Inondations dans l'Aude - Emmanuel Macron annonce un fonds de soutien aux communes d'au moins 80 millions d'euros
En déplacement dans l'Aude ce 22 octobre, le président de la République a détaillé les mesures d'aide d'urgence aux communes et aux habitants victimes des graves inondations survenues il y a une semaine.
Une semaine après les intempéries qui ont fait 14 morts dans l'Aude, Emmanuel Macron a promis ce 22 octobre aux sinistrés et aux élus de ce département encore sous le choc que l'État serait "présent" pour eux et qu'il "agira vite" pour reconstruire les communes dévastées. "Pour que les choses aillent vite, j'ai souhaité que nous puissions mettre en place un fonds de roulement qui sera géré directement par le préfet. (...) D'ores et déjà nous savons que ce seront au moins 80 millions d'euros qui seront à débourser et c'est donc un tel fonds qui, dans les prochains jours, sera mis à disposition du préfet pour que l’État apporte son soutien" aux communes, a déclaré le chef de l’État lors d'une allocution à Trèbes, où six personnes sont mortes durant la crue.
L'État va ainsi indemniser les biens non assurables des collectivités, par exemple des routes, des réseaux d'eau ou des bâtiments publics. Cette somme s'ajoutera aux 200 millions que devraient verser les assureurs pour les biens assurables, notamment ceux des particuliers et des entreprises.
Ce fonds de 80 millions d'euros "sera évidemment, dans son montant final, fonction de l'ensemble des constats qui seront faits", a déclaré le chef de l’État devant les forces de secours réunies dans un gymnase de Trèbes.
Remboursement des sommes consacrées à l'hébergement d'urgence
Il a aussi annoncé que pendant 6 mois l'État rembourserait à 100% les frais engagés par les collectivités pour l'hébergement d'urgence des sinistrés. Le fonds Barnier pourra quant à lui financer le déplacement de certains bâtiments qui étaient construits dans des zones inondables, jusqu'à 100% du coût. Les collectivités bénéficieront également d'un "versement anticipé du fonds de compensation de la TVA".
En outre, le nombre de communes déclarées en état de catastrophe naturelle devrait être augmenté d'environ 75 supplémentaires, en plus des 126 actuelles, selon la préfecture. La commission de catastrophe naturelle se réunira ce jeudi pour en décider.
Le président de la République a promis "un engagement clair, rapide, des règles simples, pour ne pas demander à ceux qui souffrent et qui ont déjà tant de difficultés d'avoir les complexités à gérer et la bureaucratie à accompagner". Les assureurs se sont engagés à ne pas appliquer de pénalités sur les franchises et à porter de dix à trente jours le délai de dépôt des dossiers, a précisé l'Élysée.
Fonds de secours aux sinistrés
Le fonds de secours d'aide d'extrême urgence - 500 euros par adulte et 200 euros par enfant, versé conjointement par l'État et le département - "continuera à fonctionner pour tous nos concitoyens qui en ont besoin", a ajouté le chef de l'État. "Nous allons aussi déclencher des mécanismes pour aussi accompagner les commerçants, les artisans, les agriculteurs", en permettant pour ces derniers "que les calamités agricoles viennent suivre la reconnaissance d'une catastrophe naturelle".
Après avoir adressé les remerciements de la nation aux secours, Emmanuel Macron a ajouté : "J'ai entendu les critiques, les gens qui disaient que ça n'allait pas assez vite, qu'on n'avait pas fait suffisamment. Ils sont les bienvenus pour venir aider et faire davantage."
"Trèbes, c'est une ville de la République. Et la République c'est vous", a aussi lancé le chef de l'État aux habitants de Trèbes, commune endeuillée par les inondations après avoir été meurtrie par des attentats jihadistes en mars. "Vous avez donné un formidable visage de la République. Et cela, nul ne peut le décréter", a-t-il ajouté, en rendant hommage à la "solidarité exceptionnelle" qu'il a vue et entendue lors de sa visite dans l'Aude. "La République, c'est cette vague plus forte que toutes les vagues qui ont frappé votre commune : celle de la solidarité nationale, d'une cohésion qui nous tient."
