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Jeunesse / Logement / Citoyenneté - Egalité et Citoyenneté : un projet de loi qui se cherche

Au lendemain des attentats de janvier 2015, le gouvernement a souhaité apporter, à côté des mesures sécuritaires, une réponse sociétale aux fractures observées. Après la tenue de trois comités interministériels, le projet de loi Egalité et Citoyenneté, adopté le 6 juillet dernier en première lecture par l'Assemblée nationale, en est la traduction législative. Retour sur le parcours de ce texte hétéroclite, dont nombre de dispositions - jeunesse, citoyenneté, logement, fonction publique - impliqueront directement les collectivités locales.

"Face aux fractures mises en évidence par les attentats qui ont frappé le pays en 2015, le Gouvernement renforce son action pour rassembler tous les Français autour des valeurs de la République et pour faire progressivement tomber les barrières auxquelles est confrontée une partie de la population dans ses conditions de vie." Présenté en ces termes lors du conseil des ministres du 13 avril 2016, le projet de loi Egalité et Citoyenneté (Plec) est destiné à prolonger et compléter la dynamique des trois comités interministériels à l'égalité et à la citoyenneté (Ciec) tenus entre mars 2015 et avril 2016 (voir notre article du 14 avril 2016 "Comités interministériels à l'Egalité et à la Citoyenneté : jamais deux sans trois"). Avec une ambition, celle de rassembler dans un même texte des dispositions destinées à : promouvoir l'engagement citoyen et favoriser l'autonomie des jeunes (titre 1), améliorer le cadre de vie et le logement des plus pauvres et créer enfin les conditions d'une mixité sociale – ou encore lutter contre "l'apartheid territorial, social, ethnique" pour reprendre des termes utilisés par Manuel Valls en janvier 2015 - (titre 2), combattre enfin les discriminations, promouvoir une "égalité réelle", notamment dans l'accès à la fonction publique (titre 3).

Une usine à gaz ?

Parmi les mesures emblématiques du projet initial, on rappellera, pour n'en citer que trois : la création – ou du moins son officialisation – de la réserve citoyenne destinée à faciliter l'engagement ; l'instauration d'une règle consistant à attribuer au moins 25% des logements sociaux, hors quartiers prioritaires, aux demandeurs les plus pauvres ; la prise en compte des périodes d'apprentissage dans la fonction publique pour l'accès au troisième concours.
A ce stade, ce texte affichant pourtant une ambition globale était amputé de certaines dispositions qui auraient pu contribuer à sa cohérence d'ensemble ; ainsi dans le volet jeunesse, disparition de la généralisation de la garantie jeunes en 2017, le gouvernement ayant choisi d'intégrer cette mesure dans un projet de loi Travail davantage exposé. Le Plec désigne en outre la région comme chef de file des politiques jeunesse, avec toutefois un certain flou sur les modalités de mise en oeuvre de ce changement de gouvernance. 
Avant cela, dès la diffusion de l'avant-projet de loi, des interrogations sont apparues sur le texte, certaines associations d'élus redoutant l'usine à gaz, mélange de mesures complexes et de dispositions inutiles sur le plan législatif (voir notre article du 15 mars 2016 "Projet de loi Egalité et Citoyenneté : un texte de plus ?").  

Un texte considérablement étoffé en commission

Dans les mains, à partir de fin mai, d'une commission spéciale de l'Assemblée nationale, le Plec a bien inspiré les députés, auteurs de quelque 1.200 amendements dont un tiers a été adopté (voir nos articles du 23 juin 2016 "Plec, titres I et III : les députés de la commission font feu de tout bois" et "Plec, titre II : pluie d'amendements "logement" en commission"). A cette occasion, le titre 3 dédié à l'"égalité réelle" a, en particulier, pris de l'ampleur, passant de huit à près de cinquante articles. L'égalité hommes-femmes, le droit du travail ou encore le régime des gens du voyage y ont ainsi fait leur apparition.
Soucieux d'équilibre, les députés de la commission ont procédé à certains réajustements bienvenus pour les élus locaux. Ces derniers s'étaient notamment considérés comme écartés de la procédure de saisine du préfet offerte aux conseils citoyens ; la commission les a réintégrés dans le processus.
Dans ce même élan de consensus, elle a adopté plusieurs amendements permettant de faire passer des mesures diverses souhaitées par le gouvernement et de remettre en scène des propositions de loi disqualifiées, telles que la proposition de loi "Schwartzenberg" sur le droit d'accès à la cantine scolaire. Réunis en séance plénière un mois plus tard, les députés ont plutôt accentué cette tendance, au risque de la dispersion.

