Face à la troisième vague, des ajustements au jour le jour

Le Rhône, l'Aube et la Nièvre devraient rejoindre la liste des départements soumis aux mesures de freinage renforcées (on ne dit plus confinement). Des mesures qui ne devraient pas évoluer dans l'immédiat. L'idée est pour l'heure de veiller à leur bonne application. Depuis la fin de la semaine dernière, les tâtonnements s'agissant des attestations de sortie et des autorisations d'ouverture des commerces n'ont, il est vrai, pas totalement simplifié les choses. Il a été précisé ce mercredi soir que les rassemblements de plus de six personnes en extérieur sont interdits sur tout le territoire.

Moins d'une semaine après les nouvelles mesures anti-Covid-19 annoncées par Jean Castex pour 16 départements (voir notre article du 18 mars), l'exécutif réfléchit à une extension des restrictions pour certains territoires. En attendant, une partie du monde médical continue de gronder face à une saturation des services de réanimation dans les zones très touchées par le regain de l'épidémie, estimant qu'un confinement plus strict est nécessaire. "On marche sur la tête avec des mesures qui sont complètement déconnectées de la réalité", a par exemple estimé Gilles Pialoux, chef de service des maladies infectieuses et tropicales à l'hôpital Tenon à Paris. Pour lui, le semi-confinement en Île-de-France est une mesure "hors-temps".

Le gouvernement compte notamment placer trois départements supplémentaires, le Rhône, l'Aube et la Nièvre, dans la liste des départements soumis aux mesures de freinage renforcées, a annoncé le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal, en rendant compte du conseil des ministres ce mercredi 24 mars. "Des concertations auront lieu cet après-midi", a-t-il précisé, alors que le taux d'incidence dans le Rhône, et notamment à Lyon, approche la barre des 400, à 383 pour 100.000 habitants, et atteint 329 dans la Nièvre et 445 dans l'Aube, selon Santé Publique France.

En revanche, l'heure n'est pas encore à un durcissement des restrictions. Du moins pas cette semaine. Gabriel Attal a déclaré que l'idée restait de "mesurer l'impact" des décisions prises jeudi dernier – des "mesures puissantes" si "chacun les respecte", a-t-il assuré. Il s'agit de "nous donner une chance de ne pas avoir à prendre de mesures supplémentaires", a-t-il ajouté. Mais, a-t-il reconnu, "le virus s'engouffre dans les brèches que nous lui laissons", en citant en particulier les rassemblements privés et la sphère professionnelle, où le télétravail n'est pas assez appliqué. Mardi à Valenciennes (voir notre article), Emmanuel Macron s'était lui aussi inquiété du non-respect du télétravail en Île-de France. "Nous allons renforcer les contrôles et les sanctions pour des entreprises qui manifestement ne voudraient pas l'appliquer", avec "une exigence toute particulière vis-à-vis des administrations, à la fois pour des raisons sanitaires, mais aussi pour des raisons d'exemplarité", a dit aujourd'hui Gabriel Attal.

Dans l'après-midi au Sénat, lors des questions au gouvernement, c'est Jean Castex qui déclarait : "Nous allons continuer dans cette stratégie territorialisée. Nous la maintiendrons autant que cela sera possible. La troisième vague est extrêmement importante. Nous pourrions être amenés à durcir selon l’évolution de la pandémie."

Des attestations plus ou moins simplifiées

Les mesures du moment, sont désormais bien connues. Depuis samedi, dans 16 départements, dont toute la région parisienne, les Hauts-de-France, une partie de la Normandie et les Alpes-Maritimes, de nouveaux commerces ont fermé, les déplacements sont limités à 10 km de son domicile sauf motif dérogatoire. Et il est "demandé" aux habitants de ces départements de "ne pas recevoir" chez eux de personnes extérieures à leur foyer y compris en journée, a souligné mercredi Gabriel Attal, ajoutant que pour les autres départements, c'est la "règle des six" qui prévaut. Mais on sait que ce qui relève du domicile privé ne peut être contrôlé et sanctionné (sauf si tapage nocturne par exemple). On est donc là dans le registre des recommandations.

Le reste n'est pas simple non plus. On n'épiloguera pas sur l'épisode des attestations du week-end dernier. Un modèle d'attestation de deux pages disponible samedi matin, que même le ministère de l'Intérieur a reconnu "complexe", suivi d'un modèle simplifié... pour que l'on apprenne au final qu'une attestation en journée n'était pas nécessaire dans un rayon de 10 km à condition de pouvoir présenter un justificatif de domicile (la seule attestation restant toutefois possible si l'on ne réside pas dans son domicile principal). Une attestation reste en revanche demandée pour se déplacer au sein d'un même département (ou dans une limite de 30 km) pour faire des achats (oui, pour les achats, la règle des 10 km saute), accompagner ses enfants à l’école, "se rendre dans un établissement culturel (bibliothèques et médiathèques) ou un lieu de culte" (on se voit ainsi confirmer au passage que les bibliothèques peuvent rester ouvertes), faire des démarches administratives ou juridiques…

