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Espaces naturels et territoires littoraux : les députés apportent d'ultimes retouches au projet de loi Climat en séance

Les députés ont achevé le 16 avril l'examen en séance publique du titre IV "Se loger" du projet de loi Climat et Résilience en adoptant les dernières mesures concernant la protection des espaces naturels et l'adaptation des territoires aux effets du dérèglement climatique.

Entamé le 12 avril par les dispositions sur la rénovation énergétique des logements (voir notre dossier), l'examen en séance par les députés du titre IV Se loger du projet de loi Climat et Résilience ne s'est achevé que ce 16 avril. Après des débats enflammés sur le volet artificialisation des sols, qui ont débouché sur de nombreux amendements, les discussions ont été plus sereines sur les dernières dispositions du titre IV sur la protection des écosystèmes et les risques liés à l'érosion côtière, qui avaient déjà été largement enrichies en commission.


Protection des écosystèmes (chapitre IV)

Stratégie nationale des aires protégées (art.56)
Cet article, qui vise à inscrire dans la loi les objectifs de la stratégie nationale pour les aires protégées 2020-2030, a été légèrement modifié en séance. Un amendement de Frédérique Tuffnell (Modem-Charente-Maritime) est venu "recentrer le contenu de la stratégie nationale des aires protégées, sur une base plus en phase avec la définition de l’Union internationale de la conservation de la nature" et a prévu d'y intégrer "l’indispensable lien avec la lutte contre le dérèglement climatique". Maina Sage (Agir-Ensemble-Polynésie) a obtenu que l’État encourage le déploiement de méthodes et de projets donnant lieu à l’attribution de crédits carbone au titre du label bas-carbone en faveur des aires marines protégées de l’ensemble de la zone économique exclusive française, située notamment outre-mer. "La France pourrait réellement être leader demain en matière de carbone bleu, a soutenu la députée de Polynésie. Parce qu’elle possède le deuxième domaine maritime mondial, elle doit montrer l’exemple en menant des stratégies cohérentes, qui fixent des obligations et encouragent le développement de projets dotés de moyens suffisants."


Gestionnaires d'espaces naturels protégés et parcelles boisées (art. 56 bis A nouveau)

Les députés ont adopté un amendement de Jimmy Pahun (Modem-Morbihan) créant un nouvel article qui vise à exempter les gestionnaires d’espaces naturels protégés du droit de préférence bénéficiant aux propriétaires d’une parcelle boisée en cas de vente d’une parcelle contiguë inférieure à quatre hectares – un droit prévu par l’article L. 331-19 du code forestier. "Compte tenu du rôle joué par les bois et forêts dans la lutte contre le réchauffement climatique, il est important que leurs gestionnaires puissent les acquérir pour en assurer la gestion écologique, a fait valoir le député. Les gestionnaires visés sont le Conservatoire du littoral et les conservatoires d’espaces naturels, qui engagent des actions foncières en faveur de l’environnement."


Parcs naturels régionaux (art. 56 ter nouveau)

Un amendement de Julien Aubert (LR) et d'autres amendements identiques ont prévu la prolongation jusqu'à décembre 2024 des décrets de classement des parcs naturels régionaux dont la procédure de révision a été affectée par la crise sanitaire. Cela "permettrait d’inclure un très grand nombre de parcs naturels régionaux qui risqueraient d’être déclassés" a fait valoir le député du Vaucluse. Initialement, le gouvernement avait prévu de les prolonger de six mois, délai jugé insuffisant car un seul parc aurait pu bénéficier pleinement de la mesure selon Julien Aubert.

Philanthropie foncière (art. 57 bis A nouveau) 

Trois amendements identiques dont l'un défendu par Jimmy Pahun visent à encourager la philanthropie foncière "pour participer à l’atteinte des objectifs fixés par la stratégie nationale pour les aires protégées, à savoir 30% du territoire national sous protection, dont 10% sous protection forte". Ils proposent d’exempter du droit de préemption des sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer) les donations au profit des personnes morales reconnues d’utilité publique et dont l’objet principal est la protection de la biodiversité.