Quid de la contribution des sénateurs à l'automne ?

Le Plec a été adopté en première lecture par l'Assemblée nationale le 6 juillet. Sous la nouvelle pluie d'amendements à l'initiative des députés, quelques désaccords de fond ont émergé, y compris au sein de la majorité. Au chapitre de l'engagement, sur proposition socialiste mais contre l'avis du gouvernement, l'expérimentation d'un service civique obligatoire pour les jeunes de 18 à 25 ans a ainsi été votée (voir notre article du 6 juillet 2016 "Plec : en plénière, les députés enrichissent encore les titres I et III"). Côté logement, de nombreux ajustements ont encore été opérés, avec aussi la création d'outils nouveaux tels que les opérations de requalification des quartiers anciens dégradés (ORQAD) (voir notre article du 6 juillet 2016 "Plec : les députés adoptent en séance une nouvelle avalanche d'amendements sur le titre II "logement"").
L'étape parlementaire d'après a déjà commencé puisque, deux jours avant l'attentat qui a frappé la ville de Nice, la commission spéciale du Sénat avait démarré ses auditions. Elle examinera le texte les 13 et 14 septembre prochains, avant que les sénateurs s'en emparent en séance plénière entre le 4 et le 6 octobre. Il est difficile, à ce stade, d'imaginer la forme que prendra le Plec à l'issue de cet examen, l'opposition ayant jusque-là largement critiqué le texte – qualifié, par le député UDI Michel Piron, de "vide-grenier législatif". La procédure accélérée ayant été engagée, le gouvernement mise sur un vote définitif avant la fin de l'année.

Caroline Megglé
 

Des Ciec au Plec : comment inscrire l'égalité et la citoyenneté dans la loi ?

Les trois comités interministériels à l'Egalité et à la Citoyenneté :
" Comité interministériel du 6 mars : tout un programme" - 10 mars 2015.
" Deuxième comité interministériel Egalité et Citoyenneté : rien de bien nouveau sous le soleil des Mureaux" - 27 octobre 2015.
" Comités interministériels à l'Egalité et à la Citoyenneté : jamais deux sans trois" - 14 avril 2016.

L'avant-projet de loi :
" Projet de loi Egalité et Citoyenneté : un texte de plus ?" - 15 mars 2016. 
" Plec, titre I : L'"émancipation" pour les jeunes et l'engagement pour tous" - 15 mars 2016. " Plec, titre II : Comment ne pas mettre tous les pauvres dans les mêmes quartiers" - 15 mars 2016, actualisé le 13 avril 2016.
" Plec, titre III : L'égalité réelle via le recrutement dans la fonction publique et l'interpellation citoyenne"

Le passage du Plec en commission spéciale de l'Assemblée nationale :

" Projet de loi Egalité et Citoyenneté : les organisations de jeunesse auditionnées par la commission spéciale de l'Assemblée" - 26 mai 2016.
" Plec, titres I et III : les députés de la commission font feu de tout bois" - 23 juin 2016.
" Plec, titre II : pluie d'amendements "logement" en commission" - 23 juin 2016.

L'examen en séance plénière :
" Plec : en plénière, les députés enrichissent encore les titres I et III" - 6 juillet 2016.
"Plec : les députés adoptent en séance une nouvelle avalanche d'amendements sur le titre II "logement"" - 6 juillet 2016. 
" L'Assemblée nationale adopte le Plec en première lecture" - 7 juillet 2016.

 

 

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