La mise en ligne de la version pour smartphone de l'attestation (ou plutôt des attestations, puisqu'au fil des versions, on est finalement revenu à deux documents distincts – l'un pour la journée, l'autre pour les heures de couvre-feu) n'a pas non plus été immédiate et les formulaires ne sont disponibles sur l'application TousAntiCovid que depuis mardi, avec un petit bug lors de la mise en service. Tout ceci en précisant que ces attestations ne sont bien que des "modèles" mis à disposition et que leur contenu peut donc par exemple être rédigé sur papier libre, contrairement à ce qu'avait indiqué le site du ministère de l'Intérieur durant le week-end. Pendant ce temps, une nouvelle campagne d'information du gouvernement tentait de faire comprendre le principe des nouvelles mesures d'un confinement qui n'en est pas un (l'exécutif n'utilise plus le terme de confinement) puisque privilégiant les sorties de plein air. Ceci sous le slogan "Dedans avec les miens, dehors en citoyen".

Commerces : de possibles évolutions

Quelques flottements côté réglementaire aussi. Le décret traduisant les annonces de Jean Castex est paru samedi matin au JO (décret n° 2021-296 du 19 mars 2021 "modifiant le décret n° 2020-1310 du 29 octobre 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire"). On a pas mal entendu parler des fleuristes qui, pensant devoir fermer vendredi soir, avaient bradé leurs stocks dans la journée ou s'étaient remis en mode click and collect, pour découvrir samedi matin qu'ils étaient finalement autorisés à rester ouverts. Côté commerces toujours, coiffeurs et chocolatiers se voyaient confirmer qu'ils n'auraient pas à baisser le rideau, comme l'avait très vite précisé Bruno Le Maire. En tout cas, les grandes et moyennes surfaces n'avaient eu que 24 heures pour condamner leurs rayons "non essentiels", avec toujours les mêmes doutes et débats sur le sujet. Les rayons ou magasins de jeux vidéo restaient par exemple inaccessibles, contrairement aux livres et disques... jusqu'à ce qu'une nouvelle interprétation du décret leur permette lundi d'être assimilés aux "périphériques et logiciels" autorisés à la vente. Alors ce week-end, parmi les petits commerces de la capitale par exemple, on a pu voir à peu près toutes les configurations, avec beaucoup de "semi-ouvert" (vente sur le pas-de-porte et, comme auparavant, vente à emporter côté cafés et restaurants). Et beaucoup de monde ayant bien intégré la consigne du plein air.

Dimanche et lundi, le ministre délégué chargé des PME, Alain Griset, assurait que la liste des commerces autorisés pourrait évoluer en cas d'"aberration" mais qu'il fallait "éviter tous les jours de modifier les règles". "Si on voit que telle ou telle mesure peut être améliorée, on le fera passer chez le Premier ministre", ajoutait-il, évoquant en outre l'imminence d'une "mesure spécifique pour les stocks" des commerces ayant dû baisser le rideau. Ce mercredi, un décret modificatif était publié au JO, pour des retouches mineures. Mais d'autres pourraient donc paraître au fil des jours.

On saura aussi que…

  • Les rassemblements de plus de 6 personnes interdits sur tout le territoire

Les rassemblements de plus de six personnes en extérieur sont interdits sur tout le territoire, a précisé ce mercredi soir à l'AFP le ministère de l'Intérieur. Cette interdiction, sur laquelle Gérald Darmanin avait sensibilisé l'ensemble des préfets dans un télégramme mardi soir, ne s'applique donc pas seulement aux 16 départements concernés par les restrictions supplémentaires. Ces mesures sont la déclinaison du décret du 19 mars, souligne l'Intérieur. Elles ne s'appliquent pas pour les manifestations déclarées ainsi que pour certains autres cas (familles nombreuses, sport en extérieur, etc.), avait auparavant précisé l'entourage du ministre. Mais Gérald Darmanin a demandé aux préfets une application "stricte" de cette règle - "pas plus de 6 personnes en extérieur, dans les parcs...". Il a en outre demandé aux préfets de communiquer amplement sur l'ensemble des mesures de restriction et a fait savoir que des contrôles dans les gares et aux péages seront organisés concernant les déplacements entre régions.

  • Île-de-France : pouvoirs renforcés pour le préfet de police

Gérald Darmanin a présenté ce mercredi en conseil des ministres un décret "relatif aux compétences du préfet de police de cas de menaces et crises sanitaires graves". "À la suite de la loi n° 2021-160 du 15 février 2021 prorogeant l’état d’urgence sanitaire, ce décret précise les compétences confiées au préfet de police jusqu’au 31 décembre 2021 à Paris et sur les emprises des trois aéroports parisiens", indique le compte-rendu du conseil, précisant que le préfet Lallement pourra par exemple "désigner les centres pour assurer la vaccination sur le territoire de la ville de Paris, ordonner la fermeture des établissements recevant du public qui ne respecteraient pas les obligations applicables (…) et prendre des arrêtés de placement à l’isolement pour les personnes testées positives à leur arrivée à l’aéroport".

