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Commande publique - En attendant la transposition des directives Marchés et Concessions...

En cette période estivale, l'Apasp revient sur les évènements marquants des six derniers mois en matière de commande publique : la transposition des directives Marchés et Concessions bien sûr, mais aussi les diverses consultations en cours ainsi que les jurisprudences les plus importantes.

Transposition, sur-transposition et dernières corrections

Le projet d'ordonnance transposant la directive européenne relative aux marchés publics a été présenté en conseil des ministres le 22 juillet. Le ministre de l'Economie, Emmanuel Macron, avait d'ailleurs annoncé sa publication d'ici à la fin juillet.
Maintes fois remaniée, cette ordonnance a pour objectif de rationaliser l'achat public et de permettre aux acheteurs de faire un usage optimal des deniers publics. Le texte final prévoirait notamment des seuils pour le recours au contrat de partenariat, alors même que cette hypothèse avait été écartée par le ministre en avril dernier. Un seuil serait fixé par secteur de marché, dans des conditions les plus souples possibles. La mission d'appui aux PPP (Mappp) serait de plus réformée pour apporter un soutien aux collectivités souhaitant recourir à ces contrats. Cela rejoint la recommandation du Conseil d'analyse économique (CAE) en faveur d'un élargissement des compétences de la mission.
En outre, Emmanuel Macron a réaffirmé l'engagement du gouvernement en faveur de l'allotissement et de la dématérialisation. Ces deux initiatives visent à favoriser l'accès des PME aux contrats de la commande publique. Il s'agit en effet de l'un des enjeux phare de la transposition comme l'ont dernièrement rappelé Jean Maïa, directeur de la DAJ, ou encore Alain Borowski et Sébastion Taupiac de l'Ugap, au Sénat lors de leurs auditions par la mission commune d'information sur la commande publique.
Ainsi, l'allotissement devient une obligation, tout comme le fait de réserver une part des PPP et concessions aux PME. L'objectif de 100% de dématérialisation dans les marchés publics d'ici 2018 permettra également de simplifier la réponse aux appels d'offres. Toujours dans le cadre de la simplification de l'accès à la commande publique, le dispositif de marché public simplifié (MPS) poursuit son développement, comme en atteste la signature d'une charte entre l'Ugap et le SGMAP.
Par ailleurs, le ministre de l'Economie s'est déclaré en faveur de l'inclusion d'objectifs environnementaux et sociaux dans les marchés publics, contrairement cette fois aux recommandations du CAE. L'Ugap avait de même fait remarquer qu'un critère tel que le bilan carbone est à la portée des seules grandes entreprises, les audits étant très coûteux.
En outre, la transposition de la directive devrait conduire à instaurer la négociation comme procédure de droit commun en lieu et place de l'appel d'offres. Afin d'éviter toute dérive, le CAE avait proposé de mettre en place un encadrement plus approprié de cette procédure.
Comme l'avait déjà mentionné Jean Maïa, le ministre a repris l'idée de revoir le délit de favoritisme afin de ne viser que les actes intentionnels. La consécration du sourcing par la directive soulevait en effet le problème des interactions entre les intérêts des acheteurs publics et des entreprises candidates.
Enfin, un vif débat avait émergé autour de la question de la spécificité de la maîtrise d'œuvre, les architectes souhaitant une reconnaissance par les textes et le maintien de la procédure du concours obligatoire. Les directives sont en effet silencieuses sur ce point. Toutefois, suite à de nombreuses questions parlementaires et à des négociations entre les représentants de la profession d'architectes et le gouvernement, ce dernier a accepté de conserver les spécificités de la loi MOP. La question de la procédure du concours, à savoir s'il sera obligatoire en dessous et/ou au dessus des seuils, sera réglée par les décrets.

Concertations publiques : donnez votre avis !

- Les concertations sur la directive Concessions ainsi que les décrets y afférant ont été lancées le 22 juillet et resteront ouvertes jusqu'au 30 septembre 2015. La consultation sur les décrets relatifs à l'ordonnance Marchés publics devrait bientôt suivre.
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- Dans le cadre de la mission d'information commune (MCI) sénatoriale sur la commande publique, les entités et pouvoirs adjudicateurs ainsi que les opérateurs économiques sont invités à faire part de leurs suggestions d'amélioration et de la simplification des règles de la commande publique. Cette enquête vise à ouvrir et enrichir le débat qui débouchera sur un rapport de la MCI prévu pour fin septembre.
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- En collaboration avec l'Apasp et deux universités, la chaire Optima (Observatoire du pilotage et de l'innovation managériale locale) a organisé une consultation à destination des collectivités territoriales afin de recueillir leurs témoignages concernant notamment leurs pratiques locales d'achat, les critères mis en place pour l'évaluation de la performance de l'achat ou encore l'avenir du métier d'acheteur. Les résultats seront communiqués lors de la 170e session d'études de l'Apasp qui se tiendra les 29 et 30 septembre 2015.
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- Le projet de plan national de dématérialisation des marchés publics est également soumis à consultation depuis le 22 juillet et jusqu'au 30 septembre 2015. 10 axes sont proposés pour accompagner dans les meilleures conditions la dématérialisation des marchés publics et développer les usages du numérique autour de la commande publique.
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Jurisprudence du 1er semestre : ce qu'il ne fallait pas manquer

