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Emmanuel Macron commence par débattre avec les maires

 Le président de la République a officiellement lancé ce mardi 15 janvier le grand débat national en appelant à un dialogue sans "tabou" face à des maires inquiets qui ont témoigné des "fractures" françaises.
"Nous pouvons faire du moment que traverse la France une chance", a souhaité le président en s'adressant à 600 maires normands rassemblés dans le gymnase de Grand Bourgtheroulde (Eure).
"Il faut constamment redemander aux gens leur avis. Je ne pense pas du tout que ce soit du temps perdu, que ce soit du temps pour arrêter les réformes car les gens veulent des changements", avait-il auparavant déclaré au cours d'une visite surprise à Gasny (Eure) à la mi-journée.
À Grand Bourgtheroulde, Emmanuel Macron a écouté les maires se succéder au micro pour énumérer la longue liste des "doléances" de leurs administrés et citer ainsi le pouvoir d'achat, la justice fiscale, le niveau des retraites ou l'affaiblissement des services publics en milieu rural. Ces élus ont suggéré plusieurs réformes : baisser la TVA sur les produits de première nécessité, rendre des compétences aux maires... "Faites confiance aux maires", ont réclamé nombre d'entre eux. "Quelle garantie nous donnez-vous que seront pris en compte les éléments que nous transmettrons ?", a interrogé Sophie de Gibon, maire de Canteloup (Calvados).
"Toutes ces fractures, on les a devant nous, et d'un seul coup, les choses s'effritent", avait expliqué en préambule le chef de l'État, citant Jacques Chirac et sa fracture sociale. "Je pense qu'il ne faut pas du tout en avoir peur. Il faut refuser la violence (...). Il faut refuser la démagogie parce que l'addition des colères n'a jamais fait une solution, mais il nous faut construire les voies et moyens de construire des solutions pour le pays."

Comme il l'avait déjà indiqué notamment en novembre dernier en marge du congrès des maires, Emmanuel Macron s'est dit "prêt à rouvrir la loi Notr" de 2015 pour "améliorer ce qui dans cette loi ne fonctionne pas". "Je crois qu'on a besoin de remettre de la responsabilité au plus près du terrain, de remettre du contact, de la clarté et du sens dans nos décisions", a-t-il déclaré.
"Je suis prêt à la rouvrir, pas pour dire on va repartir pour des années de discussions en sachant quelle compétence on met à tel endroit, quelle compétence à tel autre. Mais, on voit bien qu'il y a besoin d'une respiration sur des choses qui ont été mal faites", a-t-il poursuivi.
Et le président d'ajouter : "Donc, je souhaite dans le cadre de ce débat, sur la part que j'attends de vous, il puisse y avoir ce travail de sorte que la ministre de la Cohésion des territoires et le ministre délégué aux Collectivités territoriales puissent avancer et porter un projet qui permette d'aménager ce qui dans cette loi ne fonctionne pas. Je pense qu'il y a des choses qui sont pertinentes à faire au niveau intercommunal ou dans des communes nouvelles, mais ça marche mieux quand c'est voulu, quand ça permet de dégager de vraies économies, pas quand ça rajoute une strate en quelque sorte forcée qui ne dégage pas d'économie en vrai." "Donc, il faut ensemble l'évaluer. Il ne faut pas tout détricoter, mais il faut pragmatiquement améliorer les choses", a-t-il conclu.

Quelques extraits des déclarations et questions des élus normands

Jean-Paul Le Gendre, maire d'Iville (Eure) : "Qu'est-ce qu'on attend de nous exactement dans ce débat ? (...) Beaucoup de problématiques qui sont en cause ne sont pas directement dans nos compétences, ou en marge de nos compétences. Donc, de ce point de vue, on a besoin de savoir un peu mieux comment vous voyez les choses, quelles sont les réponses que nous devons apporter, parce qu'il y aurait là un risque de malentendu."

Valéry Beuriot, maire de Brionne : "Les vraies questions qui minent notre pays, ce sont les questions de justice sociale, auxquelles on n'a pas apporté de réponse" depuis de nombreuses années, a-t-il estimé, demandant au chef de l'État de revenir sur la suppression de l'ISF.

Aline Berthout, maire de la commune nouvelle de Frenelles-en-Vexin (Eure) : "Comment l'État peut-il aujourd'hui nous aider à mettre en place, enfin à donner les moyens de mettre en place du transport pour tous dans le milieu rural ?"

Guy Lefrand, vice-président du conseil régional de Normandie : "Pouvez-vous vous engager à imposer à l'État les mêmes règles budgétaires que vous imposez aux collectivités ? Je pense notamment à la présentation d'un budget en équilibre. Il est imposé à toutes les collectivités, il doit être imposé à l'État. (...) Pouvez-vous vous engager à baisser drastiquement les dépenses de l'État sans baisser les services publics ? (...) Pouvez-vous vous engager à arrêter les transferts de compétences de l'État vers les collectivités locales sans transfert financier associé ?"

Jean-François Lemesle, maire de Cliponville (Seine-Maritime), veut voir "mieux respect[és] ceux qui travaillent, qui gagnent le Smic, qui prennent leur voiture pour aller travailler le matin, et finalement à la fin du mois (qui) gagnent moins que ceux qui ont le RSA".

Anne-Marie Cousin, maire de Torigni-sur-Vire (Eure), évoque des propositions contenues dans les cahiers de doléances de sa commune en matière de santé : "augmenter le numerus clausus", "en arriver à obliger un jeune médecin qui sort d'études d'exercer dans un territoire déficitaire les trois premières années", "soutenir les jeunes retraités généralistes qui acceptent pour pallier cette carence sanitaire dans les territoires, de continuer à exercer un jour ou deux par semaine".

Joël Bruneau, maire de Caen : "La première crise c'est celle des finances publiques. (...) De ce point de vue le lien avec la période de 1789, sans même parler des cahiers de doléances, est quand même assez fort. La deuxième crise c'est la crise de confiance. (...) le lien avec les élus, et surtout avec les élites, surtout quand elles sont nationales, est très clairement rompu."

Bernard Aubril, maire de Lisieux (Calvados) : "Si on veut être crédibles, il faut que le vote soit obligatoire."

 

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