Préservation des chemins ruraux (art. 57 ter nouveau)

Les députés ont précisé les dispositions votées en commission en adoptant un amendement de Jean-Pierre Cubertafon (Modem-Dordogne) qui vise à permettre aux associations "loi de 1901" d’entretenir un chemin rural au même titre qu’une association syndicale de riverains. Les communes pourront ainsi déléguer à des associations l’entretien d’un chemin rural. Une convention conclue entre les deux parties encadrera cette délégation, indique le texte.


Adapter les territoires aux effets du dérèglement climatique (chapitre V)

Ventes ou locations de biens dans des zones à risques technologiques ou naturels (art. 58 A nouveau)

"En cas de mise en vente de tout ou partie d’un immeuble, l’état des risques est remis à l’acquéreur potentiel par le vendeur lors de la première visite de l’immeuble, si une telle visite a lieu. Par ailleurs, le moyen d’accéder à l’état des risques est publié dès l’annonce de la vente, de manière à ce que l’acquéreur potentiel soit informé le plus en amont possible de la future transaction, comme c’est le cas pour les diagnostics de performance énergétique", prévoit désormais le texte après l'adoption d'un amendement de Stéphane Buchou (LREM, Vendée) et de plusieurs députés de son groupe. La lecture des annonces  renverra à des sites spécialisés comme Géorisques. La même démarche est appliquée aux locations.


Conseil national de la mer et des littoraux (art. 58 BA nouveau) 

Les députés ont voté un amendement de Sophie Panonacle (LREM, Gironde), sous-amendé par le gouvernement, visant à intégrer les dispositions concernant le Conseil national de la mer et des littoraux dans le code de l’environnement. Reprenant à droit constant le périmètre du Conseil national de la mer et des littoraux, celui-ci est notamment chargé de "défini[r] les objectifs et [de] précise[r] les actions qu’il juge nécessaires pour l’aménagement, la protection et la mise en valeur de la mer et des littoraux, dans une perspective de gestion intégrée des zones côtières".

 
Liste des communes subissant l’érosion du trait de côte (art. 58 B nouveau)

Un amendement porté par Stéphane Buchou propose que le Comité national de suivi et de gestion intégrée du trait de côte, transformé en Comité national du trait de côte, soit saisi pour avis pour établir la liste des communes "dont l’action en matière d’urbanisme et la politique d’aménagement doivent être adaptées aux phénomènes hydrosédimentaires entraînant l’érosion du littoral". Fixée par décret, cette liste sera révisée au moins tous les neuf ans, selon cet article.


Bail réel immobilier de longue durée (art. 58) 

Deux amendements de Stéphane Buchou sont venus "préciser et graver dans le marbre" le calendrier de mise en application des dispositions prévues à l’article 58 sur le nouveau régime de contrat de bail réel immobilier de longue durée, "par lequel un bailleur consent à un preneur des droits réels, en contrepartie d’une redevance foncière, en vue d’occuper […] des installations, ouvrages et bâtiments situés dans des zones exposées au recul du trait de côte ou à des risques naturels aggravés par le changement climatique". Le gouvernement devra publier une ordonnance "obligatoirement au plus tard neuf mois à compter de la date de promulgation de la loi" et déposer un projet de loi de ratification obligatoirement "au plus tard trois mois à compter de la date de publication de l’ordonnance".


Stratégies locales de gestion intégrée du trait de côte (art. 58)

Les stratégies locales de gestion intégrée du trait de côte sont intégrées aux éléments à prendre en compte pour "définir ou adapter les outils d’aménagement foncier et de maîtrise foncière nécessaires à l’adaptation des territoires exposés au recul du trait de côte", selon un amendement de Sophie Panonacle.


Usage des drones pour la cartographie du littoral (art. 58 bis nouveau)

"Afin de pouvoir mener correctement les travaux de cartographie du littoral mais aussi de disposer de meilleures connaissances sur les phénomènes naturels en cours qui sont susceptibles d’avoir un impact sur les zones à enjeux et de contribuer à l’élaboration de l’information acquéreur locataire définie à l’article L.125-5  du code de l’environnement", le gouvernement a introduit un amendement permettant l’usage de drones, "dans un cadre toutefois rigoureux s’agissant de l’usage des données qui sera opéré" et qui sera précisé par un décret en Conseil d’État.