Au contact des habitants
Auparavant, le chef de l'État s'était rendu dans le village de Villalier (1.000 habitants), au nord-est de Carcassonne, où deux personnes ont péri lors des crues. Accompagné notamment du nouveau ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, et du ministre chargé des collectivités territoriales, Sébastien Lecornu, il a rencontré les familles des 14 personnes décédées, réunies dans la salle polyvalente ainsi que des maires des communes sinistrées, puis a visité un quartier du village. "Quand je vois des gens qui ont perdu des proches en une demi-heure... Ils sont d'une dignité, d'une force. On est fort partout en France et parfois on l'oublie", a dit le chef de l'État au cours d'un échange de plus d'une heure avec la population. "Je suis fier d'être là", a-t-il ajouté, serrant la main de sinistrés et embrassant des enfants.
Certains habitants soulignent qu'ils ne se savaient pas être en zone inondable et dénoncent l'urbanisme rampant. "C'est facile de venir aider, de venir pleurer. Il y a des morts mais ça pourrait être évité. Ici, après le pont là, il y a eu de l'eau jusqu'au toit et on continue à laisser construire", avait auparavant dit à la presse Bernadette Exposito, une retraitée en colère, dont la maison a été inondée. "On ne le savait pas quand on a acheté en 1999. On a eu une inondation en 1999 avec 80 cm d'eau. Cette fois, c'est 1,50m", a-t-elle déploré.
200 millions d'euros de dommages estimés
L'Aude a reçu en quelques heures, dans la nuit du 14 au 15 octobre, l'équivalent de trois mois de pluies, les pires précipitations localement depuis 1891, qui ont fait également plus de 70 blessés. Des centaines de personnes sont sinistrées, leurs maisons dévastées, des routes sont éventrées, des villages ravagés. Dans les 126 communes les plus touchées, l'État a reconnu l'état de catastrophe naturelle afin d'accélérer les indemnisations par les assureurs. Ces derniers ont déjà enregistré près de 16.000 déclarations de sinistres pour un "coût final des dommages assurés estimé à 200 millions d'euros", a indiqué lundi la Fédération française de l'assurance (FFA).
Mobilisation du département et de la région
"Nous espérons bien évidemment une aide forte de l'État", a répété ce 22 octobre le président du conseil départemental, André Viola, qui a demandé des "mesures exceptionnelles". Sur les 126 communes pour lesquelles l'état de catastrophe naturelle a été reconnu, "122 sont rurales. S'il n'y a pas de solidarité forte, elles ne se relèveront pas", avait-il souligné samedi lors d'une conférence de presse, en présence de Didier Codorniou, vice-président de la Région.
Le conseil départemental de l'Aude devait voter ce lundi 37 millions d'euros de crédits supplémentaires pour aider les sinistrés et engager les premiers travaux de rénovation. "Ce n'est qu'un début, il faudra rajouter des crédits en 2019", a indiqué samedi André Viola. La région Occitanie, présidée par Carole Delga (PS), proposera pour sa part un plan d'investissements de 25 millions d'euros, qui sera voté le 16 novembre prochain, selon un communiqué de la collectivité.
Vendredi, environ 600 personnes sinistrées ont reçu un chèque d'aide de 500 euros par adulte et 200 euros par enfant grâce aux fonds débloqués par l'État et le département, selon André Viola. De leur côté, une quinzaine de départements de France ont annoncé des dons en faveur de l'Aude, pour un montant de 3 millions d'euros. "Nous recevons déjà l'aide de plusieurs communes. Elle sera réservée aux communes sinistrées sous la forme d'un fonds de concours pour l'aide à la reconstruction", a précisé André Viola.
Dans le département, sur la cinquantaine de routes qui avaient été interdites à la circulation, les deux tiers étaient rouvertes vendredi. Les premiers travaux de reconstruction ont débuté dès jeudi, a souligné le président du conseil départemental. Pour Villegailhenc, où un pont a été emporté par la crue du Trapel, coupant la commune en deux, un pont provisoire sera acheminé dans un délai de quatre semaines. Des expertises sont par ailleurs en cours sur des ouvrages d'art touchés par les inondations. Une quarantaine ont déjà été inspectés et trois ou quatre seraient impactés. En tout, 20 millions d'euros seront réservés par le département pour ces infrastructures.