  • Île-de-France toujours : avancer les vacances ?

La présidente de la région Île-de-France, Valérie Pécresse, a proposé ce mercredi d'avancer de deux semaines les vacances de printemps pour enrayer la progression du Covid. "Je me demande si la bonne mesure ne serait pas d'avancer les vacances scolaires de 15 jours afin de fermer les écoles dès le 2 avril", a-t-elle déclaré, sachant que ces vacances sont fixées du 17 avril au 3 mai en Île-de-France.
Sa proposition n'a pas convaincu la maire de Paris, Anne Hidalgo. "Je pense qu'il y a une alternative encore aujourd'hui" à l'avancement des vacances "qui s'appelle vacciner les enseignants et les personnels qui travaillent avec les enfants", a-t-elle affirmé sur RTL. La maire a reconnu qu'il y a "un sujet sur les écoles", qualifiant la situation de "très inquiétante". "Il faut protéger les enseignants qui vont devant nos enfants", a-t-elle souligné. Selon elle, les personnels "doivent être prioritaires maintenant et pas fin avril", échéance proposée la veille par Emmanuel Macron.

  • Olivier Véran espère pouvoir se passer de "pass sanitaire"

Les bars, restaurants et autres lieux recevant du public pourraient "rouvrir progressivement" sans avoir recours à un "pass sanitaire", a estimé mercredi le ministre de la Santé. "Cela pose des questions éthiques, scientifiques, juridiques (et) techniques importantes", a-t-il reconnu lors d'un débat sur la crise sanitaire à l'Assemblée nationale. Plusieurs députés ont interpellé Olivier Véran sur ce sujet, à commencer par le président de la commission des Affaires économiques, Roland Lescure (LREM), "convaincu que la mise en place d'un 'pass santé' permettra de rouvrir les activités culturelles, sportives, et aussi de tourisme, dont nous avons besoin plus que jamais pour accompagner la reprise". Répondant à Jean-François Eliaou (LREM) sur un possible accès restreint aux seules personnes vaccinées, le ministre a indiqué que "ce n'est pas l'avis du gouvernement à ce stade", même si des travaux sont en cours et que "nous verrons ce qu'il en ressortira". Mais "je pense que le temps que ce débat-là soit monté, on aura une couverture vaccinale qui sera satisfaisante de la population", a-t-il ajouté.

  • Un protocole réactualisé pour les entreprises…

La version actualisée du protocole sanitaire en entreprise, présentée lundi soir aux partenaires sociaux, prévoit l'obligation pour les employeurs des départements soumis à de nouvelles restrictions de définir des "plans d'action" pour "réduire au maximum le temps de présence sur site des salariés, tenant compte des activités télétravaillables au sein de l'entreprise". "Ce plan d'action, dont les modalités sont adaptées à la taille de l'entreprise, fait l'objet d'échanges dans le cadre du dialogue social de proximité. En cas de contrôle, les actions mises en oeuvre seront présentées à l'inspection du travail", précise le document qui a été publié mardi. En matière de restauration collective, la fiche dédiée est retouchée, notamment pour préciser qu'il faut "déjeuner seul en laissant une place vide en face de soi, et en respectant strictement la règle de distanciation" de deux mètres entre chaque personne. Le texte demande aussi d'adapter "systématiquement" les plages horaires d'ouverture et évoque la mise en place, "dans la mesure du possible, de paniers à emporter et à consommer sur le poste de travail".

  • … et une FAQ mise à jour pour la fonction publique

La DGAFP a pour sa part mis à jour ce mercredi son "questions / réponses" à l'attention des employeurs et des agents publics". On y retrouve le même type de recommandations concernant le télétravail, la restauration, etc.

  • Ouverture de 38 vaccinodromes gérés par les sapeurs-pompiers

Gérald Darmanin a annoncé mercredi l'ouverture de "38 vaccinodromes" gérés par les sapeurs-pompiers. En outre, "une centaine" de véhicules destinés à la "vaccination mobile" seront mobilisés dans les territoires ruraux. Ouverts 7j/7, "ces centres de grande capacité seront armés par les sapeurs-pompiers avec notamment le concours des associations agréées de sécurité civile", a ensuite détaillé le ministère. "25.000 sapeurs-pompiers formés à la vaccination et 2.500 sapeurs-pompiers en charge de la logistique assureront l'administration et la gestion de ces vaccinodromes dans lesquels jusqu'à 530.000 doses pourront être injectées chaque semaine, soit une moyenne de 2.000 doses par jour par vaccinodrome", poursuit le communiqué.
Parmi les diverses propositions des collectivités pour accueillir certains grands centres, on citera la région Auvergne-Rhône-Alpes qui entend mettre à disposition ses lycées au cours des prochaines vacances de Pâques ainsi que plusieurs équipements régionaux, dont les deux hôtels de région de Lyon et Clermont-Ferrand, la Grande Halle d'Auvergne ou le site d'Alpexpo de Grenoble.

C.M., avec AFP

 

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis