Éolien : le Sraddet des Hauts-de-France partiellement annulé pour son manque d’ambition
Déjà bien pourvue en éoliennes, la région Hauts-de-France, présidée par Xavier Bertrand, souhaiterait s’arrêter là. C’est en tout cas ce que traduit son schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet) en affichant un objectif de stabilisation à l'horizon 2031. Mais le tribunal administratif de Lille ne l’entend pas de cette oreille et vient d’annuler partiellement le document de planification, faute de justification de l’absence d’objectif de développement de l’éolien terrestre.
Alors que le processus d’identification de "zones d’accélération" pour l’implantation d’installations de production d’énergies renouvelables constitue précisément l’un des enjeux du projet de loi visant à accélérer la production d'énergies renouvelables, le jugement (n°2007012) rendu ce 6 février, par le tribunal administratif de Lille, annulant partiellement l’arrêté préfectoral d’août 2020 approuvant le schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet) des Hauts-de-France donne matière à réflexion. Et pour cause, en l’espèce, les juges font grief au Sraddet de retenir, à l'horizon 2031, un objectif de simple stabilisation de la production d’énergie éolienne terrestre à son niveau de 2018 (objectif n° 33) "sans justifier de l’impossibilité de prévoir un objectif portant sur le développement de cette source d’énergie", c’est-à-dire nécessairement d’un accroissement de celle-ci, comme le prescrit l’article R.4251-5 du code général des collectivités territoriales. C’était d’ailleurs un des arguments avancés par l’association France Énergie éolienne à l'origine du recours.
Or, la priorité affichée dans le Sraddet est au contraire de privilégier le développement des énergies renouvelables et de récupération autres que l'éolien terrestre, dont principalement le biogaz (règle générale n° 8). Pour se justifier, la région Hauts-de-France - première productrice d’énergie éolienne en France métropolitaine, à l’origine de 20% à 25% de la production nationale, fait-elle valoir - invoquait de son côté la "saturation des paysages régionaux". Un raisonnement balayé par le tribunal administratif. Celui-ci s’appuie, notamment sur l’avis du conseil économique, social et environnemental régional et de plusieurs contributions à l’enquête publique, pour contredire l’équation selon laquelle l’accroissement de la production d’énergie éolienne conduit nécessairement à augmenter le nombre d’éoliennes implantées sur le territoire régional.
Pas d’atteinte établie au principe de non-régression
Le tribunal de Lille écarte en revanche, le moyen tiré de la violation du principe de non-régression environnementale, sachant que le Sraddet fixe un objectif de doublement de production des énergies renouvelables entre 2015 et 2031 et de triplement de la part de ces énergies dans la consommation finale d’énergie sur cette même période. Il n’est par ailleurs pas établi, ajoute-t-il, que l’absence d’augmentation de la production d’énergie éolienne entre 2021 et 2031 "serait de nature à engendrer une diminution du niveau de protection de l’environnement".
La région a annoncé son intention de faire appel de ce jugement. Confirmant sa posture d’opposition au développement éolien, le conseil régional des Hauts-de-France, conformément à une promesse de campagne de son président, Xavier Bertrand, a octroyé une subvention de 170.000 euros sur trois ans en faveur de la nouvelle fédération Stop Éoliennes Hauts-de-France (voir notre article du 19 mai 2022), suscitant l’ire des élus écologistes. La décision du tribunal de Lille a donc à leurs yeux un goût de revanche.