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Handicap / Culture - Exception au droit d'auteur : un décret et un rapport pour un nouveau départ

Un récent décret indique aux bibliothèques les modalités à respecter pour être autorisées à reproduire - hors droit d'auteur - des oeuvres pour les adapter en vue d'en permettre la consultation à des personnes en situation de handicap aussi bien visuel, moteur, mental, cognitif... Parallèlement, un rapport de trois inspections (Igas, Igac et Igaen) fait le point sur la petite centaine de structures aujourd'hui agréées.

L'article 33 de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine (voir notre article ci-dessous du 12 juillet 2016) a repris en profondeur la question de l'exception handicap, en autorisant la reproduction - hors droit d'auteur - de toute œuvre par des moyens adaptés en vue "d'une consultation strictement personnelle de l'œuvre par des personnes atteintes d'une ou de plusieurs déficiences des fonctions motrices, physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques et empêchées, du fait de ces déficiences, d'accéder à l'œuvre dans la forme sous laquelle l'auteur la rend disponible au public". Un décret du 27 février 2017 met en œuvre cette refonte du dispositif, tandis qu'un rapport des inspections générales des affaires sociales (Igas), des affaires culturelles (Igac) et de l'administration générale de l'éducation nationale (Igaen) se penche sur les structures assurant l'adaptation des œuvres au bénéfice des personnes en situation de handicap.

Agrément des acteurs et rôle de la BnF

Le décret du 27 février 2017 précise les modalités d'établissement de la liste des personnes morales et des établissements qui peuvent assurer la reproduction et la représentation d'une œuvre dans le cadre de l'exception au droit d'auteur. Les demandes d'inscription sur cette liste sont instruites par la commission en charge de l'exception handicap, qui émet un avis sur la candidature. La commission émet également un avis sur les radiations de la liste, ainsi que sur les retraits d'agrément et d'autorisation. Les décisions en la matière sont prises par un arrêté conjoint des ministres chargés de la culture et des personnes handicapées.
La commission comprend dix membres, nommés pour cinq ans par un arrêté conjoint des deux ministres : cinq représentants des associations de personnes handicapées et cinq représentants des titulaires de droits. Le président de la commission est élu par les membres pour une durée d'un an, alternativement parmi les représentants des deux composantes. Un représentant de la Bibliothèque nationale de France (BnF) participe aux travaux de la commission avec voix consultative.
Le décret du 27 février précise également les pièces à fournir et les justifications à produire par les personnes morales ou les établissements candidats à une inscription sur la liste des organismes autorisés.
Enfin, le décret détaille également le rôle de la BnF dans la conservation des fichiers numériques des œuvres. L'éditeur a en effet obligation de transmettre à la BnF le fichier numérique d'une œuvre dans un délai de 45 jours suivant la demande qui lui en est faite par celle-ci.

Un secteur fragile

Pour sa part, le rapport des trois inspections générales commence par établir une cartographie des 103 structures agréées (au 1er janvier 2016). Il en ressort un certain nombre de caractéristiques principales : répartition géographique inégale (marquée par une prédominance de l'Ile-de-France et une absence quasi complète outre-mer), prédominance des acteurs associatifs et faible présence des acteurs publics (avec toutefois une tendance à la progression), financement privé reposant fortement sur le bénévolat, financement public apporté principalement par les fonds de la sécurité sociale attribués aux établissements et services médicosociaux effectuant des activités de transcription...
L'analyse de la chaîne de production adaptée montre que cette dernière est majoritairement destinée aux déficients visuels et souvent sous format papier (braille, gros caractères, relief...). Du côté des livres audio, la production de documents au format non structuré (Cd-Rom...) reste prédominante. Au sein du réseau de lecture publique (bibliothèques, médiathèques...), il existe également quelques établissements précurseurs dont l'action est principalement orientée vers la diffusion de l'édition adaptée et l'amélioration de l'accessibilité physique et numérique aux collections.

Deux scénarios, dont la création d'un GIP

Au final, ces éléments "dessinent un paysage de l'édition adaptée en France en demi-teinte, exerçant dans une forme de cohérence, mais affecté par une réelle fragilité structurelle et économique. En l'état actuel de la situation, il n'est pas suffisamment outillé, étoffé, ni coordonné pour répondre aux objectifs de la loi LCAP, mais des points d'appui forts existent".
L'Igas, l'Igac et l'Igaen proposent donc deux scénarios alternatifs. Le premier - dit de "la transition accompagnée" - s'appuie sur les acteurs déjà en place et nécessite un ensemble de mesures essentiellement d'ordre technique. Le second - dit de "la mobilisation organisée" - préconise une action publique volontariste, soutenue par une mesure organisationnelle : la création d'un GIP "Edition adaptée", "afin de faire converger les initiatives et jouer à plein les effets de levier".

 

Référence : décret 2017-253 du 27 février 2017 relatif à l'exception au droit d'auteur, aux droits voisins et au droit des producteurs de bases de données en faveur de personnes atteintes d'un handicap (Journal officiel du 28 février 2017).