systèmes, aucune taxe n'est due au titre des rémunérations de 2019.
Le financement par les Opco des CFA se fait donc au contrat, selon un niveau qui est "déterminé par la branche, après le cas échéant recommandations de France Compétences", rappelle le document du ministère du Travail, qui indique qu'une majoration de la prise en charge pour les personnes reconnues travailleurs handicapées, peut avoir lieu (dans la limite de 50% du forfait annuel), et qu'une possibilité de minoration est également envisagée quand il y a d'autres sources de financement public, pour le secondaire (en cours d'expertise). Les régions peuvent aussi compléter financièrement le niveau de prise en charge au titre du fonctionnement et de l'investissement aux CFA. Pour le premier - le fonctionnement -, le montant fait actuellement l'objet d'une concertation, souligne le document. Pour le second - l'investissement -, le montant et la répartition devront être fixés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2020.

Le détail du calendrier

L'Opco doit prendre en charge, dès lors qu'ils sont financés par les CFA, les frais annexes à la formation des apprentis : frais d'hébergement par nuitée (montant déterminé par l'Opco avec un maximum de 6 euros par nuit), frais de restauration par repas (montant maximum de 3 euros), frais de premier équipement (500 euros de plafond maximal). Il prend aussi en charge les frais de mobilité européenne et internationale en cas de mobilité de l'apprenti, à travers un forfait déterminé pour chaque contrat dont une période de mobilité est prévue. "Il existe une possibilité supplémentaire de prise en charge des Opco, selon sa politique (par décision du CA), des coûts supplémentaires liés à la mobilité (compensation de la perte de rémunération de l’apprenti, prise en charge de la protection sociale...)", ajoute le document du ministère qui détaille aussi les modalités de financement en fonction de la date de conclusion des contrats.
Les contrats signés avant 2020, dans le cadre d'un conventionnement régional, seront financés en 2019 par la région, puis en 2020 par les Opco à partir des coûts de formation publiés en préfecture en 2018 (avec une possible actualisation au 30 septembre 2019). A partir de 2020, les nouveaux contrats seront financés par les Opco à partir du niveau de prise en charge défini par les branches.
Pour ces contrats "hors convention régionale", il y aura trois cas possibles : soit le contrat d'apprentissage est préparé dans un nouveau CFA créé en 2019 hors convention avec le conseil régional, soit il est préparé dans une session supplémentaire non prévue par convention régionale mais ouverte dans un CFA sous convention régionale. Enfin, dernier cas : le contrat est créé dans une session existante et prévue par la convention régionale, mais dépasse le plafond de capacité d'accueil prévu par la convention régionale. Dans ces cas-là, le financement est assuré par l'Opco selon le niveau de prise en charge défini par la branche. Et les informations sur ces contrats sont enregistrées par les chambres consulaires, et transmis par les CFA aux Opco pour prise en charge financière.

Régions de France et CCI France attendent encore des réponses

Cette libéralisation du financement des CFA suscite toujours des inquiétudes. Au-delà de l'accompagnement nécessaire pour les familles, les jeunes, les entreprises mais aussi les CFA interprofessionnels et interbranches qui vont avoir affaire à plusieurs Opco, les régions et les chambres de commerce et d'industrie ont fait part de leurs craintes quant aux moyens qui seront alloués aux régions pour assurer l'équité territoriale et assurer le maintien d'une offre de formation sur tous les territoires, notamment pour les CFA de faible volumétrie (en raison de leur situation géographique ou des niches de métiers auxquels ils préparent). Dans un communiqué commun publié le 12 juin, Régions de France et CCI France demandent ainsi que le futur fonds de soutien aux régions destiné à cette mission soit "doté de moyens financiers suffisants et pérennes". "L'absence d'un fonds de soutien suffisant, à hauteur du montant initialement annoncé par le gouvernement de 250 millions d'euros, pourrait mettre à mal l'ensemble de la nouvelle organisation de l'apprentissage dans les territoires", indique le communiqué. Autres préoccupations : les modalités de prise en charge des frais liés aux transports des apprentis ou sur le financement de la qualité et de l'innovation pédagogique. Les deux réseaux demandent aussi au gouvernement de maintenir des moyens pour assurer le financement des développeurs de l'apprentissage.
Pour autant, de nombreux réseaux, à commencer par celui des chambres de métiers, se satisfont de ces nouvelles modalités de financement et avaient demandé d'avancer la date de mise en oeuvre à la rentrée de septembre 2019. Le ministère a préféré maintenir son calendrier.

 

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