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Commande publique - Et si la mention "accord sur les marchés publics" ne pouvait pas provoquer l'annulation de la procédure ?...

Le Conseil d'Etat, dans une affaire n°305420 présentée en séance publique du 14 avril 2008,  devrait être amené à trancher une question "inédite" relative à la rubrique "accord sur les marchés publics (AMP)" des avis de publicité.
Le juge des référés du tribunal administratif de Nantes, dans une ordonnance n°0702057 du 24 avril 2007, a donné suite à la requête d'un candidat évincé en annulant la procédure de passation du marché au motif que l'avis de publicité du marché mentionnait de façon erronée que celui-ci était couvert par l'accord sur les marchés publics de l'OMC. Dans sa jurisprudence relative à cette rubrique, le Conseil d'Etat a jusqu'à présent fait preuve de la plus grande sévérité. Il a ainsi été précédemment jugé que le fait de ne pas remplir cette rubrique ou de stipuler de manière erronée que le marché n'était pas couvert par l'accord entraînait l'annulation de la procédure. En revanche, il n'a jusqu'à présent jamais été jugé que le fait d'indiquer à tort qu'un marché était soumis à l'AMP constituait également un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence. Selon le commissaire du gouvernement, qui a rendu ses conclusions sur cette affaire il y a quelque jours, confirmer le raisonnement du juge des référés pourrait avoir des conséquences préjudiciables en ouvrant la voie à une instrumentalisation du recours en référé par les candidats évincés. Cela  encouragerait une dérive du référé précontractuel vers un contrôle de pure forme.

Léser le requérant ?

Afin de limiter ce risque, le commissaire du gouvernement a proposé au Conseil d'Etat de censurer l'ordonnance du juge des référés en adoptant une approche de l'article L.551-1 du Code de justice administrative un peu différente de celle retenue jusqu'à présent. Conformément à cet article, les seules personnes habilitées à saisir le juge des référés sont celles qui ont un intérêt à conclure le contrat et qui sont susceptibles d'être lésées par le manquement. Il serait donc possible de subordonner la saisine du juge à la démonstration que le manquement invoqué aurait bien pour conséquence de léser le requérant. Ainsi, une personne qui n'aurait pas pu être lésée par une irrégularité de procédure, car cette irrégularité ne la concerne en rien, ne serait pas recevable à saisir le juge des référés de ce manquement.

Rapporté au cas d'espèce, ce raisonnement permettrait d'écarter définitivement tout recours fondé sur la mention erronée en cause. En effet, les entreprises extracommunautaires sont les seules concernées par la rubrique relative à l'AMP. Par conséquent, une entreprise communautaire ne saurait être lésée par cette irrégularité et invoquer ce moyen devant le juge précontractuel. Cette solution serait par ailleurs dictée par une question de bon sens. En effet, s'il est avéré que le fait de ne rien indiquer ou d'indiquer à tort que le marché n'est pas soumis à l'AMP peut conduire les entreprises extracommunautaires à ne pas déposer de dossier de candidature, la situation inverse, c'est-à-dire ouvrir à tort le marché aux entreprises extracommunautaires soumises à l'AMP, ne peut en tout état de cause être regardée comme ayant une quelconque conséquence en termes de réduction ou de limitation de concurrence.
Le Conseil d'Etat acceptera-t-il de suivre les conclusions du commissaire du gouvernement ? Le compromis proposé présente de nombreux avantages. Il permettrait d'une part de censurer l'ordonnance du juge des référés sans remettre en cause la jurisprudence précédente du Conseil d'Etat concernant la rubrique AMP, et apporterait d'autre part une plus grande sécurité juridique aux acheteurs. Il n'est toutefois pas certain que le Conseil d'Etat choisisse de valider le raisonnement du commissaire du gouvernement.

 

Apasp

 

Un second moyen devrait censurer l'ordonnance

En définitive, le Conseil d'Etat ne peut que censurer l'ordonnance du juge des référés. Si le premier motif évoqué précédemment n'était pas retenu, la Haute Assemblée devrait en tout état de cause donner suite au second moyen tiré de l'irrecevabilité de la demande présentée par le requérant devant le juge des référés. En effet, l'entreprise n'étant pas à jour de ses obligations fiscales, il lui était impossible de soumissionner utilement et de prétendre à être l'attributaire du marché. Elle n'était par conséquent pas recevable à exercer un recours sur le fondement de l'article L.551-1 du Code de justice administrative.

 

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