Située sur un polder, Dunkerque établit la taxe Gemapi par anticipation (59)
Compétente sur la gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations (Gemapi) depuis le 1er janvier 2016, la communauté urbaine de Dunkerque a dès lors instauré la taxe afférente. Une décision facilitée par un travail de pédagogie sur la question de l'eau et du risque inondations mené auprès du grand public dès le début des années 2010.
Avec une altimétrie culminant à 7 mètres et des terres situées en-dessous du niveau de la mer, la communauté urbaine de Dunkerque est un territoire "poldérisé", gagné sur la mer depuis le XIIe siècle. Un ingénieux système de canaux, fossés drainants, ouvrages d'évacuation et système de pompage - "les wateringues" - évacue l'eau douce vers la mer à marée basse et l’empêche d'envahir le polder à marée haute. Sur la communauté urbaine de Dunkerque, le risque inondation relève ainsi soit de la submersion marine, soit continentale lorsqu'il est impossible d'évacuer les eaux douces. Pour autant, le dernier épisode majeur d'inondation date de 1953 et commence à disparaître des mémoires humaines. La tempête Xynthia de 2010 et les portés à connaissance de l’État sur les zones inondables des années suivantes ont relancé la réflexion sur ce territoire situé à la frontière belge.
Acculturer les populations au risque inondation
"Jusqu'à récemment, malgré l'omniprésence de l'eau sur notre territoire, c'est plutôt le risque industriel qui était repéré par les habitants et les élus, souligne la directrice environnement-territoires-transition énergétique à la communauté urbaine, Annick Tual. Depuis le début des années 2010, un très large travail d'acculturation au risque inondations a été mené, en lien avec plusieurs dispositifs opérationnels. Il s’agit de concevoir les contraintes comme des leviers de développement pour penser le territoire autrement."
Réveil de la mémoire collective
De 2012 à 2015 ont ainsi été menés un travail sur la mémoire collective des inondations sur le secteur de Gravelines avec des étudiants de l'université du littoral, une formation des élus avec le Centre européen de prévention des risques d'inondation (Cepri), des visites de terrains et retours d’expériences transfrontaliers avec le groupement européen de coopération territoriale (GECT), le lancement de deux programme de prévention des risques littoraux (PPRL), d'un programme d'action de prévention contre les inondations (Papi) mené à l'échelle du pôle métropolitain de la Côte d'Opale (PMCO)... En 2015, la loi Notr entérine la perte de compétence générale des départements : "Sa mise en œuvre nécessitait la refonte des statuts de l'institution interdépartementale des Wateringues, qui gère depuis 1973 le polder. Nous avons alors profité de cette occasion pour transférer l'ensemble de la compétence Gemapi."
Gestion en régie et transfert cohabitent dans l'exercice de la compétence
Le diagnostic Papi mené sur le territoire a permis de dresser un état des lieux détaillé de tous les ouvrages du territoire. La communauté urbaine a choisi de conserver en régie les ouvrages littoraux de prévention des inondations. "Nous avons récupéré la gestion directe de plusieurs ouvrages jusque-là propriété du grand port maritime ou du département du Nord, après avoir établi des conventions de transfert avec, préalablement, la remise en état des ouvrages". La gestion de ceux situés à l'intérieur des terres - ouvrages continentaux - a été confiée au nouveau syndicat mixte des Wateringues (ex-institution interdépartementale), qui s'étend sur 7 EPCI. Ce dernier confiant à son tour l'entretien des fossés drainants à ses "sections". Quant au volet milieux aquatiques, il reste en gestion directe.
Taxe Gemapi instituée dès la prise de compétence
Pour gérer et entretenir l'ensemble de ces ouvrages, la communauté urbaine a choisi de lever la taxe Gemapi dès sa prise de compétence, impôt affecté à un budget annexe Gemapi. "Le montant total attendu a été fixé à 3 millions d'euros, en fonction d'un programme d'entretien et d'investissement pluriannuel établi à 10 ans." Ventilée proportionnellement aux recettes procurées par les différents impôts locaux, la nouvelle taxe Gemapi constitue une hausse moyenne de fiscalité de 1,75%. Avec une cotisation moyenne de 5€ pour la taxe d'habitation, 10€ pour le foncier bâti, 12 € pour le foncier non bâti et 61 € pour la cotisation foncière des entreprises. "Compte tenu du travail préparatoire mené sur la question des inondations depuis plusieurs années, cette taxe n'a pas soulevé de remarques particulières ni de contestations au moment de son établissement" souligne la directrice. A noter que sur les 7 EPCI partenaires des Wateringues, 6 ont voté la mise en place de cette taxe.
Le travail se poursuit sur le volet milieux aquatiques
Si l'aspect risque inondation est aujourd'hui bien cadré et connu sur Dunkerque, il n'en est pas de même sur le volet milieux aquatiques. Aucun établissement territorial de bassin versant (EPTB) n'est opérant. C'est le grand chantier d'investigation pour les années à venir. "L'enjeu est de voir comment passer désormais au grand cycle de l'eau", conclut la directrice.
Communauté urbaine de Dunkerque
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Bertrand Ringot
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