Saint-Nazaire mise sur l'autogestion pour ses composteurs de quartier (44)
La communauté d'agglomération de la région nazairienne et de l'Estuaire (Carene) multiplie les initiatives en faveur du compostage pour réduire la production de déchets. L'une d'elles repose sur les habitants. Ce sont les « composteurs partagés de quartier ». Leur succès va grandissant sur la ville centre, Saint-Nazaire.
Un samedi matin comme beaucoup d'autres depuis près d'un an, à l'orée du parc paysager de Saint-Nazaire, des habitants du quartier se retrouvent avec leur « bio seau » de 10 litres, empli d'épluchures de légumes, de marc de café, etc.… Un à un, ils le déversent dans l'un des bacs aménagés pour cela. C'est le composteur « partagé » entre les habitants du quartier.
Au départ, une demande des habitants
Certains habitants viennent d'autres quartiers. « Peu importe », explique Monique Laugel. Elle est la référente du site, une habitante comme les autres, mais qui a un jour poussé la porte de la collectivité pour s'engager plus concrètement, c'était en novembre 2020. Monique a toujours un œil sur ce qui est jeté, elle conseille les nouveaux arrivants sur ce qui peut être composté ou non, forme d'autres au fonctionnement du site. Certains sont curieux et ont envie de s'investir un peu plus, par exemple en mélangeant les déchets ou en remuant les composts. D'autres, la majorité, déversent leur seau et s'en vont.
« Il est important de sensibiliser les gens pour qu’ils puissent aller au-delà du geste, qu’ils comprennent le processus de compostage. Ce n'est pas qu'une poubelle, mais un écosystème qu'on gère. À partir de là, un rapport à la terre se crée. On trouve le sens. Et on va plus loin ». Ces propos sont de Charles Guilgars. C'est le maître composteur de l'association Compostri. L'association nantaise est prestataire pour la communauté d'agglomération, mandatée notamment pour l'accompagnement de ces « composteurs partagés de quartier ». (1) La Carene oriente vers lui toutes les personnes intéressées par la démarche.
Un compostage de proximité
« Mon rôle est d'accompagner les citoyens porteurs de projets dans l'installation d'un site de compostage, que ce soit en pied d'immeuble, dans des copropriétés ou dans l'espace public pour des composteurs de quartiers comme celui-là », explique-t-il. Ces composteurs de quartiers ne sont donc installés que s'il y a une demande émanant d'habitants. La condition requise est qu'au moins cinq foyers s'engagent à venir déposer leurs déchets alimentaires. Cela permet d'enclencher la dynamique… en espérant qu'elle essaime. C'est ce qui arrive sur les quatre sites de composteurs partagés déjà installés sur l’espace public de la ville de Saint-Nazaire.
Appui technique et logistique
Charles Guilgars visite l’environnement avec eux pour trouver des espaces appropriés et envisager l’emplacement idéal : « on le choisit en fonction de la luminosité, du terrain, qu'il soit assez proche des commodités, pas trop isolé mais sans être trop près du voisinage ». Chaque site de compostage est dimensionné pour 25 foyers par silo, un silo étant composé de trois bacs. Cela représente un volume de 2 mètres cubes de compost.
Autogestion quotidienne
Une fois le site installé par la collectivité, Charles Guilgars continue à accompagner les habitants, mais ce sont eux qui font vivre le site, qui accueillent les autres habitants, ouvrent les bacs à compost, entretiennent le site, l'animent, s'organisent entre eux pour transférer le compost quand le bac est plein, etc. « C'est vraiment de l'autogestion par les habitants », insiste Charles Guilgars. Il reste en appui, « s'il faut changer une planche, réparer un toit cassé, ramener de la matière sèche pour équilibrer les déchets, etc. » Il offre un relais entre les habitants et la collectivité.
Une ouverture sociale
Cette autogestion donne au projet une dimension sociale quasi inéluctable. C’est l’association de quartier « Voisinade Mer et Jardins » qui est à l’origine de l’installation de ce site de compostage, et en assure également la gestion par les adhérents. Sur le site du parc paysager, l'association anime le lieu et propose de temps à autre un verre de l'amitié aux « composteurs » qui passent… La vie du site fait partie des animations du quartier mais c’est également un lieu d’échanges et de partages d’expériences, bien au-delà du quartier. C'est devenu un lieu de rencontres, où l'on se retrouve une fois par semaine et pas que pour parler compostage !
Des plages horaires modulables
Chaque site adopte son fonctionnement. Au parc paysager, les habitants ont choisi d’ouvrir le samedi matin. De 11 heures à 11 h 30. C'est Charles qui les a conseillés sur la durée. « Il faut avoir un créneau horaire pour éviter d'avoir une permanence trop longue » acquiesce Monique. Mais il est rare que le site ferme à 11h30 pile, « on discute » … D'autres sites ouvrent plusieurs fois par semaine, le mercredi ou le vendredi soir, cela permet à certains aussi de se déplacer là où les horaires sont le plus adaptés à leur emploi du temps.
Au fur et à mesure, le fruit de l'expérience porte à certaines adaptations ou ajustements. Par exemple, aucun site n'est plus en accès libre. Les bacs à compost sont cadenassés en dehors des plages d'ouvertures, dont les horaires sont bien précisés sur chaque site. Sinon « cela devient vite une déchetterie » pose Charles Guilgars. Monique confirme. « On a vu au départ des canettes, etc. ». Les gens venaient y déposer tout et n'importe quoi. Les cadenas n'empêchent pas, malgré tout, des dépôts sauvages. « Il faut régulièrement sensibiliser et c'est aussi pour cela que l'affichage autour du site est important », souligne Monique.
Monique a également fait poser une poubelle sur le site. Tout simplement pour pouvoir y jeter ce qui n'est pas recyclable. « On a vu des gens venir avec des sacs plastiques sous prétexte qu'ils étaient biodégradables » explique-t-elle.
Les premières semaines, la vigilance doit être forte pour nettoyer et éviter que le site ne soit identifié comme dépôt sauvage, avec tout ce que cela peut entraîner de gêne pour les riverains, et le risque que l'équipement soit lui-même rejeté. Car certains habitants ne voient pas ces sites de très bon œil. « Le compost ça pue, ça attire les rongeurs », entend Charles Guilgars « Mais quand c'est géré, qu'on maîtrise les gestes techniques, rien de cela n'est vrai », assure-t-il. C'est ce que les habitants découvrent au fur et à mesure.
Les bacs de compost du parc paysager ont réussi en quelques mois (et malgré le contexte sanitaire) à réunir déjà près d'une trentaine de réguliers. Bientôt se posera la question du dimensionnement du site.
(1) La Carene avait passé un appel d'offres, pour une durée de trois ans, de mai 2020 à mai 2023.
55 sites
55 sites de compost partagés étaient en place sur l'agglomération fin 2020.
La Carene finance tout le montage des projets menés par les habitants, avec l'appui de Compostri : outils, équipement, sensibilisation, accompagnement, etc.
Communauté de l'agglomération de la région nazairienne et de l'Estuaire
Nombre d'habitants :
Nombre de communes :
Thierry Noguet
Compostri
Charles Guilgars
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