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Emploi - Emplois d'avenir : les objectifs seront tenus mais des ajustements s'imposent pour les jeunes des ZUS

"L'objectif des 100.000 emplois d'avenir est haut mais franchissable". Dans son rapport sur les emplois d'avenir, la mission d'évaluation de l'Assemblée nationale fait part d'un ciblage plutôt réussi des contrats. Elle pointe aussi du doigt certains points noirs, comme une proportion encore limitée de jeunes en emploi d'avenir en zones urbaines sensibles, de fortes disparités entre les territoires, et un volet formation encore timide.

"La barre des 100.000 emplois d'avenir en 2013 est haut, mais franchissable." C'est l'une des conclusions du rapport de la mission d'évaluation sur la mise en œuvre des emplois d'avenir de l'Assemblée nationale, rendu public le 17 septembre. D'après les chiffres communiqués par la mission, 51.719 emplois d'avenir hors emplois professeur avaient été conclus au début du mois de septembre 2013, soit 55% de l'objectif annuel. Le nombre d'emplois d'avenir professeur atteint 3.169 sur un objectif de 4.000 au premier semestre, et 2.000 nouveaux contrats au second semestre, soit 80% de l'objectif. Au total, 55.000 emplois d'avenir ont donc été signés depuis le début du lancement du dispositif. Le rythme actuel est de 500 signatures par jour. Et "en reproduisant à la fin de l'année 2013 le rythme observé au mois de juillet, on aboutit à 98.000 emplois d'avenir hors emplois professeur, et 104.000 en incluant ces derniers", précise le rapport. L'objectif ne semble donc pas hors d'atteinte.
Cela dit, la mission a noté de fortes disparités entre les territoires. "La mission a constaté qu'il y avait un déploiement très inégal entre les régions les moins avancées qui sont à moins de 40% de leur objectif début septembre et les plus avancées, comme Midi-Pyrénées, qui sont à 80% de leur objectif ; il y a un écart du simple au double", a signalé Jean-Marc Germain, député PS des Hauts-de-Seine. Explication principale : le caractère urbain ou rural de ces territoires. Ainsi, les dix départements les plus en avance, dont le Cantal, la Haute-Loire et les Côtes-d'Armor, sont des territoires ruraux. "La mobilisation des associations et des collectivités locales - principaux employeurs concernés - par les services de l'Etat se fait indéniablement plus rapidement en zone rurale qu'urbaine", précise le rapport. Une autre explication est liée au fait que les objectifs fixés pour les territoires urbains sont plus élevés que pour les territoires ruraux. L'utilisation, plus ou moins active, des souplesses offertes par la loi, comme l'ouverture des emplois d'avenir à des jeunes un peu plus diplômés qui résident dans les zones prioritaires, zones urbaines sensibles (ZUS) ou zones de revitalisation rurale (ZRR) ainsi que les dérogations au cas par cas, peuvent aussi expliquer ces résultats.

Moduler le taux de prise en charge en fonction de la nature du contrat

"La mission a ainsi constaté, par exemple en Ile-de-France dans le secteur de l'aide aux personnes dépendantes, que des postes étaient proposés mais n'avaient pas été pourvus alors qu'ils auraient pu l'être en accordant plus largement les dérogations prévues par la loi", détaille le rapport. Autre bémol : la nature des contrats conclus.
Dans les ZUS, la proportion de jeunes recrutés en emploi d'avenir atteint 15,7% contre un objectif de 20% en 2013, 25% en 2014 et 30% en 2015. Pour développer davantage ces emplois dans ces zones, la mission propose d'homogénéiser et de fluidifier les décisions de dérogations relatives aux diplômes, en s'alignant sur les pratiques les plus souples (décisions prises sous vingt-quatre heures et fondées sur le seul critère de l'adéquation du poste au niveau de formation initiale) et de revaloriser de 5 à 10 points l'aide financière de l'Etat à destination des employeurs du secteur marchand pour l'embauche de jeunes issus de ZUS. Par ailleurs, pour régler ce qu'elle appelle les "effets de trottoirs", c'est-à-dire des situations qui ne rentrent pas strictement dans les catégories administratives prévues, la mission préconise d'autoriser les prescripteurs à recourir aux emplois d'avenir dans la limite d'un volant de 5% de leur enveloppe.

"Se concentrer sur les formations"

Mais globalement la mission estime que la cible visée est bien atteinte. 86% des bénéficiaires ont un niveau d'études inférieur au bac. "Le ciblage sur les peu ou pas qualifiés est pour l'instant très fort", a ainsi souligné Jean-Marc Germain. L'horizon n'est pas aussi rose concernant la durée des contrats. Seul un emploi sur deux bénéficie d'un CDD de trois ans (45%) ou d'un CDI (11%). Les autres contrats sont généralement des CDD d'un an, ce que critique fortement la CGT. "Depuis qu'on a ouvert la possibilité de conclure des CDD d'un an, la durée de ces emplois a beaucoup diminué, signale ainsi Jean-Philippe Revel (CGT) à Localtis, on est pris par la logique du chiffre." Pour tenter d'orienter davantage ces emplois vers des contrats durables, la mission recommande d'expérimenter pendant six mois la modulation du taux de prise en charge publique en fonction de la nature du contrat, "par exemple par une majoration de 10% pour les CDI, par une minoration de 10% pour les CDD d'un an", en s'inspirant de ce que certaines régions ont mis en place. Ainsi, en Ile-de-France, le conseil régional assure le financement de la formation de 2.500 emplois d'avenir dans des associations si l'embauche est faite en CDI.
La question de la formation a également été posée. S'il est, d'après la mission d'évaluation, trop tôt pour évaluer la mise en œuvre de la formation, "lorsque le rythme sera bien établi, il faudra très vite se concentrer sur ces formations parce que la sortie du dispositif, même si elle a lieu au bout de trois ans, doit se préparer dès maintenant", a estimé Jean-Marc Germain. Pour la CGT, des interrogations persistent en effet sur ce point. "On met la personne au travail, après le temps passe. Qui va s'occuper ensuite de la formation ?", questionne ainsi Jean-Philippe Revel. D'après les chiffres communiqués par la CGT, à l'embauche, seuls 40% des employeurs dans le secteur non marchand s'engagent à faire accéder les jeunes recrutés en emploi d'avenir à une qualification, et seulement 25% dans le secteur marchand… Reste aussi la question de la pérennité de ces emplois. A l'heure actuelle, 50.000 contrats sont encore budgétés pour le premier semestre 2014. Jean-Marc Germain propose quant à lui de décider d'une nouvelle enveloppe pour arriver à 200.000 à la fin de l'année prochaine au lieu des 150.000 prévus.

 

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