Expérimentation du transfert aux départements de la santé scolaire : le contexte financier change la donne

Les départements "redoutent désormais de récupérer une compétence qui serait insuffisamment compensée par l'État", a indiqué le sénateur Hervé Reynaud, rapporteur d'une mission d'information sur la santé scolaire. Réalisée par Ernst & Young pour la délégation aux collectivités territoriales, une étude a mis en avant les avantages et inconvénients de différents scénarios d'évolution pour ce domaine qui est confronté à des difficultés d'attractivité des métiers et d’organisation. 

Le 20 mars 2024, la proposition de loi "visant à expérimenter le transfert de la compétence 'médecine scolaire' aux départements volontaires" (voir notre article du 15 février 2024) a été adoptée par le Sénat. Sa rapporteure, Françoise Gatel, alors présidente de la délégation aux collectivités territoriales, avait formulé un an plus tôt plusieurs propositions pour lutter contre l'inflation normative, dont la réalisation d'"études d’options" permettant d'évaluer l'intérêt d'adopter une nouvelle norme et d'envisager différents scénarios (voir notre article du 26 janvier 2023). La délégation aux collectivités territoriales a mis en pratique cette "démarche novatrice", en confiant au cabinet Ernst & Young une "étude d'options sur le transfert de la compétence 'santé scolaire'" - étude qui a été restituée aux sénateurs de la délégation le 12 décembre 2024. 

Différents scénarios analysés

Les auteurs de cette étude rappellent les défis auxquels est confrontée la santé scolaire : une pénurie de personnel (45% de postes de médecins scolaires vacants en 2022), des disparités territoriales, des besoins accrus depuis la pandémie de Covid-19 notamment en lien avec la hausse des troubles psychiques chez les jeunes, des "conditions de travail dégradées" et une "gestion à la fois complexe et cloisonnée" cela malgré des "efforts financiers de l'État". 

Différents scénarios d'évolution, avec leurs "forces et faiblesses", sont analysés : maintien de la compétence au niveau de l'État (toujours sous tutelle de l'Éducation nationale ou bien sous tutelle du ministère de la Santé et des agences régionales de santé), transfert aux départements, aux intercommunalités ou aux communes – ces options présentant un intérêt en termes de proximité notamment mais également "le risque d'accentuer les inégalités d'accès aux soins en fonction des disparités locales" -, ou encore la création d'un groupement d'intérêt public (GIP) État-collectivités pour  "mettre en commun des différents moyens relatifs à la santé scolaire et ainsi permettre une meilleure allocation des ressources".

"Un coût important" pour les communes ayant une délégation de l'État 

Concernant l’expérimentation du transfert de compétence, le contexte financier change la donne pour les départements. Alors que 40 départements s’étaient déclarés en 2023 prêts à expérimenter, seule la Nièvre serait désormais toujours volontaire, selon Hervé Reynaud (LR, Loire), rapporteur de la mission, citant devant ses collègues de la délégation des données fournies par Départements de France. Les départements "redoutent désormais de récupérer une compétence qui serait insuffisamment compensée par l'État", ajoute le sénateur. 

40 euros par enfant et par an

L’étude d’options réalisée par Ernst & Young rappelle que onze communes sont délégataires de missions de santé scolaire relevant de l'État. Ces communes font preuve d'un "volontarisme local" qui représente "un coût important", de l'ordre de 40 euros par enfant et par an alors que la subvention qui leur est versée par l'État pour cette délégation de compétence s'élève en moyenne à 9,50 euros, relève Hervé Reynaud. 

Pour le sénateur, cette étude d'options soulève ainsi d'autres interrogations, sur le bilan coûts-avantages de telles délégations, sur l'éventuelle nécessité d'élargir l'expérimentation proposée par la proposition de loi sénatoriale aux communes volontaires ou encore à des EPCI, ou encore sur la manière de faciliter l'exercice du métier des professionnels de la santé scolaire. 

 

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