Evaluation environnementale : la nomenclature poursuit sa mue
Mesure de simplification ou régression du droit de l’environnement ? Les nouveaux ajustements apportés par décret à la nomenclature des projets relevant de l’évaluation environnementale suscitent des réactions contrastées, en particulier dans le camp des associations environnementales qui déplorent l’absence de "clause filet".
Un décret publié ce 5 juin modifie certaines rubriques de la nomenclature des études d’impact pour les installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE), les forages, les canalisations, les travaux, constructions et opérations d'aménagement ou encore les terrains de sports et loisirs motorisés. Le grand chantier opéré par l'ordonnance 2016-1058 et son décret d'application n° 2016-1110 pour assurer la transposition de la directive 2011/92/UE est déjà derrière. Avec cette nouvelle refonte, le ministère de la Transition écologique entend simplement rectifier le tir à l'aune "de retour d'expérience des services déconcentrés et des maîtres d’ouvrage, ainsi que de la décision n° 404391 du Conseil d’Etat du 8 décembre 2017". La récente jurisprudence du Conseil d'Etat sur le principe de non régression du droit de l'environnement n'est donc pas étrangère à ce réajustement. Le décret en tire les conséquences dans le champ des études d’impact à la rubrique 44 du tableau annexé à l'article R. 122-2 du code de l'environnement directement impacté par cette décision d'annulation partielle (lire notre article ci-dessous). Pour les projets relatifs aux "équipements sportifs, culturels ou de loisirs et aménagements associés", en particulier les projets de pistes de sports motorisés, il est ainsi proposé de reprendre le seuil de soumission au cas par cas "antérieur au décret n° 2016-1110, ce seuil étant fixé à 1.000 personnes".
Toujours pas de clause filet
Pourtant l’objectif affiché demeure la diminution du nombre d'études d'impact grâce au développement des examens au cas par cas et à un ciblage de l'évaluation environnementale sur les projets les plus "impactants". Le décret prévoit notamment d'exclure du régime d'examen au cas par cas, les projets d'activités de géothermie de minime importance (GMI), et ce "quelle que soit leur profondeur" (rubrique 27), "puisque, par définition, la GMI n’est pas susceptible d’avoir des effets négatifs notables sur l’environnement". Autre exemple aux rubriques n°35 (canalisations d'eau chaude) et 36 (canalisations de vapeur d'eau). Le texte bascule ces projets "peu impactants pour l'environnement" du systématique vers le cas par cas. Mais pour France Nature Environnement (FNE) cette nouvelle vague d’assouplissements rime avec "fragilité juridique, régression environnementale et risque de contentieux". C’est en brandissant ce nouveau principe directeur du droit de l’environnement que les associations environnementales ont nourri leurs principales critiques dès le stade de la consultation. D’autant que le décret ne comporte toujours pas de "clause filet" susceptible d’imposer une évaluation pour les projets qui seraient en deçà des seuils ou critères réglementaires et qui pourtant seraient situés dans des milieux naturels sensibles. Une telle clause de rattrapage existe en revanche pour les plans et programmes. Cette clause "balai" permet au ministre de déterminer si un plan ne figurant pas sur la liste de l'article R. 122-17 relève du champ de l'évaluation environnementale obligatoire ou d'un examen au cas par cas. Cette procédure a permis de soumettre les plans de protection de l'atmosphère (PPA) à examen au cas par cas. Les effets d’un tel arrêté sont toutefois limités à un an. Pour assurer la validité de cette décision au-delà du 1er juillet 2018, le décret insère donc les PPA dans la liste du II de l'article R. 122-17.
Référence : décret n° 2018-435 du 4 juin 2018 modifiant des catégories de projets, plans et programmes relevant de l'évaluation environnementale, JO du 5 juin 2018, texte n° 28.