- Légalité des candidatures des collectivités : des précisions sur l'intérêt public local
Dans cet arrêt d'assemblée du 30 décembre 2014, le Conseil d'Etat livre une nouvelle lecture de l'intérêt public local, critère essentiel permettant à une personne publique de se porter candidate à l'attribution d'un marché public. Les juges de cassation ont ainsi considéré que la candidature d'une collectivité "à l'attribution d'un contrat de commande publique pour répondre aux besoins d'une autre personne publique" répond à un intérêt public local "si elle constitue le prolongement d'une mission de service public dont la collectivité ou l'établissement public de coopération a la charge, dans le but notamment d'amortir des équipements, de valoriser les moyens dont dispose le service ou d'assurer son équilibre financier".

- Marchés publics et propriété intellectuelle : une exception en faveur du juge judiciaire
Par dérogation à la loi Murcef de 2001 qui dispose que tous les litiges relatifs à des marchés publics sont de la compétence du juge administratif, les litiges concernant la propriété littéraire et artistique relèvent, en vertu de l'article L.331-1 du Code la propriété intellectuelle, de la compétence du juge judiciaire. Cette décision doit se comprendre au regard de l'adage selon lequel "la loi spéciale déroge à loi générale". La loi du 17 mai 2011 ayant introduit l'article L.331-1 du Code la propriété intellectuelle est un texte spécial qui donne compétence au juge judiciaire pour traiter des litiges relatifs à la propriété intellectuelle et ce, même s'il s'agit de marchés publics.

- Concession d'autoroute : les contrats du concessionnaire deviennent des contrats de droit privé
Le Tribunal des conflits met fin à une exception de compétence au profit du juge administratif et livre une nouvelle appréciation des contrats de travaux conclus entre une société concessionnaire d'autoroute et une personne privée. Il considère désormais qu'"en l'absence de conditions particulières", il appartiendra au juge judiciaire de régler ces conflits.

- DSP : hiérarchiser ou non les critères ?
Le Conseil d'Etat a rappelé que le délégant n'était pas tenu de communiquer aux candidats les modalités de mise en œuvre de critères de sélection des offres. Cependant, si le pouvoir adjudicateur a décidé de son propre chef de communiquer aux candidats la hiérarchie établie entre les critères de sélection, la collectivité est liée par les obligations qu'elle s'est elle-même imposées.

- Invoquer un nouveau motif de rejet de la candidature est désormais possible devant le juge du référé précontractuel !
Cet arrêt marque une évolution des prérogatives de l'administration devant le juge du référé précontractuel qui a désormais la possibilité d'examiner un nouveau motif de rejet de candidature dévoilé pour la première fois devant lui, à condition qu'il ne prive pas le requérant d'une garantie de procédure.

- Essai de prestations : une brèche ouverte par le Conseil d'Etat
Ce qui n'est pas expressément autorisé n'est pas pour autant interdit... telle fut la philosophie suivie par le Conseil d'Etat dans cette décision. Le juge du référé précontractuel avait prononcé l'annulation de la procédure de passation litigieuse, estimant que l'accomplissement d'un essai de la prestation objet du marché n'était pas autorisé par le Code des marchés publics. En l'absence d'interdiction expresse, il n'y avait cependant pas lieu d'annuler la procédure de passation au seul motif que l'évaluation de la qualité des offres se ferait notamment au regard de l'accomplissement d'un essai.

- Kiosques parisiens : des difficultés suffisantes pour justifier le recours à un contrat global
Le Conseil d'Etat s'est penché, dans un arrêt du 26 juin 2015, sur les marchés de la ville de Paris ayant trait aux kiosques parisiens, revenant à cette occasion sur les conditions de recours à un contrat complexe. Selon la Haute Juridiction, la pratique antérieure n'a aucune incidence sur la forme du futur contrat. Ainsi, la personne publique entendait par le recours à un contrat unique éviter la multiplication de conflits qu'elle devrait ensuite arbitrer, cette situation présentant des difficultés suffisantes pour justifier le recours à un contrat global.

- Marché global divisé en lots techniques : notez judicieusement, notez pondéré !
Le marché litigieux comportait dix lots techniques, chaque lot étant noté indépendamment. Le pouvoir adjudicateur avait ensuite additionné les notes obtenues sans les pondérer, ce qui avait eu une incidence sur le classement des offres. Il n'avait pas été tenu compte de la "grande disparité des valeurs des différents lots". De ce fait, la note finale de chaque candidat ne reflétait pas le prix réel de leur offre sur les lots les plus importants et ne permettait donc pas "d'identifier l'offre dont le prix était effectivement le plus avantageux".

 

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